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princes dont les familles ont régné sur la France.» De même, j'ai l'habitude d'appeler grands les rois qui l'ont agrandie.

      Le règne de Louis XI nous a donné le Maine, l'Anjou, la Bourgogne et la Provence!

      Ce grand prince donc, n'y allait pas de main morte; aussi les mauvaises langues de son temps, et même du nôtre, lui reprochent, à tort ou à raison (adhuc sub judice lis est), d'avoir fait pendre haut et court, sans autre forme de procès, ceux qu'il soupçonnait de tramer complots contre l'État et contre lui surtout.

      Ce fait paraît certain, cependant, non seulement par les peintures un peu chargées de Walter Scott, dans Quantin Durward (à qui dirait-on la vérité si ce n'est à ses amis!) mais par l'ensemble des traditions historiques qui prouvent qu'il gouvernait plus par la crainte que par tout autre moyen; que, fils sans cœur, il fut aussi roi sans pitié, et que s'il abaissait les grands, il ne ménageait pas les petits; car il accablait, dit-on, le peuple d'impôts, beaucoup moins qu'aujourd'hui cependant.

      Bien des gens sont portés, non pas à l'absoudre, mais à lui pardonner un peu, à cause de son amour pour le principe d'autorité, dont le besoin se fait plus que jamais sentir; il est bien entendu que je parle de celle qui mérite ce nom.

      Si l'on n'avait pas alors la liberté de la tribune et de la presse, il paraît que les moines ne se gênaient guère pour dire dans leurs sermons ce qu'ils pensaient de sa justice sommaire, de son prévôt Tristan et de ses exécuteurs, qui supprimaient la prison préventive autrement que voulait le faire Napoléon III, quand il envoyait en Angleterre M. Valentin-Smith, pour étudier cette question.

      Le roi ayant appris que le cordelier Maillard s'était permis de l'attaquer indirectement en chaire, il l'envoya prévenir que s'il recommençait, il le ferait jeter à la rivière.

      Sans s'intimider, le disciple de Saint-François répondit à l'envoyé: «Va dire à ton maître que je ne crains rien; malgré la protection de Notre-Dame d'Embrun, dont il porte la médaille à son bonnet, je suis plus sûr d'arriver au paradis par la voie d'eau, que lui avec tous ses chevaux de poste.»

      Louis XI se le tint pour dit, eut le bon esprit d'en rire, et laissa les moines tranquilles.

      De notre temps, on s'empresserait de laïciser le couvent, après un siège en règle en cas de résistance; puis quelque agence interlope de Limoges et de Tours proposerait aux Cordeliers de changer leur corde contre le cordon de la Légion d'honneur, moyennant finances bien entendu.

      C'est deux cents ans plus tard, sous Louis XIV, en 1664, que le marquis de Crénan, chargé de ce service, fit construire les premières chaises roulantes dans lesquelles il fut défendu, par arrêt de 1680, de courre la poste à deux personnes dans la même chaise.

      L'invention se perfectionna plus tard. À la fin du siècle dernier la chaise de poste à deux roues pouvait contenir deux personnes et même trois. Le public fut autorisé à faire traîner ses voitures par les chevaux du roi.

      En même temps, les lettres n'étaient plus transportées dans la sacoche ou le porte-manteau d'un courrier à cheval; on les mettait dans une malle chargée sur les voitures du gouvernement, qui partaient régulièrement et à heure fixe dans les principales directions.

      C'est de là qu'est venu le nom de Malle de poste donné à l'ensemble du système qui sert au transport de la correspondance.

      S'il n'y a plus aujourd'hui de malles de poste proprement dites, on appelle encore malle des Indes, le train rapide qui porte les dépêches d'Angleterre aux Indes, ainsi que les navires à vapeur qui se trouvent sur leur parcours.

      La première malle de poste que j'ai vue, consistait en un briska, voiture à quatre roues, d'origine russe, ne contenant que deux places: une pour le courrier, responsable des dépêches et l'autre pour un voyageur payant sa place.

