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pas comment une femme peut devenir un agent hors pair. Surtout avec ton passé traumatique. Je me demande si ce n’est pas le genre de stress que tu ramènes avec toi à la maison…

      « Excusez-moi, je suis désolée, » murmura-t-elle. Elle sortit de la cuisine et se précipita vers la porte d’entrée. Elle faillit tomber dans les escaliers qui menaient à la pelouse devant la maison. Elle était sûre qu’elle allait se mettre à vomir.

      Heureusement, elle parvint à éviter cette situation gênante. Elle prit une série de profondes inspirations, en se concentrant tellement sur elles qu’elle faillit ne pas remarquer Greene qui descendait silencieusement l’escalier du porche.

      « Il y a certaines affaires qui m’affectent plus que d’autres aussi, » lui dit-il. Il garda une distance respectueuse, pour qu’elle puisse reprendre ses esprits. « Tu seras confrontée à des scènes bien pires que ça. Mais malheureusement, après un temps, tu commences à devenir insensible. »

      Elle acquiesça d’un signe de tête, c’était quelque chose qu’on lui avait déjà dit. « Je sais. C’est juste… que cette scène a fait remonter des choses. Des souvenirs dont je n’aime pas me rappeler. »

      « Le FBI a des thérapeutes exceptionnels pour aider les agents à traverser ce genre de difficultés. Alors ne pense jamais que tu es seule ou que ce genre de réaction fait de toi un moins bon agent. »

      « Merci, » dit Chloé, qui parvint finalement à se redresser.

      Elle réalisa soudain que sa sœur lui manquait terriblement. Bien que cela puisse paraître morbide, elle était à chaque fois envahie de tendres pensées pour Danielle quand des souvenirs du jour où leur mère était morte lui revenaient en mémoire. Et ce n’était pas différent aujourd’hui. Chloé ne pouvait s’empêcher de penser à sa sœur. Danielle était passée par des moments difficiles au fil des ans – victime des circonstances mais également de ses propres mauvais choix. Et maintenant que Chloé vivait si près d’elle, cela semblait impensable qu’elles soient aussi distantes l’une de l’autre.

      Bien sûr, elle avait invité Danielle à venir à la fête de quartier ce weekend mais Chloé était incapable d’attendre aussi longtemps. Et de toute façon, elle savait déjà qu’elle ne viendrait pas.

      Tout à coup, elle sut exactement ce qu’elle voulait : il fallait qu’elle aille la voir maintenant.

      ***

      Chloé ne savait pas pourquoi elle se sentait aussi nerveuse en frappant à la porte de Danielle. Elle savait que Danielle était là. Elle avait vu sa voiture garée sur le parking de son immeuble. La même voiture qu’elle avait en tant qu’adolescente, bardée d’autocollants de groupes rock. Nine Inch Nails. KMFDM. Ministry. En voyant cette voiture avec ces autocollants, une vague de nostalgie qui ressemblait plus à de la tristesse envahit Chloé.

      Est-ce qu’elle n’a vraiment pas grandi du tout ? se demanda Chloé.

      Quand Danielle ouvrit la porte, Chloé vit qu’effectivement elle n’avait pas changé. En tout cas, c’était l’apparence qu’elle en donnait.

      Les sœurs se regardèrent pendant un instant avant de s’embrasser brièvement. Chloé remarqua que Danielle continuait à se teindre les cheveux en noir. Elle portait toujours aussi une boucle d’oreille saillante au coin gauche de ses lèvres. Ses yeux étaient entourés d’un trait léger d’eyeliner noir et elle portait un t-shirt Bauhaus et un jean déchiré.

      « Chloé, » dit Danielle, avec un léger sourire. « Comment vas-tu ? »

      C’était comme si elles s’étaient vues la veille. Et c’était très bien comme ça. Chloé ne s’attendait pas spécialement à une effusion de sentiments de la part de sa sœur.

