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Le Collier de la Reine, Tome I. Dumas Alexandre
Читать онлайн.Название Le Collier de la Reine, Tome I
Год выпуска 0
isbn
Автор произведения Dumas Alexandre
Жанр Зарубежная классика
Издательство Public Domain
– Oui, et celui qui m'a donné ma consigne me fera fusiller; merci!
– Qui donc vous a donné cette consigne?
– Le roi.
– Le roi! répétèrent les deux femmes avec épouvante; oh! nous sommes perdues.
La plus jeune semblait presque folle.
– Voyons, voyons, dit l'aînée, y a-t-il d'autres portes?
– Oh! madame, si on a fermé celle-ci, on a fermé les autres.
– Oh! non, c'est un parti pris.
– Et si nous ne trouvons pas Laurent à cette porte, qui est la sienne, où croyez-vous que nous le trouvions?
– C'est vrai, et tu as raison. Oh! Andrée, Andrée, voilà un horrible tour du roi. Oh! oh!
Et la dame accentua ses dernières paroles avec un mépris menaçant.
Cette porte des Réservoirs était pratiquée dans l'épaisseur d'une muraille assez profonde pour faire de cette niche une espèce de vestibule.
Un banc de pierre régnait des deux côtés.
Les dames s'y laissèrent tomber, dans un état d'agitation qui ressemblait au désespoir.
On y voyait sous la porte une raie lumineuse; on entendait derrière la porte le pas du Suisse, qui tantôt levait, tantôt posait son fusil.
Au-delà de ce mince obstacle de chêne, le salut; en deçà, la honte, un scandale, presque la mort.
– Oh! demain, demain, quand on saura! murmura l'aînée des deux femmes.
– Mais vous direz la vérité.
– La croira-t-on?
– Vous avez des preuves.
– Oh! oui, en effet, je serai admise à donner des preuves, s'écria la dame avec un rire amer.
– Madame, le soldat ne va pas veiller toute la nuit, dit la jeune femme qui semblait reprendre courage au fur et à mesure que le perdait sa compagne; à une heure ou l'autre, on le relèvera, et son successeur sera plus complaisant peut-être. Attendons.
– Oui, mais des patrouilles vont passer une fois minuit sonné; on me trouvera dehors attendant, me cachant. C'est infâme! Tenez, Andrée, le sang me monte au visage et me suffoque.
– Oh! du courage, madame; vous si forte d'habitude, moi si faible tout à l'heure, et c'est moi qui vous soutiens!
– Il y a un complot là-dessous, Andrée, nous en sommes les victimes. Jamais cela n'est arrivé, jamais la porte n'a été fermée; j'en mourrai, Andrée, j'en meurs!
Et elle se renversa en arrière, comme si elle suffoquait effectivement.
Au même instant, sur ce pavé sec et blanc de Versailles, que si peu de pas foulent aujourd'hui, un pas retentit.
En même temps, une voix se fit entendre, voix légère et joyeuse, voix de jeune homme chantant.
Il chantait une de ces chansons maniérées qui appartiennent essentiellement à l'époque que nous essayons de peindre:
Pourquoi ne puis-je pas le croire?
Oh! que n'est-ce pas la vérité!
Ce que tous deux, dans l'ombre noire,
Cette nuit nous avons été.
Morphée, en fermant ma paupière,
Fit de moi l'acier le plus doux;
D'aimant vous étiez une pierre
Et vous m'entraîniez près de vous!
– Cette voix! s'écrièrent en même temps les deux femmes.
– Je la connais, dit l'aînée.
– C'est celle de…
Ce dieu, par un beau stratagème,
De cet aimant fit un écho.
continua la voix.
– C'est lui! dit à l'oreille d'Andrée, la dame dont l'inquiétude s'était si énergiquement manifestée; c'est lui, il nous sauvera.
En ce moment, un jeune homme, enseveli dans une grande redingote de fourrure, pénétra dans le petit vestibule, et, sans voir les deux femmes, heurta la porte en appelant:
– Laurent!
– Mon frère! dit l'aînée des deux femmes en touchant l'épaule du jeune homme.
– La reine! s'écria celui-ci en reculant d'un pas et en mettant le chapeau à la main.
– Chut! Bonsoir, mon frère.
– Bonsoir, madame; bonsoir ma sœur; vous n'êtes pas seule.
– Non, je suis avec Mlle Andrée de Taverney.
– Ah! fort bien. Bonsoir, mademoiselle.
– Monseigneur, murmura Andrée en s'inclinant.
– Vous sortez, mesdames? dit le jeune homme.
– Non pas.
– Vous rentrez, alors?
– Nous le voudrions bien, rentrer.
– Est-ce que vous n'avez pas appelé Laurent?
– Si fait.
– Alors?
– Alors, appelez un peu Laurent, à votre tour, et vous allez voir.
– Oui, oui, appelez, monseigneur, et vous verrez.
Le jeune homme, que l'on a sans doute reconnu pour le comte d'Artois, s'approcha à son tour, et de nouveau:
– Laurent! cria-t-il en frappant à la porte.
– Bon, voilà la plaisanterie qui va recommencer, dit la voix du Suisse; je vous préviens que si vous me tourmentez plus longtemps, je vais appeler mon officier.
– Qu'est-ce que cela? dit le jeune homme interdit en se retournant vers la reine.
– Un Suisse que l'on a substitué à Laurent, voilà tout.
– Et qui cela?
– Le roi.
– Le roi!
– Dame! lui-même nous l'a dit tout à l'heure.
– Et avec une consigne?..
– Féroce, à ce qu'il paraît.
– Diable! capitulons.
– Comment cela?
– Donnons de l'argent à ce drôle.
– Je lui en ai offert; il a refusé.
– Offrons-lui des galons.
– Je les lui ai offerts.
– Et?..
– Il n'a voulu entendre à rien.
– Il n'y a qu'un moyen, alors.
– Lequel?
– Je vais faire du bruit.
– Vous allez nous compromettre; non, mon cher Charles, je vous en supplie!
– Je ne vous compromettrai pas le moins du monde.
– Oh!
– Vous allez vous mettre à l'écart, je frapperai comme un sourd, je crierai comme un aveugle, on finira par m'ouvrir, et vous passerez derrière moi.
– Essayez.
Le jeune prince se mit de nouveau à appeler Laurent, puis à heurter, puis à faire un tel vacarme avec la poignée de son épée que le Suisse furieux lui cria:
– Ah! c'est comme cela. Eh bien! j'appelle mon officier.
– Eh!