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autant que la fonction de nos charges le peut permettre. J'espère que vous en verrez bientôt des effets, si messieurs de votre compagnie veulent s'unir et concourir avec nous dans le même dessein.»

      Les frondeurs ne se dissimulèrent pas la portée d'un acte qui allait frapper d'illégalité toutes les mesures du parlement de Paris. Ils éclatèrent en menaces et firent pleuvoir les pamphlets contre le parlement de Pontoise. Le Mercure de cour, le Parlement burlesque de Pontoise, la Satire du parlement de Pontoise, etc., s'efforcèrent de verser le ridicule sur les magistrats qui avaient obéi aux ordres de la cour. Mais la violence même des attaques atteste l'inquiétude que leur inspirait cette assemblée. On voit aussi, par les noms cités dans les mazarinades, que Nicolas Fouquet ne s'était pas trompé en désignant les membres du parlement qui céderaient aux sollicitations des partisans de la cause royale. Le premier président, Mathieu Molé, les présidents à mortier de Novion et le Coigneux, l'évêque de Noyon, pair ecclésiastique, les maréchaux de l'Hôpital et de Villeroy, pairs laïcs, plusieurs conseillers de la Grand'Chambre, les présidents des enquêtes Perrot et de Bragelonne, les conseillers de Sève, Lefèvre, Tambonneau, de la Barre, Ménardeau, etc., enfin les maîtres des requêtes qui étaient de quartier auprès du roi, se réunirent le 7 août[T.I pag.150] en audience solennelle, et, après avoir entendu la déclaration du roi que leur apporta le procureur général Nicolas Fouquet, ils se constituèrent comme véritable et seul parlement de Paris. Le lendemain, jeudi, ils résolurent, de concert avec le cardinal Mazarin, d'adresser au roi de très-humbles remontrances pour demander l'éloignement de ce ministre[280]. Elles furent faites par le président de Novion, et le roi, qui ne paraissait plus céder à des séditieux, mais déférer aux doléances de sujets dociles, promit de prendre l'avis de son conseil. Ce fut à la suite de ces délibérations que Mazarin, s'éloignant pour la seconde fois, enleva tout prétexte à ceux qui prétendaient ne combattre que l'autorité odieuse d'un ministre étranger et affectaient un respect hypocrite pour le pouvoir royal.[T.I pag.151]

       Table des matières

      —JUILLET-SEPTEMBRE 1652—

      Le duc d'Orléans est déclaré lieutenant général du royaume et le prince de Condé généralissime des armées (20 juillet).—Conseil établi par les princes; disputes de préséance; duel de Nemours et de Beaufort (30 juillet); querelle de Condé et du comte de Rieux (31 juillet).—Désordres commis par les troupes des princes.—Mécontentement de la bourgeoisie parisienne; assemblées aux halles et au cimetière des Innocents (20 août).—Mazarin s'éloigne pour quelque temps; sa correspondance avec les deux Fouquet.—Chavigny négocie avec la cour au nom des princes.—Inquiétude que le cardinal de Retz inspire à Mazarin.—Retz se rend à la cour (9 septembre), et veut traiter avec la reine au nom du duc d'Orléans.—Il n'y réussit pas.—L'abbé Fouquet excite la bourgeoisie parisienne et négocie avec Chavigny.—Assemblée des bourgeois au Palais-Royal (24 septembre); ils se déclarent antifrondeurs.—Conférence de l'abbé Fouquet avec Goulas (26 septembre).—Il part pour la cour.—On intercepte une lettre de l'abbé Fouquet adressée au secrétaire d'État le Tellier.

      En présence des ordres précis et de l'attitude décidée de la cour, les princes n'avaient plus qu'à déposer les armes ou à déclarer ouvertement la guerre au roi. Ils n'hésitèrent pas à prendre ce dernier parti. Le parlement et la bourgeoisie, terrifiés par les dernières violences, les suivirent pendant quelque temps et parurent adhérer à toutes leurs résolutions. Dès le 20 juillet, le duc d'Orléans fut proclamé lieutenant général du[T.I pag.152] royaume par arrêt du parlement[281]; le prince de Condé fut en même temps nommé généralissime des armées. «Ceux qui ne furent pas de l'avis de l'arrêt, ajoute Omer-Talon, reconnurent, en sortant de la Grand'Chambre, qu'il était bien heureux que leur avis n'eût pas été suivi, parce que toutes choses étaient disposées pour la violence.» Le premier soin du régent fut d'organiser un conseil de gouvernement, où devaient siéger, avec les deux princes, le chancelier Pierre Séguier; le duc de Nemours, prince de la maison de Savoie; le duc de Beaufort, qui fut bientôt nommé gouverneur de Paris; le prince de Tarente, de la maison de la Trémouille; le duc de Rohan, le prince de Guéménée et plusieurs autres. A peine établi, ce conseil donna lieu à des querelles de préséance et à des scènes sanglantes. Le duc de Nemours provoqua le duc de Beaufort, son beau-frère, contre lequel il nourrissait une haine invétérée. Le duel eut lieu le 30 juillet, et Nemours y fut tué[282]. Le lendemain, le comte de Rieux, second fils du duc d'Elbeuf, ayant disputé la préséance au prince de Tarente, Condé intervint avec sa hauteur ordinaire, et, sur un mot blessant du comte de Rieux, il lui donna un soufflet. Le comte riposta par un coup, qui n'atteignit Condé qu'à l'épaule[283]. Au moment où le prince saisissait une épée, les témoins de cette scène, et entre autres le duc de Rohan, se jetèrent entre lui et le comte de[T.I pag.153] Rieux. Ce dernier fut arrêté et conduit à la Bastille par ordre du duc d'Orléans.

