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qu’il va subir mille observations plus ou moins ridicules dont il se propose bien de ne tenir aucun compte. En effet, l’acteur commande des rectifications, l’auteur résiste; la dispute s’échauffe; l’acteur tient bon et, dans son dépit, écrit au régisseur pour lui annoncer une indisposition subite; puis il fait sa toilette et court à la Bourse acheter fin de mois, sur le produit présumé de sa prochaine représentation à bénéfice. De la Bourse il vole vers la nouvelle propriété qu’il vient d’acquérir. A son retour, il tombe réellement malade en apprenant que la rente a baissé à Tortoni, et que sa doublure s’est fait vigoureusement applaudir dans son rôle, grâce aux trente hommes dont il a fait les frais. De dépit il va s’enterrer dans son petit ermitage, en ayant soin d’envoyer toucher à la caisse du théâtre ses émoluments et ses parts.

      L’ACTEUR DE PROVINCE.

      Il est six heures; le jour luit à peine, et déjà du fond d’une modeste alcôve retentit la voix d’Agamemnon, puis bientôt après celle de Scapin. «Chien de métier,» s’écrie en s’élançant hors de son lit un homme long et sec, «faire pleurer et rire alternativement, mourir et ressusciter régulièrement tous les soirs; et cela pour mille écus par an! chien de métier! allons du courage, une dernière répétition: Oui, c’est Agamemnon. Qui frappe?» Agamemnon pâlit et craint que ce ne soit quelque créancier matinal; vainement il cherche dans sa tête quelque tour de Scapin pour l’éconduire; on frappe encore, la porte s’ouvre d’elle-même! Dieu soit loué! c’est M. le Directeur.

      Il entre avec précipitation, comme un homme affairé, et, sans avoir songé seulement à donner le bonjour au roi des rois, il déploie un rôle nouveau avec une partition: «Vite à l’ouvrage, vous me voyez dans un embarras... Notre opéra est annoncé et attendu pour ce soir, et notre basse-taille ne s’avise-t-elle pas de faire une chute à se casser la jambe?—Eh bien!—Vous allez prendre son rôle.—Vous plaisantez, une partie de basse-taille pour un soprano! d’ailleurs je suis enrhumé.—Tant mieux, cela renforcera votre voix; au reste, il n’y a que deux morceaux d’ensemble. Du courage! à midi répétition, et ce soir gratification si la recette est bonne.

      Agamemnon-Scapin s’exécute de bonne grâce; la répétition arrive, il ne bronche presque pas, et, pour se donner plus de courage, il va chez le traiteur attendre l’heure de la représentation. Mais, fatale imprévoyance! sans doute il croyait déjà tenir la gratification, et quand vint le quart d’heure de Rabelais, il se souvint qu’elle n’était que promise; que faire? Le roi des rois n’a de crédit nulle part; Scapin vient à son secours: il envoie la carte à payer au théâtre, en priant le cher directeur de venir le dégager. La représentation a lieu; il est applaudi, sifflé, que lui importe! il n’a d’ambition et d’amour-propre que pour mille écus.

      COUP

      A la porte du couvent de Saint-Acheul, il y a, dit-on, un rémouleur qui n’est occupé qu’à aiguiser de petits couteaux.

      Lundi, 24 juillet 1826.

       RÉSUMÉ DE L’HISTOIRE DES PAPES

      On déclame beaucoup aujourd’hui contre les usurpations des jésuites et les envahissements du spirituel sur le temporel, et il n’en résulte que beaucoup de bruit sans que le pape et le clergé s’en inquiètent le moins du monde. Que redouter, en effet, d’allégations vagues et mal fondées? Ce sont les faits qui tuent, et non les mots.

      Aussi n’hésitons-nous pas à placer, en tête des ouvrages qui traitent cette matière, le Résumé de l’histoire des Papes. L’auteur donne rapidement, et en peu de mots, l’esquisse de la vie de chaque pontife. Peu de réflexions et beaucoup de détails, voilà comme il faut écrire l’histoire abrégée. Mais ce qui distingue surtout cet ouvrage, c’est un ton de gravité qui était commandé par le sujet, et que l’auteur n’abandonne jamais. C’est un mérite de plus, qu’au temps qui court on ne saurait trop apprécier.

