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      Un gardien s’est présenté à ma cellule. « Tu as de la visite », a-t-il dit. Impossible. Personne ne viendrait jusqu’ici par ce temps. Pas pour me voir! Je me méprisais, je n’avais aucun respect pour moi. Mais, j’étais prêt à n’importe quoi pour sortir de ma cellule. Je ne l’ai donc pas contredit.

      En entrant dans la salle des visiteurs, j’ai vu cet air dans les yeux de ma mère. Le même que j’avais vu des centaines, peut-être des milliers de fois. Pourtant, cette fois-ci, je ne pouvais pas compter sur l’alcool ou la drogue pour apaiser ma douleur. Je voulais ramper sous la table la plus proche. Tout ce que j’ai trouvé à dire ce fut : « Pourquoi as-tu pris la route par ce temps? Je peux très bien m’occuper de moi. » Je voulais encore lui montrer que j’étais un dur.

      « J’ai voulu m’assurer que tu ne manquerais pas de cigarettes et de café », a-t-elle dit avec amour, comme seule une mère peut le faire. À ce moment précis, j’ai su qu’il fallait que les choses changent. Si je ne m’aimais pas, je devais cesser de faire du mal aux personnes qui m’aimaient encore. Mais je n’avais aucune idée de la façon de le faire.

      On m’a transféré à Clinton Dennamora. Je me suis mis encore une fois dans le pétrin en tentant de faire le dur et de survivre. On m’a éventuellement transféré dans une prison à sécurité moyenne. Un conseiller du nom de Bill L. s’est intéressé à moi. C’était un ami de Bill W. et il était membre des Alcooliques anonymes depuis 12 ans. Il a lu mon casier judiciaire. Il a compris que j’étais un alcoolique qui avait besoin d’aide. Il ne m’a pas parlé de ma maladie. Il m’a toutefois initié au programme des AA. Il a été très prudent. Il ne voulait surtout pas me faire peur.

      J’ai commencé à travailler pour lui dans le programme d’abus de substance. Pour réaliser ce projet, j’ai dû accepter d’étudier pour une équivalence d’études secondaires. Plus tard, il m’a convaincu d’aller au collège. J’ai ainsi pu obtenir un diplôme d’associé et un certificat en délinquance juvénile. Pour moi, c’était toute une réussite. J’avais quitté l’école en sixième année. Je commençais à avoir une meilleure opinion de moi.

      Un jour, Bill L. m’a fait venir à son bureau et m’a demandé un service. Il voulait savoir si je pouvais préparer la salle pour une réunion des AA avec conférenciers de l’extérieur. Il pourrait y avoir des femmes dans le groupe. « Bien sûr! » ai-je dit sans hésiter.

      En réalité, il n’y avait pas de femmes! J’étais déçu, mais je suis resté et j’ai écouté. Cela devait devenir le moment décisif de ma vie et de mon attitude devant la vie. Le conférencier venait de Brooklyn, un noir américain d’âge moyen. J’avais moi aussi grandi à Brooklyn. Je suis latino et j’étais à la fin de la vingtaine à l’époque. J’ai pu m’identifier à chaque mot du conférencier. Il a parlé de son alcoolisme. Il a parlé de cette impression de honte, de culpabilité et de solitude. Mon Dieu, j’avais ressenti cela toute ma vie, mais jamais je n’en avais parlé en ces termes. Je ne pouvais que réagir par la colère et la rage. Pour la première fois de ma vie, j’ai compris mon véritable problème. J’ai senti de l’espoir.

      Après ce jour, j’ai assisté à presque toutes les réunions des AA. J’ai été libéré sous condition à ma première audition, mon premier miracle. Je ne m’y attendais pas à cause de mon important casier judiciaire. À l’extérieur, j’ai immédiatement commencé à assister aux réunions. En parrainant les autres, j’ai appris les avantages du service chez les AA. J’ai toujours voulu devenir conseiller en abus de substances. Les AA m’ont permis d’atteindre cet objectif.

      Mais d’abord et avant tout, je suis un alcoolique. Je vais bientôt marquer mon seizième anniversaire d’abstinence. Ma vie dépasse toutes mes espérances. Jamais je n’avais imaginé avoir tous ces présents simplement en étant abstinent et en aidant d’autres alcooliques qui souffrent.

