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dans les humanités classiques. Et même sans aborder la collection Ad usum delphini, il est évident que le monde ancien forme un fond gigantesque de références culturelles qui permettent de mieux illustrer des questions complexes et de transmettre un message aux lecteurs. Par conséquent, les traces les plus importantes de l’Antiquité présentes dans le périodique seront étudiées par la suite.

      Alexandre le GrandAlexandre le Grand, CommodeCommode, Henri IVHenri IV, Louis XIIILouis XIII ou le jeune Louis XIVLouis XIV – la liste des souverains qui se rêvent en HerculeHercule ou cherchent à incarner les mêmes qualités que celui-ci est longue et Anne-Marie Lecoq souligne le rôle central qu’il a joué dans la propagande royale française jusqu’au milieu du XVIIe siècle4. Après coup, HerculeHercule est quelque peu évincé du discours officiel, mais curieusement, il ne disparaît pas complètement. Un des rivaux de Pierre-Charles Roy, Pierre-CharlesRoy, dont l’ode est intégrée dans le Nouveau Mercure galant de septembre 1715, écrit :

      Sous les coups de cet autre AlcideHerculeAlcide

      Tombent les Monstres combattus ;

      La Discorde noire furie,

      L’Erreur hydre de sang nourrie ;

      Suivent le Duel enchaîné ;

      Et dans sa pompe triomphale

      On voit cette Troupe infernale

      Sous le char de la Paix traîné5.

      GrâceLouis XIV à sa force et son courage qui rappellent les qualités extraordinaires du fils de ZeusZeus et d’AlcmèneAlcmène, Louis XIVLouis XIV a su battre militairement ses adversaires qui sont comparés à une hydre, ce qui est un topos de la poésie de François de Malherbe, François deMalherbe6. Le poète inconnu ajoute une seconde image à la première tirée de l’Antiquité : la coutume d’attacher le corps d’un adversaire illustre, mais vaincu, à son char et de le tirer derrière soi ; image qui pointe vers l’ancien monde en général et particulièrement vers l’Iliade dans laquelle AchilleAchille se venge d’HectorHector de cette façon7.

      À l’instar Louis XIVdu contributeur anonyme, Nicolas-Louis Ingoult, Nicolas-LouisIngoult utilise HerculeHercule de la même manière. Dans des vers publiés en janvier 1716, il décrit le défunt roi comme « un jeune AlcideHerculeAlcide » qui sert à « ses guerriers de guide8 ». Lui aussi souligne principalement les qualités militaires de Louis XIVLouis XIV en le comparant au héros grec. Plus varié est, en revanche, le recours à HerculeHercule dans la « Description curieuse de la Pompe funebre de Loüis XIV. à Cadix [sic] » qui est intégrée dans le Nouveau Mercure galant de mars 17169. Le rapprochement franco-espagnol et l’installation d’un membre de la famille royale française sur le trône d’Espagne sont comparés aux travaux d’HerculeHercule10, c’est-à-dire à des tâches extrêmement compliquées et réputées impossibles. En outre, on y loue l’engagement du roi-soleil contre le protestantisme qui est incarné par une hydre11. Le recours à HerculeHercule en Espagne ne se limite donc pas à la seule force physique. Certes, les faits illustrés ont impliqué des guerres brutales et violentes, mais le savoir-faire militaire ne se trouve pas au centre de cette glorification. Les organisateurs de la « Pompe funebre » tiennent davantage à mettre en avant les résultats de la politique de Louis XIVLouis XIV.

      Si HerculeHercule est incontestablement le héros de la mythologie antique auquel Louis XIVLouis XIV est le plus souvent comparé, un autre texte attire encore notre attention. Il s’agit d’une autre ode de Pierre-Charles Roy, Pierre-CharlesRoy. Elle fut lue à l’Académie française et publiée dans le Nouveau Mercure galant d’octobre 1715. Roy, Pierre-CharlesRoy y fait l’éloge du roi-soleil de façon générale ; il ne s’intéresse pas à une qualité en particulier et il écrit plein d’enthousiasme :

      C’est luy. Voilà son image

      Quels traits ! quelle Majesté !

      Que j’aime ce fier courage

      Temperé par la bonté !

