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Vous avez indiqué le perron en perspective, comme font les Chinois; mais c’est un détail. En quoi bâtirez-vous vos murs? Est-ce en pierre de taille, en moellons, en pierre et moellons ou en pierre et briques?

      «Étudions cela ensemble. Lorsque l’on compose un plan par-terre ou horizontal, indépendamment des distributions, la chose dont il faut se préoccuper, c’est de savoir comment on couvrira les bâtiments. Car ce qui importe le plus dans une construction, c’est le moyen de la couvrir, puisque toute construction destinée à un usage intérieur est un abri. Cela est indiscutable, n’est-ce pas? Eh bien, dans votre bâtisse, dont les plans sont maintenant sous vos yeux, que voyez-vous dans la masse du corps principal? Deux parallélogrammes qui se coupent ainsi (fig. 3). Un premier parallélogramme a b c d, coupé par un second parallélogramme e f g h. Nous laissons de côté les bretêches et les escaliers. Donc si nous montons des pignons sur les murs a c, b d, dont les rampants seront égaux à la ligne a c, nous aurons deux triangles équilatéraux dont les bases seront a c et b d, et les pentes à 60°, ce qui est la pente la plus convenable pour de l’ardoise, en ce que la neige ne s’y arrête pas et que cette pente ne donne pas de prise au vent. Si, de même, sur les murs e f, g h, nous élevons deux pignons ayant une pente semblable, ces murs étant moins longs que ne sont ceux a c, b d, les triangles seront plus petits et leur sommet n’atteindra pas la hauteur des premiers. Alors le comble élevé sur le plus petit parallélogramme pénétrera celui élevé sur le grand et formera par ces pénétrations des angles rentrants que nous appelons noues; je trace ces noues en i k, k l, m n, m o. Car les pentes des deux combles étant égales, en projection horizontale, ces noues partageront l’angle droit en deux angles égaux; vous savez assez de géométrie pour comprendre cela.

      Fig. 3.Fig. 3

      «Voilà donc la manière la plus simple de couvrir notre bâtiment; or, en fait de couvertures, les plus simples sont les meilleures. Maintenant pour que nos deux escaliers permettent de pénétrer sous ces combles, il faut que leur cage, autrement dit leur enveloppe de maçonnerie, s’élève au-dessus de la corniche du bâtiment et fournisse un étage supplémentaire, pour eux seuls. Donc nous élèverons ces cages et nous établirons pour elles des combles spéciaux. L’un, celui du grand escalier, sera en pyramide à base quadrangulaire, et l’autre, celui du petit, sera conique.

      «Rien ne nous empêche d’élever sur les deux murs q z, s t, des loges ou bretêches, de petits pignons, toujours avec une même pente de 60°, et de couvrir ces loges par deux petits combles qui s’appuieront sur les grands pignons a c, b d. Quant au bâtiment affecté à la cuisine au rez-de-chaussée et à la lingerie au premier étage, nous suivrons la même méthode, et, élevant un pignon sur le mur u v, nous aurons un comble sur ce logis, à deux pentes qui viendra de même s’appuyer sur le grand pignon b d. Nous aurons alors une rencontre à la base du comble sur la loge s t et de celui sur le bâtiment de la lingerie. Nous formerons un appentis, pour éviter les chéneaux intérieurs, lequel pénétrera ces deux combles et rejettera les eaux en t. Donc la projection horizontale de cet ensemble de combles sera le tracé que vous voyez sur notre figure 3. Les souches des cheminées traverseront ces combles, ainsi que je vous l’indique, et ces souches, pour que les cheminées ne fument pas, doivent s’élever au moins au niveau du faîtage[17], c’est-à-dire au-dessus de l’arête supérieure du comble le plus élevé. Quant aux couvertures des dépendances, étant plus basses puisqu’elles n’ont qu’un rez-de-chaussée, nous n’avons pas à nous en préoccuper pour le moment.

      «Remarquons que ces pignons, s’élevant verticalement, nous permettront de disposer sous les combles des chambres d’amis très convenables, indépendamment des chambres de domestiques qu’il faudra ménager, en les éclairant par des lucarnes; tandis que nous pourrons avoir pour les chambres donnant sur les pignons, de belles fenêtres avec balcons, si cela nous convient.

