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Mémoires du sergent Bourgogne. Adrien-Jean-Baptiste-François Bourgogne
Читать онлайн.Название Mémoires du sergent Bourgogne
Год выпуска 0
isbn 4064066089955
Автор произведения Adrien-Jean-Baptiste-François Bourgogne
Жанр Языкознание
Издательство Bookwire
[Note 7: Nous avons trouvé les lettres de M. de Vatimesnil dans le dossier militaire de Bourgogne, aux Archives de la Guerre.]
Il mourut, octogénaire, le 15 avril 1867, deux années après le légendaire Coignet, qui alla jusqu'à quatre-vingt-dix ans. On voit que leur rude existence n'avait pas suffi pour hâter leur fin. Il est vrai qu'il fallait être exceptionnellement solide pour avoir survécu.
Malheureusement, des souffrances physiques empoisonnèrent ses derniers jours. Elles ne lui enlevèrent, toutefois, ni la belle humeur, ni la philosophie qui formait le fond de son caractère. Une de ses nièces, Mme Bussière, veuve d'un chef d'escadrons d'artillerie, était d'ailleurs venue, après la mort de sa seconde femme, victime du choléra qui sévit à Valenciennes en 1866, adoucir, par des soins dévoués, l'amertume de ses maux.
Le portrait de notre héros, qui a pris place en tête du volume, est la reproduction d'une lithographie représentant Bourgogne à l'âge de quarante-cinq ans, avec l'air officiellement sévère et le regard un peu dur de l'adjudant de place, personnification vivante de la consigne. Mais ce que nous savons de sa bonté naturelle montre que c'est ici le cas d'appliquer le précepte du poète:
Garde-toi, tant que tu vivras.
De juger les gens sur la mine!
Ajoutons qu'au temps de sa jeunesse il passait, non sans raison, pour un beau soldat: sa haute stature, son air martial imposaient[8].
[Note 8: Voici, d'après une note de ses Mémoires, la liste des grandes batailles auxquelles Bourgogne prit part: Iéna, Pultusk, Eylau, Eilsberg, Friedland, Essling, Wagram, Somo-Sierra, Bénévent, Smolensk, la Moskowa, Krasnoé, la Bérézina, Lutzen et Bautzen: «Ajouté à cela, dit-il, plus de vingt combats et autres divertissements semblables.»]
Selon notre coutume, nous n'avons fait d'autres modifications au texte que la rectification de l'orthographe et la suppression des phrases inutiles. Moins scrupuleux s'est montré un journal disparu (l'Écho de la Frontière) qui a donné, en 1857, une partie des Mémoires de Bourgogne, en les corrigeant si bien qu'il les a dépouillés de leur couleur originale.
La collection de l'Écho de la Frontière est des plus rares: le seul exemplaire que nous en connaissions se trouve à la bibliothèque de Valenciennes. Son feuilleton de Bourgogne fut tiré à part; nous n'avons pu en retrouver que de rares exemplaires. Ce tirage à part ne contient même qu'une partie du texte publié par le journal, et ne dépasse point la page 176 du présent volume. L'Écho de la Frontière conduit le lecteur jusqu'à la page 286. Nous avons donc regardé ces Mémoires comme ayant la valeur d'une oeuvre inédite, jusqu'à leur publication, en 1896, dans la Nouvelle Revue rétrospective[9].
[Note 9: Le Mémoires de Bourgogne ont paru, pour la première fois in extenso d'après le manuscrit original, dans la Nouvelle Revue rétrospective, consacrée, depuis quatorze ans, à la publication de documents concernant notre histoire nationale, depuis deux siècles.]
Le manuscrit original, qui avait été déposé, en 1891, à la bibliothèque de Valenciennes, vient d'être remis entre les mains de la fille de Bourgogne, Mme Defacqz. Il se compose de six cent seize pages in-folio, presque toutes de la main de l'auteur. Nous restons les obligés de M. Auguste Molinier, qui, le premier, a songé à en offrir la publication à la Nouvelle Revue rétrospective, et de M. Edmond Martel, qui a bien voulu faire, pour nous, des recherches sur la famille Bourgogne, à Valenciennes et à Condé.