      Autrefois, vainqueuer rapide,

      Infatigable, intrepide,

      C’étoit AchilleAchille à nos yeux :

      C’est NestorNestor, dont la vieillesse

      N’est qu’une longue jeunesse,

      Egale à celle des Dieux12.

      AvecLouis XIV cette strophe, Pierre-Charles Roy, Pierre-CharlesRoy contredit ouvertement Houdar de La Motte qui, dans la dédicace de son Iliade en vers, soutient qu’il est impossible de comparer Louis XIVLouis XIV aux héros homériques. Après cette provocation, Roy, Pierre-CharlesRoy fait néanmoins une concession aux Modernes et entame la transition des héros grecs à un personnage issu du Moyen Âge franҫais. Mais, avant d’aborder cet aspect de la glorification du défunt roi, il reste primordial de noter que dans les diverses contributions étudiées ici, Louis XIVLouis XIV paraît comme l’égal des héros mythiques qui n’y sont ni dénigrés ni discrédités.

      Cela vaut également pour un dieu païen qui est souvent présent dans les odes à la gloire de Louis XIVLouis XIV : MarsMars – le « dieu des batailles » et le surnom qu’on donne à un « grand guerrier », d’après le dictionnaire d’Antoine Furetière, AntoineFuretière13. Le Jésuite Nicolas-Louis Ingrat, Nicolas-LouisIngrat constate par exemple dans son ode, qui fut intégrée dans la livraison de janvier 1716 de la revue, que Louis XIVLouis XIV était le protégé de ce dieu guerrier qui « prend soin de sa destinée14 ». Si le roi-soleil égale ici MarsMars, il paraît même supérieur au dieu antique dans un poème présentant le défunt monarque comme pacificateur. Dans le Nouveau Mercure galant d’octobre 1715, l’abbé PelegrinPelegrin explique ainsi que Louis XIVLouis XIV a su chasser la « noire Discorde […] [d]e ces lieux où triomphoit MarsMars15 ».

      Pourtant,Louis XIV il ne faut pas oublier que la mythologique antique ne constitue pas la seule source utilisable pour glorifier Louis XIVLouis XIV. Comme il a été déjà indiqué, il faut également se tourner vers de véritables personnages historiques, qui, à l’instar d’HerculeHercule ou MarsMars, ont inspiré la glorification du roi.

      Et Louis XIVsi Alexandre le GrandAlexandre le Grand était un nouvel HerculeHercule ? Certes, il existe peu de domaines dans lesquels cette question peut être posée raisonnablement, mais la propagande royale française en fait certainement partie. À en croire Gérard Sabatier, le roi macédonien occupe une place comparable à celle d’HerculeHercule dans la glorification royale française et, momentanément, même supérieure dans celle de Louis XIVLouis XIV. Alexandre le GrandAlexandre le Grand est omniprésent, notamment dans les années 166016, avant d’être mis à l’écart comme d’autres personnages antiques ou mythologiques. Cependant, à l’instar d’HerculeHercule, le Macédonien semble avoir résisté à la vague moderne et, dans le Nouveau Mercure galant d’Hardouin Le Fèvre de Fontenay, Louis XIVLouis XIV paraît incarner plusieurs grands chefs de guerre et souverains défunts. Il sera donc tout d’abord question de ceux issus de l’Antiquité païenne avant d’étudier le rôle d’un deuxième groupe culturellement plus proche de la France catholique de la première moitié du XVIIIe siècle.

      Premièrement, Louis XIVil faut évoquer les personnalités originaires du monde macédonien et romain. Dans le Nouveau Mercure galant de septembre 1715, les lecteurs ont par exemple découvert une des odes qui fut présentée au prix de poésie de l’Académie sans pour autant le remporter. Le moi lyrique de cette contribution s’adresse aux « immortelles Déesses17 », c’est-à-dire aux muses, et il leur demande de chanter des éloges au « plus grand Roy du monde18 ». Puis, il explique pourquoi Louis XIVLouis XIV en tant que chef militaire qui restaure la paix est digne d’être loué avant de se tourner vers VirgileVirgile pour conclure :

      Berger fameux, […]

      Vante le Heros de la Seine

      Où le jour s’éteint & renaît ;

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