      Chloé entra dans l’appartement et, sans se préoccuper de ce que Danielle pourrait en penser, elle la serra de nouveau dans ses bras. Elles ne s’étaient plus vues depuis un peu plus d’un an – et ça faisait probablement trois ans qu’elles ne s’étaient plus embrassées comme ça. Le fait de vivre maintenant dans la même ville semblait avoir créé un lien supplémentaire entre elles – c’était quelque chose que Chloé pouvait sentir et qui n’avait pas besoin d’être exprimé à voix haute.

      Danielle la serra également dans ses bras, mais de manière un peu indolente. « Alors… tu vas bien ? » lui demanda Danielle.

      « Oui, je vais bien, » dit Chloé. « Je sais que j’aurais dû appeler avant de venir mais… je ne sais pas. J’avais peur que tu trouves une excuse pour que je ne vienne pas. »

      « Et ça aurait peut-être été le cas, » admit Danielle. « Mais maintenant que tu es là, viens, entre. Excuse-moi pour le bazar. Enfin, pas vraiment, tu sais que j’ai toujours été bordélique. »

      Chloé rit mais quand elle entra dans l’appartement, elle fut surprise de le trouver assez bien rangé. Le salon était sommairement meublé, juste un divan, un meuble télé et une télé, une table basse et une lampe. Chloé savait que le reste de l’appartement serait pareil. Danielle était le genre de personnes qui vivait avec un minimum d’objets. La seule exception, si elle n’avait pas changé depuis l’adolescence (et apparemment ce n’était pas le cas), c’était la musique et les livres. Chloé se sentit presque coupable pour la maison spacieuse qu’elle venait récemment d’acheter avec Steven.

      « Je te prépare un café ? » demanda Danielle.

      « Oui, ce serait super. »

      Elles allèrent dans la cuisine, qui était également équipée du strict nécessaire. Elle avait visiblement récupéré la table dans une brocante et elle l’avait habillée d’une nappe froissée. Deux chaises se trouvaient de chaque côté.

      « Est-ce que tu es venue pour essayer de me convaincre de venir à ta fête de quartier ? » demanda Danielle.

      « Pas du tout, » dit Chloé. « J’étais en stage aujourd’hui et je suis allée sur cette scène de crime qui… eh bien, qui a fait remonter toute une série de souvenirs pas très agréables. »

      « Ah, merde. »

      Le silence s’installa entre elles, pendant que Danielle préparait le café. Chloé regarda la manière dont sa sœur se déplaçait dans la cuisine et elle eut vraiment l’impression que Danielle n’avait pas changé du tout. Elle aurait très bien pu être occupée à regarder sa sœur de dix-sept ans, qui avait quitté la maison pour faire partie d’un groupe de rock, en dépit de la volonté de leurs grands-parents. Tout était pareil, même son air un peu endormi.

      « Est-ce que tu as récemment eu des nouvelles de papa ? » demanda Chloé.

      Danielle se contenta de secouer la tête. « Avec ton boulot, je pensais que ce serait plutôt toi qui aurais des nouvelles. Enfin, s’il y avait des nouvelles à avoir. »

      « Ça fait déjà un petit temps que j’ai arrêté de vérifier. »

      « Ce n’est pas plus mal, » dit Danielle, en étouffant un bâillement du revers de la main.

      « Tu as l’air fatiguée, » dit Chloé.

      « Je le suis. Mais pas fatiguée par manque de sommeil. Le médecin m’avait prescrit des antidépresseurs. Mais ça m’empêchait de dormir. Et quand tu es serveuse dans un bar et que tu ne rentres pas chez toi avant trois heures du matin, tu ne peux pas vraiment te permettre de prendre des médocs qui perturbent tes heures de sommeil. »

      « Tu dis que le médecin te les avait prescrits. Ça veut dire que tu ne les prends plus ? »

      « Non. Ça perturbait mon sommeil, mon appétit et ma libido. Depuis que j’ai arrêté de les prendre, je me sens beaucoup mieux… juste que je suis tout le temps un peu lasse. »

      « Pourquoi est-ce qu’il te les avait prescrits ? » demanda Chloé.

      « À cause de ma

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