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veaux dans l’année écoulée et nous proposa du lait. Nous ne pouvions pas en trouver de plus frais ! Il chercha un tabouret dans un coin de l’étroite grange dont la porte était la seule ouverture. Des toiles d’araignées enveloppaient les poutres, une fourche à fumier était apposée dans un coin, une pelle, un bâton. À un gros clou étaient suspendues, comme une grosse barbe, des ficelles de bottes de foin ouvertes, à côté se trouvait un manteau poussiéreux. Au sol était posée une gamelle dans laquelle il versait du lait pour ses chiens. Il s’assit entre les vaches, leur parla dans le dialecte local et se mit à traire la première, mamelle par mamelle, à la main, puis la deuxième, dans une cruche en plastique avec une anse sur le côté qu’il tenait de l’autre main. Comme il n’avait pas de récipient, nous allâmes chercher une bouteille de vin vide dans notre caravane. Il y versa le lait, au-dessus de la gamelle des chiens, dans laquelle coulaient le lait et la mousse qui débordaient. En grognant légèrement, les chiens se mirent à laper le lait sucré.

      Nous préparâmes notre muesli avec le lait. Il avait une odeur légèrement âpre. C’est pourquoi nous préférâmes d’abord le faire bouillir. Et il avait une couleur légèrement verte. Était-ce notre bouteille qui avait déteint ? Ou bien est-ce que ça venait de la nourriture des bêtes ? Lors de la traite suivante, nous l’observâmes plus minutieusement. Nous comprîmes alors pourquoi son lait avait un goût inhabituel : les mamelles et les pis étaient recouverts de fumier, certainement parce que les emplacements étaient prévus pour des vaches de taille plus petite. A cause de ça les bêtes étaient couchées, pour un tiers, dans la rigole à fumier. Après la traite, les pis, du moins les mamelles, étaient bien propres !

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      Lorsqu’il ne nous trouvait pas à la caravane, il montait à la maison, nous enfumait et nous regardait travailler. Que faisait-il lorsque nous n’étions pas là ? Bien sûr, il rôdait ! Un jour nous trouvions une trace de pas dans le ciment frais, un autre jour, un mégot dans la grange. Mais il ne manquait jamais rien. Pour se débarrasser de lui, il suffisait de lui mettre une pelle dans la main. Alors il se souvenait soudain qu’il devait encore aller à l’étable pour faire boire les vaches ! Il abreuvait les vaches l’une après l’autre parce que sinon celles-ci se battaient pour avoir le droit de boire en premier. Pendant que la première buvait de grandes gorgées, s’arrêtant parfois pour savourer, il retenait l’autre par la corde, jusqu’à ce que l’eau se remplisse de nouveau derrière le barrage. Alors, sur ordre de son maître, le chien poussait la vache sur le côté et l’autre pouvait s’approcher de l’abreuvoir.

      Entre-temps nous avions réfléchi par où commencer pour la rénovation de la maison. Nous pouvions temporairement oublier les terres, nous étions au mois de mars et la nature était encore en sommeil. Mais dans tous les cas la maison devait être habitable dans un mois. Doris avait dit qu’elle n’emménagerait qu'une fois qu’il y aurait une douche et des toilettes. Pour cela il nous fallait de l’eau. Au-dessus de la maison, une source jaillissait de la terre. Pas très fort, mais suffisamment si on construisait un bassin de rétention. Il y avait assez d’argile sur place, comme nous pouvions le constater au bord du canal creusé par l’eau. Nous avions suffisamment de tuyau d’arrosage avec nous. Nous formâmes alors un bassin dans l’argile dans lequel nous posâmes, environ 10 cm au-dessus du sol, le tuyau d’arrosage dont le bout était entouré d’une moustiquaire. Dans ces 10 cm, les particules qui flottaient dans l’eau pouvaient se déposer. Puis nous rehaussâmes le barrage. Sous le rebord supérieur de celui-ci, nous enterrâmes un morceau de gros tuyau qui servirait de trop-plein, afin que l’eau qui débordait ne puisse pas emporter la digue. Nous enfonçâmes un bouchon dans la partie basse du tuyau d’arrosage. Plus tard nous le remplaçâmes par un robinet. Le bassin se remplissait doucement. Nous redescendîmes à la maison, le début était fait !

