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       LX

       FIN

      PAR

      HECTOR MALOT

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      M. Hector Malot qui a fait paraître, le 20 mai 1859, son premier roman «LES AMANTS», va donner en octobre prochain son soixantième volume «COMPLICES»; le moment est donc venu de réunir cette oeuvre considérable en une collection complète, qui par son format, les soins de son tirage, le choix de son papier, puisse prendre place dans une bibliothèque, et par son prix modique soit accessible à toutes les bourses, même les petites.

       Pendant cette période de plus de trente années, Hector Malot a touché à toutes les questions de son temps; sans se limiter à l'avance dans un certain nombre de sujets ou de tableaux qui l'auraient borné, il a promené le miroir du romancier sur tout ce qui mérite d'être étudié, allant des petits aux grands, des heureux aux misérables, de Paris à la Province, de la France à l'Étranger, traversant tous les mondes, celui de la politique, du clergé, de l'armée, de la magistrature, de l'art, de la science, de l'industrie, méritant que le poète Théodore de Banville écrivît de lui «que ceux qui voudraient reconstituer l'histoire intime de notre époque devraient l'étudier dans son oeuvre».

       Il nous a paru utile que cette oeuvre étendue, qui va du plus dramatique au plus aimable, tantôt douce ou tendre, tantôt passionnée ou justiciaire, mais toujours forte, toujours sincère, soit expliquée, et qu'il lui soit même ajouté une clé quand il en est besoin. C'est pourquoi nous avons demandé à l'auteur d'écrire sur chaque roman une notice que nous placerons à la fin du volume. Quand il ne prendra pas la parole lui-même, nous remplacerons cette notice par un article critique sur le roman publié au moment où il a paru, et qui nous paraîtra caractériser le mieux le livre ou l'auteur.

       Jusqu'à l'achèvement de cette collection, un volume sera mis en vente tous les mois.

      L'éditeur,

      E.F.

       MARTORY

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      Quand on a passé six années en Algérie à courir après les Arabes, les Kabyles et les Marocains, on éprouve une véritable béatitude à se retrouver au milieu du monde civilisé.

      C'est ce qui m'est arrivé en débarquant à Marseille. Parti de France en juin 1845, je revenais en juillet 1851. Il y avait donc six années que j'étais absent; et ces années-là, prises de vingt-trois à vingt-neuf ans, peuvent, il me semble, compter double. Je ne mets pas en doute la légende des anachorètes, mais je me figure que ces sages avaient dépassé la trentaine, quand ils allaient chercher la solitude dans les déserts de la Thébaïde. S'il est un âge où l'on éprouve le besoin de s'ensevelir dans la continuelle admiration des oeuvres divines, il en est un aussi où l'on préfère les distractions du monde aux pratiques de la pénitence. Je suis précisément dans celui-là.

      A peine à terre je courus à la Cannebière. Il soufflait un mistral à décorner les boeufs, et des nuages de poussière passaient en tourbillons pour aller se perdre dans le vieux port. Je ne m'en assis pas moins devant un café et je restai plus de trois heures accoudé sur ma table, regardant, avec la joie du prisonnier échappé de sa cage, le mouvement des passants qui défilaient devant mes yeux émerveillés. Le va-et-vient des voitures très-intéressant; l'accent provençal harmonieux et doux; les femmes, oh! toutes ravissantes; plus de visages voilés; des pieds chaussés de bottines souples, des mains finement gantées, des chignons, c'était charmant.

      Je ne connais pas de sentiment plus misérable que l'injustice, et j'aurais vraiment honte d'oublier ce que je dois à l'Algérie; ma croix d'abord et mon grade de capitaine, puis l'expérience de la guerre avec les émotions de la poursuite et de la bataille.

      Mais enfin tout n'est pas dit quand on est capitaine de chasseurs et décoré, et l'on n'a pas épuisé toutes les émotions de la vie quand on a eu le plaisir d'échanger quelques beaux coups de sabre avec les Arabes. Oui, les nuits lumineuses du désert sont admirables. Oui, le rapport est intéressant... quelquefois. Mais il y a encore autre chose au monde.

      Si comme toi, cher ami, j'avais le culte de la science; si comme toi je m'étais juré de mener à bonne fin la triangulation de l'Algérie; si comme toi j'avais parcouru pendant plusieurs années l'Atlas dans l'espérance d'apercevoir les montagnes de l'Espagne, afin de reprendre et d'achever ainsi les travaux de Biot et d'Arago sur la mesure du méridien, sans doute je serais désolé d'abandonner l'Afrique.

      Quand on a un pareil but il n'y a plus de solitude, plus de déserts, on marche porté par son idée et perdu en elle. Qu'importe que les villages qu'on traverse soient habités par des guenons ou par des nymphes, ce n'est ni des nymphes ni des guenons qu'on a souci. Est-ce que dans notre expédition de Sidi-Brahim tu avais d'autre préoccupation que de savoir si l'atmosphère serait assez pure pour te permettre de reconnaître la sierra de Grenade? Et cependant je crois que nous n'avons jamais été en plus sérieux danger. Mais tu ne pensais ni au danger, ni à la faim, ni à la soif, ni au chaud; et quand nous nous demandions avec une certaine inquiétude si nous reverrions jamais Oran, tu te demandais, toi, si la brume se dissiperait.

      Malheureusement, tous les officiers de l'armée française, même ceux de l'état-major, n'ont pas cette passion de la science, et au risque de t'indigner j'avoue que j'ignore absolument les entraînements et les délices de la triangulation; la mesure elle-même du méridien me laisse froid; et j'aurais pu, en restant deux jours de plus en Afrique, prolonger l'arc français jusqu'au grand désert que cela ne m'eût pas retenu.

      —Cela est inepte, vas-tu dire, grossier et stupide.

      —Je ne m'en défends pas, mais que veux-tu, je suis ainsi.

      —Qu'es-tu alors? une exception, un monstre?

      —J'espère que non.

      —Si la guerre ne te suffit pas, si la science ne t'occupe pas, que te faut-il?

      —Peu de chose.

      —Mais encore?

      La réponse à cet interrogatoire serait difficile à risquer en tête-à-tête, et me causerait un certain embarras, peut-être même me ferait-elle rougir, mais la plume en main est comme le sabre, elle donne du courage aux timides.

      —Je suis... je suis un animal sentimental.

      Voilà le grand mot lâché, à lui seul il explique pourquoi j'ai été si heureux de quitter l'Afrique et de revenir en France.

      De là, il ne faut pas conclure que je vais me marier et que j'ai déjà fait choix d'une femme, dont le portrait va suivre.

      Ce serait aller beaucoup trop vite et beaucoup trop loin. Jusqu'à

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