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était sain. Le poulain devint un peu énervant au bout d’un certain temps et nous poussait afin de téter. Il était évident qu’on devrait le sevrer sous peu, car au plus tard à la Toussaint, à la grande foire aux chevaux, nous voulions le vendre. A la fin nous donnâmes quelques coups de râpe sur la surface du sabot et arrondîmes les bords de la paroi. Quand tout fut fini et que la jument se trouvait sur une surface plane nous fîmes un dernier tour. Les quatre sabots étaient pareils et dans le bon angle !

      Pendant son temps libre, notre copine découvrait les différentes vallées en autostop, grimpait sur quelques montagnes avec Doris et les enfants et passait de bons moments. Sauf une fois. Mais j’appris cela plus tard, et pas d’elle. Un chauffeur essaya de la draguer. Quand dans son désespoir elle dit : « Je vais le dire à Wolfi ! », l’autre la laissa tranquille, s’excusa même et la conduisit jusqu’au village. Elle dût lui promettre de ne rien me dire. Je ne l’appris que plus tard par Doris.

      Pendant que Claudia était encore là nous en profitâmes tous les quatre et partîmes tôt un matin nous baigner dans la Méditerranée. Les vaches et les chèvres faisaient si peu de lait qu’on pouvait sauter une traite ! Il faisait encore nuit quand nous partîmes. A l’aube nous étions à St. Girons. Les enfants excités n’arrivaient plus à dormir. En passant par Foix et Lavelanet nous arrivâmes à Quillan, d’où la route suivait une rivière verte à travers de gorges sauvages. En face, quasiment que dans des tunnels, se dessinait une ligne de chemin de fer. Ça nous rappelait fort la Perse. Et puis la mer s’étala devant nous, une étendue bleue sans limites, scintillant dans la lumière du soleil ! Les enfants partirent en courant dans l’eau, la faisant gicler. Alors nous les suivîmes. Le contraire absolu de notre vallée verte ! Plus tard, quand il commença à faire chaud, nous érigeâmes avec une couverture et les bâtons de berger qui se trouvaient toujours dans la voiture, un abri pour nous protéger du soleil. Je fus le premier à m’endormir. La farniente était plus fatigante que le travail ! Le cœur lourd, nous reprîmes la route tard l’après-midi avec la résolution de revenir bientôt. Mais c’était une résolution difficile à tenir…

      Plus nous approchions de la ferme, plus les soucis prenaient le dessus. Pourvu que les animaux ne se soient pas échappés ! Quand nous montâmes la pente, il faisait déjà sombre. Nous ne les voyions pas, ni ne les entendions. Arrivés devant la maison nous les entendîmes dans l’étable. J’éclairai avec la torche. Mais qu’est-ce qui se passait ? Vaches et chèvres se promenaient dans tous les sens, une vache avait une botte de foin accrochée aux cornes, le sac de blé des poules était déchiré, le grain éparpillé… Quelques chèvres grimpaient sur les balles de foin empilées au fond de l’étable, s’en servant avec gourmandise. Puis Claudia, nous ayant entendu arriver, se joignit à nous. « Elles se trouvaient toutes devant la clôture et me regardaient avec leurs yeux suppliants. Alors je les ai fait rentrer ! », expliqua-t-elle. « C’est bien ! Mais tu aurais dû attacher les vaches et enfermer les chèvres dans leur enclos ! Quand tous sont enfermés ensemble ils peuvent se blesser facilement. Par chance elles étaient trop occupées de finir tout qui était comestible ! »