       *

      À la maison il fallait tout refaire à neuf. Afin d’avancer rapidement, il valait mieux commencer par le haut. La face avant du toit, le côté sud, semblait avoir été couverte récemment (nous apprîmes plus tard que cela remontait à avant la guerre, c’est-à-dire à 40 ans plus tôt). On pouvait le voir à la couleur unie et sombre des ardoises, et à leur forme. Mais le côté arrière était en piteux état. Seules les bordures du toit étaient en ardoises noires, le reste en ardoises grises qui se réduisaient en poudre. Ce côté devrait être rénové dans les années à venir !

       Lors de la première visite j’avais déjà constaté des gouttières au grenier et par prévoyance je m’étais procuré des chutes de découpe, pour la plupart des bandes étroites, chez un zingueur. Car, s’agissant du côté talus, la réparation me semblait facile. Nous posâmes un matelas au-dessus du bord du toit, là où il formait un angle léger et ensuite nous y posâmes l’échelle. En partant de celle-ci, on pouvait faire glisser sur ses deux côtés ces lames de tôle, sans briser les ardoises. Parfois je pliais les angles supérieurs des lames pour les empêcher de glisser vers le bas. Ce faisant je constatais qu’un toit en ardoise était toujours fait de trois couches. Les trous des clous de la première rangée sont recouverts par la troisième rangée. Par chance nous trouvâmes plusieurs grandes ardoises posées contre le mur arrière, qui servirent à remplacer les quelques ardoises manquantes, surtout à la faitière. Nous les posâmes sur une arrête solide et avec une serpe, sorte de couteau, qui servait à couper des branches, nous leur donnâmes la taille voulue. Nous perçâmes les trous avec un marteau et un clou en acier. C’était plus facile que ce que nous avions imaginé ! Mais il fallait prévoir la façon dont l’ardoise se casserait. Ce qui, au moment de la coupe ou du perçage, se trouve en haut, devient le dessous au moment de la pose. Toutes ces opérations sont plus faciles à faire avec un marteau spécial pour les ardoises. Nous en achetâmes un plus tard au marché. Il faut cependant faire attention lors de l’achat, car il y a des marteaux pour droitiers et pour gauchers. Ce n’est pas une blague !

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      Les vieilles ardoises sont très fragiles. Quand elles sont mouillées, elles supportent encore moins de poids. On devrait alors travailler uniquement sur des toits secs, pour éviter de casser plus qu’on ne répare ! Les toits humides sont aussi très glissants à cause des algues et mousses qui y prolifèrent ! Par précaution nous fixâmes un petit coussin sous l’extrémité haute de l’échelle. Afin de ne pas abimer le toit, nous tournions l’échelle autour d’elle-même pour arriver à l’emplacement suivant. Ainsi l’échelle se trouvait sur un endroit déjà réparé et on pouvait réparer la bande où l’échelle se trouvait auparavant et la suivante de l’autre côté. Pour les travaux côté sud nous avions équipé le haut d’une échelle légère en aluminium de deux crochets rectangulaires. Nous la posâmes du côté nord, c’est-à-dire du côté talus par-dessus la faitière, parce que c’était plus facile. Les ardoises du côté nord dépassaient de la faitière de cinq centimètres à cause du vent et du mauvais temps. Pour ne pas abîmer ces ardoises, nous fixâmes un bout de bois enveloppé d’un bout de couverture sous l’échelle, non loin des crochets. Heureusement seules quelques ardoises avaient bougé à cause du vent et furent vite remises en place. Dans cette situation, l’utilisation d'un peu de mastic-colle peut faire des miracles ! Perché là-haut j’étais content d’avoir une ceinture de sécurité, dont la corde était fixée côté talus ! Le mieux aurait été un harnais avec auto blocage, pensai-je. Mais seul un Reinhold Messner pouvait se payer quelque chose d’aussi cher…

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       Étrangement, la face nord des toits se trouvait dans un plus mauvais état que la face sud. Sans doute était-ce dû à l’ensoleillement, qui faisait sécher un côté plus vite. Aussi sur la partie colline s’accumulaient des feuilles humides, le toit touchait la terre par endroits et le bois pourrissait par dessous.

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