      – Homme anonyme

      CHER MAC

      Salut, mon ami. Comment vas-tu ? J’espère que tu vas bien et que ton groupe d’attache va bien aussi. Je veux d’abord te dire que je vais très bien – Dieu merci!

      Mac, tu peux partager ma lettre avec le Grapevine. Je ne peux pas garder mon abstinence si je ne la partage pas.

      Tous mes problèmes passés ont été causés par l’alcool. Je suis en prison pour tentative de vol par effraction. J’étais vraiment en très mauvaise posture. J’étais aux prises avec un tueur d’hommes. Aujourd’hui, je remercie Dieu d’être en vie. Je pleure souvent. J’ai laissé l’alcool ruiner ma vie, mais mes larmes sont un mélange d’émotions : la culpabilité, la tristesse et la joie. Aujourd’hui, je sais que j’ai un ami chez les AA. Le mouvement veut me protéger de ce tueur, peu importe où je suis. Il me faut seulement trouver un groupe des AA. Ainsi, j’aurai un ami. Je le crois vraiment. Je n’ai pas peur de demander de l’aide. Je veux vivre.

      Pendant des années, je me suis fait du tort. J’ai aussi fait du mal à ma famille. J’étais un jeune homme fort troublé. Je haïssais ma vie et je me haïssais moi-même. Je ne m’aimais pas et je n’avais aucun respect pour ma personne. Je n’avais pas non plus d’amour ni de respect pour les autres. Je l’ignorais alors. L’alcool me rendait aveugle. Mais, aujourd’hui, j’apprends à me connaître grâce à ma Puissance supérieure et au programme des AA.

      Je viens d’une famille monoparentale. Ma mère a fait de son mieux, mais elle n’avait pas d’instinct maternel. C’est ainsi que j’ai appris à devenir un homme dans la rue. Cela a faussé mon jugement. Cela a faussé ma vision de la vie. Et l’alcool n’a fait qu’empirer les choses.

      Je suis en prison depuis cinq ans. Il me reste 11 mois avant ma libération. J’ai eu de gros problèmes à cause de l’alcool. Je n’ai pas été arrêté, j’ai été rescapé. Je le crois vraiment. La mort me guettait.

      J’ai eu des démêlés avec la justice. J’ai été en prison auparavant. Mais cette fois, j’ai touché mon bas-fond. J’ai fini par admettre que je ne pourrais jamais prendre d’alcool, jamais.

      Je me souviens encore de ma première réunion des AA en prison. Je les ai entendus parler d’une « Puissance supérieure ». Ils parlaient d’un « Dieu, tel que je le conçois ». Puis, quelqu’un a dit : « Tu peux prendre n’importe quoi comme Puissance supérieure. » J’ai quitté la réunion en pleurant comme un bébé. Je tenais la Bible dans mes mains.

      Je l’ignorais à l’époque, mais Dieu allait me sauver par le biais des AA. Je ne croyais pas que les AA pouvaient m’aider. Je croyais que ces gens étaient pires que moi. C’était mon problème. Même en prison, je m’apitoyais sur mon sort. Mais, je ne croyais pas être si mauvais que ça.

      Ce soir-là, j’ai lu la Bible. Ma Puissance supérieure m’a guidé vers un passage qui disait : Je peux tout faire si Dieu m’en donne la force. J’ai pleuré et j’ai prié. À ce moment-là, je ne savais pas que j’allais m’en sortir. J’étais triste et fatigué.

      J’ai commencé à assister aux réunions des AA. Je m’assoyais et j’écoutais. J’espérais que quelqu’un dirait quelque chose qui m’aiderait et m’apprendrait comment faire face à ce monstre. Semaine après semaine, j’écoutais les partages. À la fin de la réunion, quelqu’un disait : « Demande de l’aide » et « Reviens ». J’ai compris que c’était là la réponse. Je suis donc retourné aux réunions. Finalement, ma Puissance supérieure m’a fait comprendre : je dois demander de l’aide. Je n’ai jamais assisté à une réunion à l’extérieur. Mais, si Dieu le veut, j’ai l’intention d’y aller. Depuis que je suis en prison, je vais aux réunions chaque fois qu’il y en a.

      J’ai parlé à la directrice de mon unité à propos d’un programme en Douze Étapes. Elle m’a dit de suggérer

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