Nommons encore les neveux de notre héros, M. le docteur Bourgogne et M. Amédée Bourgogne; M. Loriaux, son ancien propriétaire; M. Paul Marmottan, et nous aurons fait apprécier l'importance, comme la multiplicité des concours apportés à notre oeuvre. Leur constatation reste, en même temps, notre première garantie.
MÉMOIRES DU SERGENT BOURGOGNE (1812-1813)
I
D'Almeida à Moscou.
Ce fut au mois de mars 1812, lorsque nous étions à Almeida, en
Portugal, à nous battre contre l'armée anglaise, commandée par
Wellington, que nous reçûmes l'ordre de partir pour la Russie.
Nous traversâmes l'Espagne, où chaque jour de marche fut marqué par un combat, et quelquefois deux. Ce fut de cette manière que nous arrivâmes à Bayonne, première ville de France.
Partant de cette ville, nous prîmes la poste et nous arrivâmes à Paris où nous pensions nous reposer. Mais, après un séjour de quarante-huit heures, l'Empereur nous passa en revue, et jugeant que le repos était indigne de nous, nous fit faire demi-tour et marcher en colonnes, par pelotons, le long des boulevards, ensuite tourner à gauche dans la rue Saint-Martin, traverser la Villette, où nous trouvâmes plusieurs centaines de fiacres et autres voitures qui nous attendaient. L'on nous fit faire halte, ensuite monter quatre dans la même voiture et, fouette cocher! jusqu'à Meaux, puis sur des chariots jusqu'au Rhin, en marchant jour et nuit.
Nous fîmes séjour à Mayence, puis nous passâmes le Rhin; ensuite nous traversâmes à pied le grand-duché de Francfort[10], la Franconie, la Saxe, la Prusse, la Pologne. Nous passâmes la Vistule à Marienwerder, nous entrâmes en Poméranie, et, le 25 juin au matin, par un beau temps, non pas par un temps affreux, comme le dit M. de Ségur, nous traversâmes le Niémen sur plusieurs ponts de bateaux que l'on venait de jeter, et nous entrâmes en Lithuanie, première province de Russie.
[Note 10: Francfort avait été érigé en grand-duché, en 1806, par
Napoléon, en faveur de l'électeur de Mayence.]
Le lendemain, nous quittâmes notre première position et nous marchâmes jusqu'au 29, sans qu'il nous arrivât rien de remarquable; mais, dans la nuit du 29 au 30, un bruit sourd se fit entendre: c'était le tonnerre qu'un vent furieux nous apportait. Des masses de nuées s'amoncelaient sur nos têtes et finirent par crever. Le tonnerre et le vent durèrent plus de deux heures. En quelques minutes, nos feux furent éteints; les abris qui nous couvraient, enlevés; nos faisceaux d'armes renversés. Nous étions tous perdus et ne sachant où nous diriger. Je courus me réfugier dans la direction d'un village où était logé le quartier général. Je n'avais, pour me guider, que la lueur des éclairs. Tout à coup, à la lueur d'un éclair, je crois apercevoir un chemin, mais c'était un canal qui conduisait à un moulin que les pluies avaient enflé, et dont les eaux étaient au niveau du sol. Pensant marcher sur quelque chose de solide, je m'enfonce et disparais. Mais, revenu au-dessus de l'eau, je gagne l'autre bord à la nage. Enfin, j'arrive au village, j'entre dans la première maison que je rencontre et où je trouve la première chambre occupée par une vingtaine d'hommes, officiers et domestiques, endormis. Je gagne le mieux possible un banc qui était placé autour d'un grand poêle bien chaud, je me déshabille, je m'empresse de tordre ma chemise et mes habits, pour en faire sortir l'eau, et je m'accroupis sur le banc, en attendant que tout soit sec; au jour, je m'arrange le mieux possible, et je sors de la maison pour aller chercher mes armes et mon sac, que je retrouve dans la boue.
Le lendemain 30, il fit un beau soleil qui sécha tout, et, le même jour, nous arrivâmes à Wilna, capitale de la Lithuanie, où l'Empereur était arrivé, depuis la veille, avec