      *

      C’était semble-t-il « les portes ouvertes » chez nous. L’un des « occupants » de notre ancienne maison en Allemagne se pointa de façon inattendue. Il était en route pour le Maroc et voulait nous faire plaisir en nous rendant visite. Et aussi pour nous aider. « Bon sang, un marginal de la ville ! » pensai-je. « Qu’est-ce qu’on pourrait lui faire faire ? ». Bien, un peu de jardinage ne pouvait pas le tuer, surtout ayant quitté le lit très tard. Mais à l’extérieur il faisait chaud ! Alors qu’il sorte un peu de fumier. Là au moins il sera à l’ombre ! Mais non, après le stress de la ville il avait besoin de se remettre un peu… Car, en ville, ils y étaient tous revenus après avoir été mis à la porte définitivement avant la démolition de la maison, prévue de longue date. En ville la survie était plus facile qu’à la campagne ! Les rares fois où ils se levaient tôt, c’était quand ils partaient « prélever » devant chez Aldi ou d’autres magasins ce dont ils avaient besoin pour vivre. Dans ce cas, ça valait la peine de mettre le réveil, ou mieux encore d’y faire un saut après une nuit blanche ! « Là on trouve des choses meilleures que les légumes sales de votre jardin ! » Doris et moi étions d’accord : il fallait qu’il foute le camp ! Mais il avait d’autres idées dans la tête et commença à calculer : « Ça fait combien de temps que vous êtes ici ? », voulu-t-il savoir. « Bientôt six mois ! », répondis-je. « humm…, ça fait environ vingt semaines. J’ai travaillé ici depuis une semaine. Alors j’ai droit à un vingtième de votre ferme ! Je suis devenu en quelque sorte copropriétaire ! » Nous en avions assez : « On t’avait dit que tu pouvais rester une semaine. Elle est finie. Maintenant ouste, prends la porte ! » En Allemagne il était squatteur, et maintenant il prétendait être propriétaire !

      *

      Où que nous allions, nous avions toujours un bâton avec nous. Les plus beaux étaient ceux des enfants, ornés d’anneaux ou de serpents gravés dans l’écorce. Les nôtres, surtout le mien, étant des bâtons de travail, étaient exposés à une certaine usure. Les tiges de noisetier s’y prêtaient bien à cause de leur croissance droite, mais aussi les frênes. Opinel et bâton sont l’équipement de base d’un berger. A ça s’ajoutait le « Caporal », ce tabac puant et émietté et les feuilles sans gomme. Je ne comprenais jamais pourquoi tant de « néos », comme on nous appelait, fumaient ce tabac. Déjà à cause de son nom ! Même pour faire un joint ce tabac était trop âpre ! Pourquoi empester cet air frais qui nous entoure ? Était-ce parce que la plupart entre nous avaient des poumons de citadins et avaient besoin de leur dose de pollution quotidienne ? Ou était-ce pour ressembler aux autochtones ? D’accord, moi aussi je fumais parfois. Ça pouvait être quelque chose de très convivial ! Surtout dans un bar, car en fumant soi-même on trouvait l’air environnant moins vicié. Le bâton était utile quand on marchait sur les pentes fortes. Aussi dit-on « le bâton est la prolongation du bras du berger ». Parfois il était le bras téléguidé, en le jetant loin pour faire tourner une bête. Et plus d’un se cassait quand les animaux suscitaient la colère du paysan… Les occasions ne manquaient pas! Un coup de pied inattendu contre le tibia, un coup contre le seau à moitié plein de lait, qui le faisait partir à travers la petite étable. Ou une vache qui posait son pied dans le seau et refusait de le ressortir ! Le plus courant était une caresse au visage avec la queue dégoulinante de purin. Mais on pouvait l’attacher à une jambe. Brigitte Bardot, si elle était passée à certains moments, aurait fait enlever nos animaux pour les mettre dans une ménagerie avec ses bébés phoques !

       Petit à petit nous nous rendions compte qu’on pouvait « dresser » les animaux de deux manières : avec « carotte et bâton », une friandise (céréales, son, sel) ou le bâton. En plus il y avait la voix. Selon le timbre de la voix, un animal ressent la situation ! Les animaux doivent te reconnaître comme chef de troupeau. Ils doivent te respecter mais ne pas avoir peur de toi ! Un animal apeuré peut vite devenir dangereux, car il se comporte différemment de d’habitude. Quand ils ont du respect, un appel suffit souvent pour qu'ils arrêtent les provocations. Dans peu de cas il faut les « corriger », comme on dit ici, par un coup de bâton. Il faut aussi être ponctuel. Car un animal a son rythme : parfois il mange, d’autre fois il rumine. Par l’heure de la traite ou de l’alimentation on peut influencer ce rythme, mais ensuite on doit le garder. Il nous restait beaucoup plus à apprendre qu’aux vaches !

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