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La piraterie dans l'antiquité. Jules M. Sestier
Читать онлайн.Название La piraterie dans l'antiquité
Год выпуска 0
isbn 4064066085612
Автор произведения Jules M. Sestier
Жанр Языкознание
Издательство Bookwire
[1] III Rois.
[2] Iliade, XXIII, 743.
[3] Cosmos, II.
Ils se servaient des mesures et des poids employés à Babylone, et de plus, ils connaissaient, pour faciliter les transactions, l'usage des monnaies frappées. Mais ce qui contribua le plus à étendre leur influence, ce fut le soin qu'ils prirent de communiquer et de répandre partout l'écriture alphabétique.
Le témoignage de l'antiquité est unanime pour attribuer l'alphabet aux Phéniciens[1]. Cependant ils n'ont pas inventé le principe même des lettres alphabétiques, comme on l'a cru pendant longtemps. Un célèbre passage de Sanchoniaton nomme l'Égyptien Taauth (Thoth-Hermès), comme le premier instituteur des Phéniciens dans l'art de peindre les articulations de la voie humaine. Platon, Diodore, Plutarque, Aulu-Gelle, prouvent la perpétuité de cette tradition. Tacite surtout se montre bien informé sur l'origine de l'alphabet chananéen dans le passage suivant du XIe livre de ses Annales: «Les Égyptiens surent les premiers représenter la pensée avec des figures d'animaux, et les plus anciens monuments de l'esprit humain sont gravés sur la pierre. Ils s'attribuent aussi l'invention des lettres. C'est de l'Égypte que les Phéniciens, maîtres de la mer, les portèrent en Grèce et eurent la gloire d'avoir trouvé ce qu'ils avaient seulement reçu.»
L'illustre Champollion indiqua l'existence de l'élément alphabétique dans les hiéroglyphes égyptiens[2]. Mais ses idées développées par Salvolini[3], modifiées par Ch. Lenormant et Van Drival n'avaient reçu aucune consécration scientifique, lorsque M. de Rougé, digne successeur de Champollion, reprit le problème et en donna la solution[4]. Il prouva qu'au temps où les Pasteurs régnaient en Égypte, les Chananéens surent tirer de l'écriture hiératique égyptienne, abréviation cursive des signes hiéroglyphiques, les éléments de leur alphabet. Sur les vingt-deux lettres dont se compose l'alphabet phénicien, M. de Rougé montra que quinze ou seize sont assez peu altérées pour qu'on reconnaisse leur prototype égyptien du premier coup d'œil, et que les autres peuvent se ramener au type hiératique sans blesser les lois de la vraisemblance. La démonstration savante de M. de Rougé, reproduite en Allemagne par MM. Lauth Brugsch et Ebers, a été considérée comme décisive et les résultats en ont été généralement admis.
[1] Lucain, Phars. III, 220-224; Pline, Hist. nat. V, 12, 13; Clément d'Alexandrie, Stromat. I, 16, 75; Pomponius Mela, De sit. orb. I, 12; Diodore de Sicile, I, 69, V, 74; Sanchoniaton, ap. Eusèbe, Præp. evang. I, 10, p. 22, éd. Orelli; Platon, Phaedr. 59; Plutarque, Quæst. conv. IX, 3; Tacite, Annal. XI, 14.
[2] Lettre à Dacier, p. 20.
[3] Analyse gramm. de l'inscription de Rosette, p. 86.
[4] Mémoire lu, en 1859, à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, publié en 1874.
L'alphabet phénicien a été l'expression définitive de l'écriture. Du pays de Chanaan il s'est répandu dans tous les sens, et de là sont sorties toutes les écritures à l'exception du zend, d'origine cunéiforme, et de l'écriture coréenne, d'origine chinoise.
Les Phéniciens et les Égyptiens avaient beaucoup de relations commerciales entre eux: un des ports de Tyr s'appelait le port égyptien, et, c'est en présence des inconvénients que présentait l'écriture égyptienne avec ses idéographismes et ses homophonismes, que les Phéniciens, peuple pratique et négociant par excellence, furent conduits à chercher un perfectionnement de l'écriture dans sa simplification, en la réduisant à une pure peinture des sons au moyen de signes invariables, un pour chaque articulation. Les relations des Phéniciens avec les Égyptiens remontent à une époque très reculée, car dans les monuments les plus anciens, on voit que l'écriture phénicienne était déjà parfaite. C'est ce que l'on peut remarquer sur deux papyrus antérieurs aux pasteurs hycsos, le papyrus Prisse et le papyrus de Berlin, sur le sarcophage d'un roi de Sidon rapporté par le duc de Luynes, sur des inscriptions de Scyra et de Malte, et enfin sur des scarabées et des bijoux.
L'alphabet fut transporté par les Sidoniens et les Tyriens dans les contrées où ils se livraient au commerce et devint la souche commune d'où se détachèrent tous les alphabets du monde depuis l'Inde et la Mongolie jusqu'à la Gaule et l'Espagne. La tradition la plus accréditée chez les Grecs, qui connaissaient l'origine phénicienne de leur alphabet, attribuait à Cadmus[1], personnage légendaire, l'honneur d'avoir le premier répandu l'écriture sur le continent européen; d'autres légendes nommaient au lieu de Cadmus, Orphée, Linus, Musée et surtout Palamède qui aurait inventé les lettres aspirées doubles Φ, Θ, Χ. L'alphabet cadméen s'altéra suivant les lieux et forma les variétés connues sous les noms d'alphabet éolo-dorien, attique, ionien et alphabet des îles.
[1] Hérodote, V, 58.
Tel fut le don immense que les Phéniciens apportèrent à la civilisation européenne naissante. Pline[1] a fait un éloge magnifique de ce grand peuple en disant que le genre humain lui était redevable de cinq choses: des lettres, de l'astronomie, de la navigation, de la discipline militaire et de l'architecture. Cette grande conquête de l'intelligence humaine est liée intimement