      Le pape, dit Montesquieu, est une vieille idole qu’on encense par habitude; il aurait pu ajouter par faiblesse et par superstition. L’histoire offre-t-elle rien de plus déplorable que l’excommunication de l’empereur Henri IV, et n’y a-t-il pas quelque chose de révoltant dans la défection de ses sujets dès qu’il fut condamné par l’ambitieux Grégoire?

      Quoique la chaire de saint Pierre ait été souvent occupée par des hommes vraiment vertueux, on y a vu s’asseoir assez de pontifes indignes pour ne pas souhaiter de la voir dominer sur tous les trônes chrétiens. Et, d’ailleurs, où sont les titres de l’évêque de Rome à cette suprématie universelle qui ne soient mis au néant par chaque page de l’histoire?

      Il est assez singulier que, dans le nombre des successeurs de saint Pierre, une femme ait figuré, les uns disent pendant deux ans et demi, les autres disent pendant cinq mois. En 854, un prêtre, connu sous le nom de Jean d’Anglican, fut élu après la mort de Léon IV. Un jour que, revêtu des habits pontificaux, il se rendait processionnellement à Saint-Jean de Latran, il parut éprouver des douleurs très-vives que ses efforts pour les cacher augmentèrent encore. Enfin le pape accoucha, ou plutôt la papesse, car c’était une femme, entre le Colisée et Saint-Clément; elle mourut sur la place même. Un monument d’expiation y fut élevé et subsista jusqu’au pontificat de Pie V, qui le fit détruire. De là vint la coutume de faire asseoir le nouveau pape sur un siége creusé, de manière qu’un homme pouvait passer dessous et s’assurer du sexe. Aussitôt cette opération faite, on s’écriait: Papam virum habemus.

      COUPS DE LANCETTE.

      Monsieur de Montlosier a demandé au préfet de police la permission de porter une cuirasse sous ses habits.

      *

       * *

      On annonce un prochain changement de ministère.—Quel bonheur!... Mais ce n’est qu’en Angleterre.

      *

       * *

      Une Excellence, ayant entendu parler des conversions d’un révérend, répéta avec joie: «C’est donc un diable que cet homme-là?—Non, monsieur, c’est l’abbé G...»

      *

       * *

      Depuis que l’abbé G... a fait brûler Voltaire et Rousseau, on sait de quel bois les jésuites se chauffent.

      *

       * *

      Le général D... porte son épée comme un homme de cœur; cela ne dit pas qu’il soit brave.

      *

       * *

      Madame de G..., craignant de ne plus faire parler d’elle, après sa mort, vient de prier M. Auger de lui composer son épitaphe. La voici:

      Ci-gît, mère de cent enfants,

       Des comtesses la plus féconde;

       Elle a fait du bruit dans le monde,

       Elle y parla quatre-vingts ans.

      *

       * *

      Madame de Genlis ne croit pas aux jésuites, parce qu’elle n’en a pas connu avant la révolution.

      *

       * *

      C’était, avant-hier, la fête de Montrouge; MM. les jésuites se sont livrés à leur gaieté naturelle. Après un repas délicat, toute la confrérie a entonné en chœur ce doux refrain:

      Il faut leur percer le flanc,

       Plan, plan, rataplan, etc., etc.

      Montrouge, dont Figaro parle à chaque instant, et que le Courrier français appelait «l’antre du fanatisme,» est la petite commune aux portes de Paris où les jésuites avaient fondé une maison mère. A Montrouge se tenait le conseil supérieur, dont les instructions et les commandements volaient avec une inconcevable rapidité d’un bout de la France à l’autre. «Les télégraphes jésuitiques de Montrouge, dit un journal, l’emportent sur les signaux du gouvernement.»

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