      «Cela décidé en principe, il serait bon de distribuer cet étage sous combles. Mettez un morceau de papier à calquer sur le plan du premier étage. Bien; maintenant, tracez tous les gros murs qui, nécessairement, doivent s’élever jusqu’à la couverture, puisqu’ils portent des cheminées. Tracez, à un mètre en dedans des murs goutterots, c’est-à-dire qui ne portent pas pignons, une ligne, laquelle indique la place perdue par suite de l’inclinaison du comble; vous allez ainsi avoir l’espace dont vous pouvez disposer. Le grand escalier va monter à cet étage, ainsi que l’escalier de service. À partir du gros mur de refend qui, du grand escalier, va joindre l’angle du corps principal vers le sud-est, qui est la belle orientation, nous allons disposer les chambres d’amis, lesquelles formeront ainsi un quartier séparé mis en communication avec les appartements par le grand escalier. Nous pouvons, dans cette partie, obtenir deux belles chambres A et B, avec leurs cabinets de toilette a et b; puis deux plus petites chambres C et D, possédant toutes une cheminée. N’oublions pas le water-closet pour ces appartements, en W. De l’autre part, et en communication directe avec l’escalier de service, nous pourrons trouver facilement quatre chambres de domestiques E, F, G, H, des débarras I, et un water-closet L, pour les gens (fig. 4).

      «Au-dessus du bâtiment des remises et écuries et de la buanderie, nous pourrons aussi, dans les combles, disposer de trois ou quatre chambres de domestiques, cocher, palefrenier, etc.

      Fig. 4 Fig. 4

      Fig 5. Fig 5. Fig. 4—Plan de l'étage sous combles. Fig 5.—Façade, côté de l'arrivée.

      «Maintenant, il convient d’esquisser les façades.

      «Nous élèverons le sol du rez-de-chaussée d’un mètre cinquante centimètres au-dessus du sol extérieur, pour que nos caves soient convenablement aérées et pour soustraire ce rez-de-chaussée à l’humidité du terrain. Nous donnerons au rez-de-chaussée 4m,20c de hauteur sous plafond. Tracez à ce niveau un bandeau horizontal de 0m,30c de hauteur qui sera l’épaisseur du plancher. Aux pièces du premier étage, qui sont plus petites que celles du rez-de-chaussée, nous donnerons 3m,70c entre planchers. Puis tracez l’épaisseur de la corniche avec sa tablette, 0m,55c. Alors commenceront les combles, dont la hauteur sera fixée par celles des pignons. En prenant la face sur l’entrée, projetez verticalement les angles du bâtiment, les portes et fenêtres d’après le plan. Voilà l’ossature de cette façade disposée.»

      Le grand cousin prend alors la planchette et esquisse la façade (fig. 5).

      Tout cela fut bientôt mis au net à une petite échelle pour être envoyé à Mme Marie N..., afin d’avoir son avis, et de procéder à l’exécution dès qu’on aurait reçu la réponse.

      M. Paul commençait à entrevoir quelques-unes des difficultés que fait naître le moindre projet de bâtisse et se demandait comment le père Branchu, qui savait tout juste écrire et compter, avait pu arriver à construire la maison de M. le Maire, laquelle, cependant, n’avait pas trop mauvaise apparence.

      Le grand cousin, interrogé sur ce point, répondit ainsi à M. Paul: «Le père Branchu possède la pratique de son métier; c’est un bon maçon de campagne qui a commencé par porter l’oiseau sur ses épaules, qui est fils de maçon et fait ce qu’il a vu faire à son père. Il est d’ailleurs intelligent, laborieux et probe. Par la pratique seule, il est arrivé à bâtir comme on bâtit au pays, et peut-être un peu mieux, parce qu’il raisonne volontiers sur ce qu’il fait. Il observe; ce n’est ni un sot, ni un vaniteux; il évite les fautes des uns et imite les qualités des autres. Vous le verrez à l’œuvre, et vous serez parfois surpris de la justesse de ses observations, de l’insistance qu’il met à défendre son opinion et des moyens pratiques dont il sait faire usage. Si on lui donne des instructions et qu’il n’en comprenne pas parfaitement le sens, il ne dit mot, mais revient le lendemain

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