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pour aller en Islande, et Össur avec lui.

      Quand ils furent prêts, Hrut vint trouver le roi et Gunhild. Gunhild le prit à part et lui dit: «Voici un anneau d'or que je veux te donner» et elle le lui passa au bras. «J'ai reçu de toi beaucoup de beaux cadeaux» dit Hrut. Elle lui mit les bras autour du cou, le baisa et dit: «Si j'ai autant de puissance sur toi que je me l'imagine, voici que je te jette un sort, et je veux que tu n'aies pas de bonheur avec cette femme que tu vas prendre en Islande, mais tu pourras trouver ton plaisir avec d'autres femmes. Et maintenant nous ne serons heureux ni l'un ni l'autre: car tu n'as pas eu confiance en moi.» Hrut se mit à rire et s'en alla. Il vint trouver le roi, et le remercia de l'avoir toujours bien traité, et comme un chef. Le roi lui souhaita bon voyage. Il dit que Hrut était un homme très-brave, et qui pouvait aller de pair avec les plus grands. Hrut monta sur son vaisseau, et mit à la voile. Il eut bon vent, et ils arrivèrent, lui et les siens, dans le Borgarfjord.

      Sitôt que le vaisseau fut à terre, Hrut s'en alla chez lui, dans l'Ouest, et Össur resta pour décharger. Hrut vint à Höskuldstad. Son frère le reçut avec joie, et Hrut lui conta ses aventures. Après cela, il envoya un homme dans le pays de la Ranga, dire à Mörd Gigja de se préparer pour la noce. Les deux frères allèrent au vaisseau, et Höskuld dit à Hrut l'état de ses biens. Ils s'étaient beaucoup accrus depuis que Hrut était parti. Hrut dit: «Je ne te le revaudrai jamais comme je le devrais, frère; mais je vais te donner de la farine, autant qu'il t'en faudra pour la maison durant l'hiver.» Ils tirèrent le vaisseau à terre, lui firent un abri, et portèrent toute la cargaison dans la vallée de l'Ouest.

      Hrut resta six semaines chez lui, à Hrutstad. Alors les deux frères et Össur se préparèrent à partir pour la noce de Hrut. Ils montèrent à cheval, et soixante hommes avec eux. Ils chevauchèrent d'une traite jusqu'à la plaine de la Ranga. Il y avait grande foule d'hôtes. Les hommes prirent place sur les bancs du fond, et les femmes sur les bancs de côté. La fiancée était triste. On versa à boire, et la noce se passa bien. Mörd compta la dot de sa fille, et elle partit avec Hrut pour le pays de l'Ouest. Ils chevauchèrent sans s'arrêter jusqu'à ce qu'ils fussent arrivés chez eux. Hrut donna à sa femme toute puissance sur l'intérieur de sa maison, et chacun trouva que c'était bien. Et pourtant ils ne semblaient pas faire bon ménage. Cela dura ainsi jusqu'au printemps.

      Quand le printemps fut venu, Hrut eut à faire un voyage aux fjords de l'Ouest, pour chercher l'argent de sa cargaison. Comme il allait partir Unn lui dit: «Penses-tu revenir avant que les hommes aillent au ting?»--«Pourquoi?» dit Hrut.--«C'est que je veux aller au ting, dit-elle, et voir mon père.»--«Ce sera comme tu veux, dit-il, et j'irai au ting avec toi.»--«C'est bien» dit-elle.

      Hrut monta à cheval et partit pour les fjords de l'Ouest. Il plaça tout son argent, et revint chez lui. Dès qu'il fut revenu, il se prépara à partir pour le ting. Tous ses voisins devaient venir avec lui. Höskuld son frère en était aussi. Hrut dit à sa femme: «Si tu as toujours autant d'envie de venir au ting, prépare-toi, et pars avec moi. » Elle fut bientôt prête et ils se mirent en route. Ils chevauchèrent sans s'arrêter jusqu'au ting.

      Unn entra dans la hutte de son père. Il lui fit joyeux accueil; mais elle était d'humeur assez sombre. Il s'en aperçut, et dit: «Je t'ai vu meilleur visage autrefois; qu'as-tu sur le cœur?» Elle se mit à pleurer et ne répondit rien. Alors il lui dit: «Pourquoi es-tu venue au ting, si tu ne veux pas répondre et te fier à moi? Ne te plais-tu pas dans ce pays de l'Ouest?» Elle répondit: «Je donnerais tout ce que j'ai pour n'y être jamais venue.» Mörd dit: «Il faut que je sache ce que c'est que cela.» Il fit appeler Hrut et Höskuld. Ils vinrent sur le champ. Comme ils entraient chez Mörd, il se leva pour aller à leur rencontre, les salua, et les fit asseoir. Ils parlèrent longtemps, et la conversation allait bien. À la fin, Mörd dit à Hrut: «Pourquoi ma fille pense-t-elle tant de mal de votre pays?» Hrut répondit: «Qu'elle dise si elle a quelque sujet de se plaindre de moi.» Mais elle n'en trouva point. Alors Hrut fit venir ses voisins et les gens de chez lui, pour leur faire dire comment il se conduisait avec elle. Ils lui rendirent bon témoignage, et déclarèrent qu'elle décidait sur toutes choses comme elle l'entendait. Mörd dit: «Tu vas retourner chez toi, et te contenter de ton sort; car tous les témoignages sont meilleurs pour lui que pour toi.»

