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par leur nature, elles sont beaucoup plus dignes d'attention qu'aucune de celles qui ont été lancées sur le même sujet. Les déductions des prémisses sont philosophiques et subtiles; mais ces prémisses, en deux points au moins, sont basées sur une observation imparfaite.
Le Commercial veut faire entendre que Marie a été prise par une bande de vils coquins non loin de la porte de la maison de sa mère. «Il est impossible,—dit-il,—qu'une jeune femme connue, comme était Marie, de plusieurs milliers de personnes, ait pu passer trois bornes sans rencontrer quelqu'un à qui son visage fût familier.» C'est là l'idée d'un homme résidant depuis longtemps dans Paris,—d'un homme public,—dont les allées et les venues dans la ville ont été presque toujours limitées au voisinage des administrations publiques. Il sait que
lui, il va rarement à une douzaine de bornes au delà de son propre bureau sans être reconnu et accosté. Et mesurant l'étendue de la connaissance qu'il a des autres et que les autres ont de lui-même, il compare sa notoriété avec celle de la parfumeuse, ne trouve pas grande différence entre les deux, et arrive tout de suite à cette conclusion qu'elle devait être, dans ses courses, aussi exposée à être reconnue que lui dans les siennes. Cette conclusion ne pourrait être légitime que si ses courses, à elle, avaient été de la même nature invariable et méthodique, et confinées dans la même espèce de région que ses courses, à lui. Il va et vient, à des intervalles réguliers, dans une périphérie bornée, remplie d'individus que leurs occupations, analogues aux siennes, poussent naturellement à s'intéresser à lui et à observer sa personne. Mais les courses de Marie peuvent être, en général, supposées d'une nature vagabonde. Dans le cas particulier qui nous occupe, on doit considérer comme très-probable qu'elle a suivi une ligne s'écartant plus qu'à l'ordinaire de ses chemins accoutumés. Le parallèle que nous avons supposé exister dans l'esprit du
Commercial ne serait soutenable que dans le cas des deux individus traversant toute la ville. Dans ce cas, s'il est accordé que les relations personnelles soient égales, les chances aussi seront égales pour qu'ils rencontrent un nombre égal de connaissances. Pour ma part, je tiens qu'il est, non-seulement possible, mais infiniment probable que Marie a suivi, à n'importe quelle heure, une quelconque des nombreuses routes conduisant de sa résidence à celle de sa tante, sans rencontrer un seul individu qu'elle connût ou de qui elle fût connue. Pour bien juger cette question, pour la juger dans son vrai jour, il nous faut bien penser à l'immense disproportion qui existe entre les connaissances personnelles de l'individu le plus répandu de Paris et la population de Paris tout entière.