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Les enfants du capitaine Grant. Jules Verne
Читать онлайн.Название Les enfants du capitaine Grant
Год выпуска 0
isbn 4064066088545
Автор произведения Jules Verne
Жанр Языкознание
Издательство Bookwire
Paganel et Glenarvan seraient restés longtemps à contempler cette lutte magnifique des feux de la terre et des feux du ciel; les bûcherons improvisés faisaient place aux artistes; mais Wilson, moins enthousiaste, les rappela au sentiment de la situation. Le bois manquait, il est vrai; heureusement, un lichen maigre et sec revêtait les rocs; on en fit une ample provision, ainsi que d’une certaine plante nommée «llaretta», dont la racine pouvait brûler suffisamment. Ce précieux combustible rapporté à la casucha, on l’entassa dans le foyer. Le feu fut difficile à allumer et surtout à entretenir. L’air très raréfié ne fournissait plus assez d’oxygène à son alimentation; du moins ce fut la raison donnée par le major.
«En revanche, ajoutait-il, l’eau n’aura pas besoin de cent degrés de chaleur pour bouillir; ceux qui aiment le café fait avec de l’eau à cent degrés seront forcés de s’en passer, car à cette hauteur l’ébullition se manifestera avant quatre-vingt-dix degrés.»
Mac Nabbs ne se trompait pas, et le thermomètre plongé dans l’eau de la chaudière, dès qu’elle fut bouillante, ne marqua que quatre-vingt-sept degrés. Ce fut avec volupté que chacun but quelques gorgées de café brûlant; quant à la viande sèche, elle parut un peu insuffisante, ce qui provoqua de la part de Paganel une réflexion aussi sensée qu’inutile.
«Parbleu, dit-il, il faut avouer qu’une grillade de lama ne serait pas à dédaigner! on dit que cet animal remplace le bœuf et le mouton, et je serais bien aise de savoir si c’est au point de vue alimentaire!
—Comment! dit le major, vous n’êtes pas content de notre souper, savant Paganel?
—Enchanté, mon brave major; cependant j’avoue qu’un plat de venaison serait le bienvenu.
—Vous êtes un sybarite, dit Mac Nabbs.
—J’accepte le qualificatif, major; mais vous-même, et quoique vous en disiez, vous ne bouderiez pas devant un beefsteak quelconque!
—Cela est probable, répondit le major.
—Et si l’on vous priait d’aller vous poster à l’affût malgré le froid et la nuit, vous iriez sans faire une réflexion?
—Évidemment, et pour peu que cela vous plaise…»
Les compagnons de Mac Nabbs n’avaient pas eu le temps de le remercier et d’enrayer son incessante obligeance, que des hurlements lointains se firent entendre. Ils se prolongeaient longuement. Ce n’étaient pas là des cris d’animaux isolés, mais ceux d’un troupeau qui s’approchait avec rapidité.
La providence, après avoir fourni la cahute, voulait-elle donc offrir le souper? Ce fut la réflexion du géographe. Mais Glenarvan rabattit un peu de sa joie en lui faisant observer que les quadrupèdes de la cordillère ne se rencontrent jamais sur une zone si élevée.
«Alors, d’où vient ce bruit? dit Tom Austin. Entendez-vous comme il s’approche!
—Une avalanche? dit Mulrady.
—Impossible! Ce sont de véritables hurlements, répliqua Paganel.
—Voyons, dit Glenarvan.
—Et voyons en chasseurs», répondit le major qui prit sa carabine.
Tous s’élancèrent hors de la casucha. La nuit était venue, sombre et constellée. La lune ne montrait pas encore le disque à demi rongé de sa dernière phase.
Les sommets du nord et de l’est disparaissaient dans les ténèbres, et le regard ne percevait plus que la silhouette fantastique de quelques rocs dominants. Les hurlements, —des hurlements de bêtes effarées, —redoublaient. Ils venaient de la partie ténébreuse des cordillères. Que se passait-il?
Soudain, une avalanche furieuse arriva, mais une avalanche d’êtres animés et fous de terreur. Tout le plateau sembla s’agiter. De ces animaux, il en venait des centaines, des milliers peut-être, qui, malgré la raréfaction de l’air, produisaient un vacarme assourdissant. Étaient-ce des bêtes fauves de la pampa ou seulement une troupe de lamas et de vigognes? Glenarvan, Mac Nabbs, Robert, Austin, les deux matelots, n’eurent que le temps de se jeter à terre, pendant que ce tourbillon vivant passait à quelques pieds au-dessus d’eux.
Paganel, qui, en sa qualité de nyctalope, se tenait debout pour mieux voir, fut culbuté en un clin d’œil.
En ce moment la détonation d’une arme à feu éclata.
Le major avait tiré au jugé. Il lui sembla qu’un animal tombait à quelques pas de lui, tandis que toute la bande, emportée par son irrésistible élan et redoublant ses clameurs, disparaissait sur les pentes éclairées par la réverbération du volcan.
«Ah! Je les tiens, dit une voix, —la voix de Paganel.
—Et que tenez-vous? demanda Glenarvan.
—Mes lunettes, parbleu! C’est bien le moins qu’on perde ses lunettes dans une pareille bagarre!
—Vous n’êtes pas blessé?…
—Non, un peu piétiné. Mais par qui?
—Par ceci», répondit le major, en traînant après lui l’animal qu’il avait abattu.
Chacun se hâta de regagner la cahute, et à la lueur du foyer on examina le «coup de fusil» de Mac Nabbs.
C’était une jolie bête, ressemblant à un petit chameau sans bosse; elle avait la tête fine, le corps aplati, les jambes longues et grêles, le poil fin, le pelage café au lait, et le dessous du ventre tacheté de blanc. À peine Paganel l’eut-il regardée, qu’il s’écria:
«C’est un guanaque!
—Qu’est-ce que c’est qu’un guanaque? demanda Glenarvan.
—Une bête qui se mange, répondit Paganel.
—Et c’est bon?
—Savoureux. Un mets de l’olympe. Je savais bien que nous aurions de la viande fraîche pour souper. Et quelle viande! Mais qui va découper l’animal?
—Moi, dit Wilson.
—Bien, je me charge de le faire griller, répliqua Paganel.
—Vous êtes donc cuisinier, Monsieur Paganel? dit Robert.
—Parbleu, mon garçon, puisque je suis français! Dans un français il y a toujours un cuisinier.»
Cinq minutes après, Paganel déposa de larges tranches de venaison sur les charbons produits par la racine de llaretta. Dix minutes plus tard, il servit à ses compagnons cette viande fort appétissante sous le nom de «filets de guanaque».
Personne ne fit de façons, et chacun y mordit à pleines dents.
Mais, à la grande stupéfaction du géographe, une grimace générale, accompagnée d’un «pouah» unanime, accueillit la première bouchée.
«C’est horrible! dit l’un.
—Ce n’est pas mangeable!» répliqua l’autre.
Le pauvre savant, quoi qu’il en eût, dut convenir que cette grillade ne pouvait être acceptée, même par des affamés. On commençait donc à lui lancer quelques plaisanteries, qu’il entendait parfaitement, du reste, et à dauber son «mets de l’olympe»; lui-même cherchait la raison pour laquelle cette chair de guanaque, véritablement bonne et très