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d'un travail absolument étranger à l'art grec. La planche III présente la plaque de bronze qui ornait la têtière du cheval et qui montre Athéné en buste, et la figure 15, ci-dessous, l'une des plaques pendantes du collier d'or de poitrail. Il n'est pas besoin d'insister. Évidemment, ces deux objets, appartenant, à un même harnais et, par conséquent, de la même époque, qui datent (si l'on s'en rapporte au style de la plaque) du IIIe siècle avant l'ère chrétienne, sont dus à des fabrications et à des écoles d'art absolument étrangères l'une à l'autre. Si les objets de bronze ont été fournis par la Grèce, les objets d'or proviennent d'un art local et cet art local est tout asiatique.

Fig. 15.

      Fig. 15.

Fig. 7.

      Ce dragon qui dévore une panthère est une composition asiatique et l'exécution de l'ornementation, les formes sèches et enchevêtrées, le style décoratif enfin, nous reportent au centre de l'Asie.

      Les Grecs ont dédaigné cet art tant qu'ils ont maintenu les traditions de leur belle époque, mais à la fin de l'empire romain il n'en est plus de même; redevenus plus asiatiques qu'occidentaux, ils s'emparent de ces éléments, se les assimilent, les mélangent avec les arts de la Perse et constituent cette ornementation byzantine qui eut une si grande influence pendant le XIe et le XIIe siècle dans tout l'Occident.

      Des objets découverts sous d'autres tumuli de la même contrée présentent encore un caractère différent.

      Dans l'un des tumuli appelés «Grosses tombes», sur la route d'Ekatérinoslav à Nicopol, en 1860, M. Zabeline trouva quantité d'objets, provenant de harnais de chars, en argent, et entre autres deux flancs de têtière de cheval (fig. 16), représentant un entrelacs de deux serpents à têtes de cheval et affectant un caractère particulier se rapprochant singulièrement des influences mongoles[29].

Fig. 16.

      Fig. 16.

      Cette partie méridionale de la Scythie ou Scythie grecque semble donc avoir été occupée par trois races différentes, ou du moins avoir été soumise à des influences d'art provenant de trois sources différentes: source iranienne ou arienne à laquelle il faut attribuer les objets (fig. 12, 14, pl. II B et fig. 15); source grecque, à laquelle appartiennent incontestablement les objets (pl. II A et pl. III); source mongole, qu'indiquent l'objet (fig. 16) et plusieurs autres de même provenance.

      Ceci ne s'accorderait pas parfaitement avec la version d'Hérodote, qui prétend que les Scythes repoussaient toute influence étrangère, mais se trouve confirmé par la découverte dans ces diverses nécropoles de crânes humains qui, évidemment, appartiennent les uns aux races iranienne ou cimmérienne, et d'autres à la race mongole. D'ailleurs, la loi scythe qui punissait de mort tout individu ayant adopté des usages étrangers ou ayant frayé avec des étrangers, n'est-elle pas précisément une marque de ces habitudes? car on n'établit jamais une loi que quand on reconnaît la nécessité de l'édicter par la fréquence et le danger d'un délit.

      Si, sur le territoire méridional actuel de la Russie, on signale ces divers éléments d'art assez étrangers les uns aux autres; au Nord, les populations finnoises occupaient d'immenses territoires et n'étaient pas absolument dépourvues de toute idée d'art, comme certains auteurs l'ont prétendu.

      Il reste de ces monuments finnois primitifs des débris et, mieux que cela, des traditions tellement vivaces et caractérisées qu'on est forcément entraîné à les rattacher à un art fort ancien.

      Tels sont, par exemple, ces dessins de broderies dont on ne saurait déterminer la date exacte (fig. 17), mais dont la tradition remonte à une haute antiquité. Ce ne sont que des linéaments géométriques qu'il ne faut pas confondre avec d'autres combinaisons également anciennes, appartenant à d'autres races[30].

Fig. 17.

      Fig. 17.

      Dans ces ornements géométriques finnois que nous donnons ici, les méandres, par exemple, n'apparaissent pas, tandis qu'on les rencontre à l'origine de toutes les ornementations appartenant à l'extrême Orient central.

      Il n'est pas plus difficile de concevoir l'ornement A, de la figure 17, qu'il n'en coûte de composer les ornements géométriques de la figure 18, et dans ces broderies russes, dont il existe de si curieuses collections (voir les Musées de la Société géographique et de l'Académie des sciences de Russie), on rencontre très-rarement ces méandres, si fréquents dans l'ornementation de l'extrême Orient et notamment sur les monuments les plus anciens de l'Inde et de la Chine.

Fig. 18.

      Fig. 18.

      L'Iran n'est pas sans avoir également adopté le méandre dans son ornementation, non sur les monuments les plus anciens connus qui n'en présentent pas de traces, mais sous l'influence des civilisations grecques de l'Ionie et à l'époque des Arsacides.

      Les arts égyptiens anciens n'en montrent pas davantage. En un mot, la combinaison géométrique de l'ornement connu sous le nom de méandre n'appartient ni aux Iraniens, ni à la race sémitique, tandis qu'elle apparaît, soit dans l'extrême Orient, soit chez les peuplades grecques.

      Quoique rare dans la composition des broderies russes, le méandre se fait voir cependant et nous paraît dû à une influence slave (fig. 19).

Fig.

      Ces dessins sont brodés en coton rouge, sans envers, sur une toile[31]. Quant à l'harmonie des tons de ces étoffes populaires brodées, elle mérite d'être signalée.

Fig. 19.

      Fig. 19.

      Cette harmonie se rapproche parfois absolument des harmonies asiatiques de la Perse (pl. IV)[32]; d'autres se rapprochent des tonalités mongoles dures et heurtées.

      Mais, dans la composition des dessins de ces tissus, les figures géométriques ne dominent pas seules. Les fleurs, la figure humaine, les animaux entrent dans la décoration et se rapprochent intimement des compositions iraniennes anciennes; souvent ces figures sont affrontées, adossées ou juxtaposées, ayant entre elles un arbre ou un vase. On sait combien ce motif a été reproduit dans les étoffes et même dans la sculpture de la Perse; on sait également qu'on en trouve l'origine dans le culte de Mithra.

      Dans un récit du Boun-dehesch[33], il est dit comment Meschia naquit mâle et femelle d'un arbre produit par la portion de la semence de Kaïomorts qui avait été confiée à la terre, et comment le corps androgyne de Meschia se divisa en deux corps: l'un mâle qui retint le nom de Meschia[34], l'autre femelle qui s'appela Meschiané[35]. Voici la traduction de ce passage d'après Anquetil:

      «Il est dit dans la loi[36], au sujet des hommes, que Kaïomorts[37] ayant rendu de la semence en mourant, cette semence fut purifiée par la lumière du soleil, que Nério-Sengh[38] en garda deux portions et que Sapandomad[39] eut soin de la troisième. Au bout de quarante ans, le corps d'un Reivas, formant une colonne (un arbre) de quinze ans avec quinze feuilles, sortit de terre, le jour de Mithra du mois de Mithra. Cet arbre représentait deux corps disposés de manière que l'un avait la main dans l'oreille de l'autre, lui était uni, lié, faisant même un tout avec lui.... Ils étaient si bien unis tous les deux l'un à l'autre, qu'on ne voyait pas qui était le mâle, quelle était

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