      Plus tard, de 1825 à 1850, sur les principales directions, le briska fut remplacé par un grand et confortable coupé à trois places; un quatrième voyageur pouvait encore se placer dans le cabriolet de devant avec le courrier; ce qui l'obligeait à l'aider dans la distribution sur la route des paquets de correspondance, et à supporter pendant tout le voyage l'odeur de la marée dont ces agents faisaient un petit commerce à leur profit, toléré dans l'intérêt de quelques gourmets de province; car les turbots, les soles et les homards n'avaient aucun autre moyen rapide d'arriver sur les tables de l'intérieur de la France.

      Le service des malles étant régulier et obligatoire, les chevaux étaient toujours prêts et choisis; elles allaient donc plus vite que les chaises particulières.

      Dans toutes les plus petites villes, et souvent dans des hameaux situés sur les routes impériales, royales ou nationales suivant le temps, il y avait des maîtres de poste; ils n'étaient pas fonctionnaires publics, mais souvent ils étaient subventionnés par l'État et jouissaient de certains privilèges; en compensation, ils étaient obligés d'entretenir un certain nombre de chevaux déterminé par l'importance de la circulation et au moins une voiture légère, qui devaient toujours être à la disposition du public, d'un relai à l'autre dans les deux sens.

      Quand arrivés au relai, les chevaux n'avaient pas la chance de trouver une voiture de retour, ils revenaient haut le pied à leur résidence.

      Lorsque deux chaises marchant en sens inverse se rencontraient vers le milieu d'un relai, on faisait un échange de chevaux et de postillons.

      Le tarif de la poste était fixé par cheval et par postillon pour la distance d'une poste, qui correspondait à deux lieues soit 8 kilomètres. Les relais étaient espacés de 16 à 20 kilomètres, soit deux postes à deux postes et demie.

      Tous ceux qui voyageaient de cette manière avaient chez eux le livre de poste, comme nous avons le livret Chaix. Le livre de poste était bien moins répandu; car de tous les livres de notre littérature moderne et même de l'ancienne, le livret Chaix est certainement celui qui, chaque année, a le plus fort tirage; beaucoup de gens ne lisent pas d'autre livre que celui-là!

      Dans le livre de poste, on trouvait toutes les routes de France, avec l'indication des relais et des prix, dans les circonstances diverses qui pouvaient se présenter. Il en était de même dans tous les pays d'Europe, où le service de la poste aux chevaux était établi.

      Une chaise de poste était une espèce de cabriolet à deux grandes roues, avec de forts brancards, dont la caisse était très bien suspendue et qui demandait deux chevaux.

      Le cheval placé entre les brancards ou limons, se nommait le limonier, l'autre sur lequel montait le postillon, se plaçait à gauche et se nommait le porteur; on l'attelait avec un palonnier. Tous les harnais étaient à bricole.

      Le cheval de droite portait aussi le nom de sous-verge, parce qu'il se trouvait sous le fouet (ou verge), placé dans la main droite du postillon.

      Il y a encore de vieux cochers, qui distinguent les deux chevaux d'une voiture à timon, par les noms de porteur et sous-verge.

      Les anciennes traditions ont quelquefois la vie si dure, qu'après plusieurs siècles il y a des mariniers qui distinguent encore les rives du Rhône et de la Saône, par ces dénominations: côté de l'Empire, rive gauche; côté du Royaume, rive droite. Autre exemple:

      À Rome, le Ier janvier 1888, les Italiens qui se pressaient pour assister dans l'église de Saint-Pierre, à la messe jubilaire du pape Léon XIII, pour exprimer leur impatience, criaient encore: per Bacco! (par Bacchus.)

      Les voitures à quatre roues exigeaient un plus grand nombre de chevaux; quatre chevaux obligeaient à deux postillons.

      Le nombre de personnes dans une voiture, au-dessus de deux, influait sur le nombre de chevaux obligatoires.

      Le prix était I fr. 50 par poste et par cheval, et 75 centimes par postillon. On pouvait quelquefois éviter les chevaux supplémentaires en les payant I franc par poste, bien qu'on ne les mît pas.

      C'est ce qui faisait dire à Balzac, dans un de ses romans, à propos d'une

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