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Le tour de la France par deux enfants. G. Krioussis Bruno
Читать онлайн.Название Le tour de la France par deux enfants
Год выпуска 0
isbn 4064066075149
Автор произведения G. Krioussis Bruno
Жанр Книги о Путешествиях
Издательство Bookwire
Le cœur ému, songeant qu'ils étaient enfin sur le sol de la France et que le vœu de leur père était accompli, ils s'agenouillèrent pieusement sur cette terre de la patrie qu'ils venaient de conquérir par leur courage et leur volonté persévérante; ils élevèrent leur âme vers le ciel, et tout bas remerciant Dieu, ils murmurèrent:
—France aimée, nous sommes tes fils, et nous voulons toute notre vie rester dignes de toi!
Lorsque le soleil parut, empourprant les cimes des Vosges, ils étaient déjà loin de la frontière, hors de tout danger; et se tenant toujours par la main ils marchaient joyeusement sur une route française, marquant le pas comme de jeunes conscrits.
XII.—L'ordre dans les vêtements et la propreté.—L'hospitalité de la fermière lorraine.
Voulez-vous qu'au premier coup d'œil on pense du bien de vous? Soyez propres et décents, les plus pauvres peuvent toujours l'être.
Après plusieurs temps de repos suivis de marches courageuses, les deux enfants aperçurent enfin vers midi la petite pointe du clocher de Celles. Fritz leur avait laissé un mot de recommandation pour la veuve d'un cultivateur de ce village, et ils se réjouissaient d'arriver. Mais, avant de se présenter au village, André se souvint des conseils que Mme Étienne leur avait donnés.
«Mes enfants, leur avait-elle dit, partout où vous allez passer, personne ne vous connaîtra; ayez donc bien soin de vous tenir propres et décents, afin qu'on ne puisse vous prendre pour des mendiants ou des vagabonds. Si pauvre que l'on soit, on peut toujours être propre. L'eau ne manque pas en France, et rien n'excuse la malpropreté.»
—Julien, dit André à son frère, n'oublions pas les conseils de la bonne mère Étienne; mettons-nous bien propres avant de nous présenter chez les amis du garde.
—Oui, dit l'enfant, courons au bord de cette jolie rivière qui coule près de la route; nous nous laverons le visage et les mains.
—Ensuite, répondit André, je brosserai tes habits avec mon mouchoir, nous rangerons bien nos cheveux, nous frotterons nos souliers avec de l'herbe pour les nettoyer, et comme cela nous n'aurons pas l'air de deux vagabonds.
Aussitôt dit, aussitôt fait. En un clin d'œil ils eurent réparé le désordre causé par une nuit et une demi-journée de voyage dans les bois à travers la montagne.
Oies de Lorraine.—C'est une des races les plus répandues dans le nord et l'est de la France. Elles sont petites, mais robustes. Les oies de la plus haute taille se trouvent dans le Languedoc. Les oies aiment la propreté. Si elles ont de l'eau pour se baigner et une litière fréquemment renouvelée, elles rapportent davantage et dédommagent la fermière des soins qu'on leur donne.
Lorsqu'ils eurent fini leur toilette, André jeta un dernier coup d'œil sur son jeune frère, et il fut tout fier de voir la bonne mine de Julien, son air bien élevé et raisonnable.
Tous les deux alors se présentèrent dans le village et cherchèrent la maison de la veuve dont ils avaient l'adresse. On leur indiqua une ferme située à l'extrémité du village. En entrant dans la cour, ils virent un grand troupeau de belles oies lorraines, qui se réveillèrent en sursaut au bruit de leurs pas et les saluèrent de leurs cris. Ils s'avancèrent vers la porte de la maison, suivis du troupeau et accompagnés d'un bruyant tapage.
La fermière vint sur le pas de sa porte et regarda les enfants qui s'approchaient d'elle, chapeau à la main.