      Ces luttes scandaleuses déconsidéraient le parti des princes, et en même temps les excès de leurs troupes le rendaient odieux. Depuis le combat du faubourg Saint-Antoine, elles campaient au faubourg Saint-Victor et pillaient les villages voisins. Sur les plaintes des habitants[284], les princes les éloignèrent, et on les dirigea vers Corbeil. Mais lorsque les habitants de cette ville apprirent l'approche des bandes de pillards, ils coupèrent leur pont et leur fermèrent le passage. Il fallut ramener la petite armée des princes à Saint-Cloud, d'où elle continua de dévaster les campagnes. Plus tard, on voulut de nouveau l'établir dans les faubourgs Saint-Victor et Saint-Marceau; mais les habitants se barricadèrent elles repoussèrent[285]. Pendant que les troupes des princes se livraient à ces désordres, les ennemis pénétraient dans le nord de la France et menaçaient les villes de Gravelines et de Dunkerque, anciennes conquêtes du duc d'Orléans et du prince de Condé. Ainsi les chefs de la Fronde sacrifiaient à leur ambition le repos, l'intérêt et l'honneur de la France.

      Il était impossible que la bourgeoisie honnête et éclairée ne gémît pas d'une pareille oppression, surtout lorsqu'il fallut payer les taxes établies par le conseil des princes. Elle commençait à murmurer, et, dès qu'on[T.I pag.154] fut certain que le cardinal Mazarin était parti, elle se rassembla au cimetière des Innocents et sous les piliers des halles pour délibérer sur la situation présente et y porter remède. Les Parisiens résolurent d'envoyer des députations au duc d'Orléans pour le prier d'éloigner ses troupes de la capitale, et décidèrent qu'ils s'adresseraient directement au roi pour le supplier de revenir dans sa bonne ville de Paris[286]. Le parlement exprima le même vœu, et les princes déclareront qu'ils étaient disposés à s'y rendre, pourvu que la retraite du cardinal Mazarin fût sans apparence de retour. Ils espéraient, grâce à cette restriction, éluder les instances des Parisiens. Mais les partisans de la cause royale avaient repris courage, et ils ne cessèrent depuis cette époque de manifester leurs sentiments avec énergie. Nous retrouvons toujours à leur tête les deux Fouquet.

      Mazarin, qui s'acheminait lentement vers l'exil, écrivait, de Reims, à l'abbé Fouquet (27 août): «Je vous remercie de tout mon cœur de la continuation de vos soins et de votre affection. Je vous prie d'assurer aussi M. le procureur général que j'ai une parfaite connaissance de la manière dont il agit. Vous lui manderez qu'il faut que lui et les autres du parlement portent les choses hautement et avec plus de vigueur que jamais, comme il a été concerté, parce que ceux de Paris n'oublieront rien pour affaiblir leurs résolutions ou mettre de la sédition entre eux, n'ayant plus d'autre ressource; car sans cela il faudra bien qu'à la fin ils se[T.I pag.155] mettent à la raison. Il faudrait tâcher de faire en sorte que les conseillers du parlement qui est à Pontoise ne désemparent point, et d'y en faire venir d'autres. Je crois qu'il serait bon d'y envoyer quelques-uns des maîtres des requêtes qui sont auprès du roi, n'étant pas malaisé, ce me semble, d'en faire venir d'autres de Paris en leur place, et ainsi l'on remédiera à l'inconvénient que vous me marquez du petit nombre de membres du parlement.» En terminant, Mazarin recommandait à l'abbé Fouquet de veiller à l'union et au concert de tousses amis. «Je vous prie,

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