      Après cela, Hrut quitta le ting, et sa femme avec lui; et tout alla bien entre eux pendant l'été. Mais quand vint l'hiver, ils n'étaient plus d'accord; et plus le printemps approchait, plus ils s'entendaient mal. Hrut eut encore à faire un voyage aux fjords, pour ses affaires, et il annonça qu'il n'irait point au ting. Unn fit peu de réponse, et Hrut partit, dès qu'il eut fini ses préparatifs.

       Table des matières

      Le moment du ting approchait. Unn alla trouver Sigmund, fils d'Össur, et lui demanda s'il voulait venir au ting avec elle. Il dit qu'il n'irait pas, si son parent Hrut le trouvait mauvais. «Je t'ai demandé cela, dit-elle, parce que j'ai plus de droits sur toi que sur les autres.» Il répondit: «Je le ferai à une condition; c'est que tu reviendras dans l'Ouest avec moi, et que tu ne diras point de paroles, ni contre moi, ni contre Hrut.» Elle promit.

      Quelques temps après, ils partirent pour le ting. Mörd, le père d'Unn, y était. Il fit bon accueil à sa fille et l'invita à demeurer dans sa hutte tant que le ting durerait, ce qu'elle fit. Mörd lui demanda: «Que me diras-tu de Hrut, ton mari?» Elle répondit:--«Certes je dirai du bien de ce vaillant guerrier, tant qu'il est maître de lui-même. Mais un sort a été jeté sur lui, et il me faut parler beaucoup, ou me taire.»

      Mörd se tut pendant quelque temps, puis il dit: «Je vois, ma fille, que tu désires que personne que moi ne sache cela. Tu sais que je puis t'aider mieux que qui que ce soit.» Ils s'en allèrent dans un lieu écarté, où personne ne pouvait les entendre, et Mörd dit à sa fille: «Dis-moi tout ce qu'il y a entre vous, et ne crois pas ton malheur plus grand qu'il n'est.» Et elle lui expliqua comme quoi elle et Hrut ne pouvaient pas vivre ensemble, parce qu'on lui avait jeté un sort.

      Mörd répondit: «Tu as bien fait de me dire cela. Je vais te donner un conseil qui te sera utile si tu le suis de point en point. Il faut que tu quittes le ting, et que tu rentres chez toi; ton mari sera déjà de retour; il te recevra bien; tu seras douce et complaisante pour lui: il croira qu'il s'est fait un heureux changement; il ne faut pas que tu montres la moindre mauvaise humeur. Mais quand le printemps viendra, tu feras la malade, et tu te mettras au lit. Hrut ne te fera point de questions sur ta maladie, ni de reproches d'aucune sorte; il ordonnera au contraire qu'on te soigne pour le mieux. Puis il partira pour les fjords de l'ouest, et Sigmund avec lui. Il s'occupera de rapporter tous ses biens du pays de l'ouest, et il sera absent tout l'été. Mais toi, au moment où les hommes vont au ting, quand tous ceux qui doivent y aller seront partis, tu te lèveras de ton lit, et tu prendras quelques hommes pour t'accompagner; et quand tu seras prête à partir, tu iras devant ton lit, et avec toi ces hommes que tu auras pris pour t'accompagner. Tu prendras des témoins devant le lit de ton mari, et tu déclareras que tu te sépares de lui par séparation légale, et que tu renouvelleras ta déclaration devant le ting, selon la loi du pays. Tu prendras des témoins une seconde fois, et tu feras une déclaration semblable, devant la porte des hommes. Après cela, tu monteras à cheval, et tu partiras. Tu passeras par les plaines du Laxardal, et par celles de Holtavörd, (car on te cherchera du côté du Hrutafjord) et tu chevaucheras sans t'arrêter jusqu'à ce que tu arrives près de moi. Alors je m'occuperai de ton affaire, et tu ne retomberas plus jamais entre les mains de Hrut.»

      Elle quitta le ting, et retourna chez elle. Hrut était revenu; il lui fit bon accueil. Elle répondit amicalement, et elle était douce et complaisante avec lui. Ils vécurent en bonne intelligence cet hiver-là. Mais quand vint le printemps, elle fit la malade et se mit au lit. Hrut partit pour les fjords de l'Ouest, donnant ordre de la bien soigner. Quand vint le moment du ting, elle se tint prête, fit en toutes choses comme Mörd lui avait dit, et partit pour le ting. Les gens du canton se mirent à sa poursuite, mais ils ne la trouvèrent pas.

      Mörd fit bon accueil

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