Dès le premier coup d'œil la ménagère, femme d'ordre et de soin, fut bien prévenue en faveur des enfants qu'elle voyait si propres et si soigneux de leur personne. Aussi, lorsqu'elle eut lu le billet de Fritz, elle fut tout à fait gagnée à leur cause.
«Quoi! pensa-t-elle, ces enfants ont fait seuls et la nuit une route si longue dans la montagne! Voilà de jeunes cœurs bien courageux et dignes qu'on leur vienne en aide.»
Elle les accueillit aussitôt avec empressement, et comme on se mettait à table, elle les plaça auprès d'elle.
Le dîner était frugal, mais l'accueil de la ménagère était si cordial et nos jeunes voyageurs si fatigués, qu'ils mangèrent du meilleur appétit la soupe aux choux et la salade de pommes de terre.
XIII.—L'empressement à rendre service pour service.—La pêche.
Vous a-t-on rendu un service, cherchez tout de suite ce que vous pourriez faire pour obliger à votre tour celui qui vous a obligé.
Tout en mangeant, André observait que la maison avait l'air fort pauvre. Sans la grande propreté qui faisait tout reluire autour d'eux, on eût deviné la misère.
Après le dîner, chacun des membres de la famille se leva bien vite pour retourner à son travail, les jeunes enfants vers l'école, les aînés aux champs.
Quoique André fût tout à fait las, il proposa ses services et ceux de Julien avec empressement, car il aurait bien voulu dédommager son hôtesse de l'hospitalité qu'elle leur offrait; mais la fermière n'y voulut jamais consentir.
—Reposez-vous, mes enfants, disait-elle; sinon vous me fâcherez.
Pendant que le débat avait lieu, le petit Julien n'en perdait pas un mot; il devinait le sentiment d'André, et lui aussi aurait voulu être le moins possible à la charge de la fermière.
Tout à coup l'enfant avisa deux lignes pendues à la muraille:—Oh! dit-il, regarde, André, quelles belles lignes! Il faut nous reposer en pêchant. N'est-ce pas, madame, vous voulez bien nous permettre de pêcher? Nous serions si contents si nous pouvions rapporter de quoi faire une bonne friture!
—Allons, mon enfant, dit la veuve, je le veux bien. Tenez, voici les lignes.
Un quart d'heure après, les deux enfants, munis d'appâts, se dirigeaient vers la rivière avec leurs lignes et un petit panier pour mettre le poisson si l'on en prenait.
Les principaux poissons d'eau douce.—La truite de montagne est une petite espèce de poisson, aux taches noires, rouges et argentées, à la chair délicate, qui vit dans les eaux froides des montagnes, dans les torrents et les lacs presque glacés.—La carpe devient très grosse en vieillissant; on trouve des carpes qui ont plus d'un mètre de long. Sa chair est assez estimée, mais pleine d'arêtes.—Le brochet est un poisson vorace qu'on a surnommé le requin des rivières et qui avale toute espèce de proie. On en trouve dans certains fleuves qui atteignent 2 mètres de longueur et pèsent jusqu'à 20 kilogr.
André était bon pêcheur; plus d'une fois, le dimanche, il avait en quelques heures pourvu au dîner du soir. Julien était moins habile, mais il faisait ce qu'il pouvait. On s'assit plein d'espoir à l'ombre des saules, dans une belle prairie comme il y en a beaucoup en Lorraine.
Cependant carpes et brochets n'arrivaient guère, et Julien sentait le sommeil le prendre à rester ainsi immobile, la ligne à la main, après une nuit de marche et de fatigue. Il ne tarda pas à se lever.
—André, dit-il, j'ai peur, si je reste assis sans rien dire, de m'endormir comme un paresseux qui n'est bon à rien; je ne veux pas parler pour ne pas effrayer le poisson, mais je vais prendre mon couteau et aller chercher de la salade: cela me réveillera.
Pendant