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Henri VI. 3. Уильям Шекспир
Читать онлайн.Название Henri VI. 3
Год выпуска 0
isbn
Автор произведения Уильям Шекспир
Жанр Драматургия
Издательство Public Domain
NORTHUMBERLAND. – Maintenant, madame, qu'ordonnez-vous de lui?
MARGUERITE. – Braves guerriers, Clifford, Northumberland, il faut le placer sur ce tertre de terre, lui qui les bras étendus voulait atteindre les montagnes, et n'a fait avec sa main que traverser leur ombre. – Quoi, c'était donc vous qui vouliez être roi d'Angleterre? C'était donc vous qui triomphiez dans notre parlement, et nous faisiez entendre un discours sur votre naissance? Où est maintenant votre potée d'enfants, pour vous soutenir? Votre pétulant Édouard et votre robuste George? Où est-il, ce vaillant miracle des bossus, votre petit Dicky, dont la voix toujours grondante animait son papa à la révolte? Où est-il aussi votre bien-aimé Rutland? Voyez, York, j'ai teint ce mouchoir dans le sang que le brave Clifford a fait sortir avec la pointe de son épée du sein de cet enfant; et si vos yeux peuvent pleurer sa mort, tenez, je vous le présente, pour en essuyer vos larmes. Hélas! pauvre York! si je ne vous haïssais pas mortellement, je plaindrais l'état misérable où je vous vois! Je t'en prie, York, afflige-toi pour me réjouir. Frappe du pied, enrage, désespère-toi, que je puisse chanter et danser. Quoi! le feu de ton coeur a-t-il tellement desséché tes entrailles, qu'il ne puisse couler une larme pour la mort de Rutland? D'où te vient ce calme? Tu devrais être furieux, et c'est pour te rendre furieux que je t'insulte ainsi. Mais je le vois; tu veux que je te paye pour me divertir: York ne sait parler que quand il porte une couronne. – Une couronne pour York. – Et vous, lords, inclinez-vous bien bas devant lui. – Tenez-lui les mains, tandis que je vais le couronner. (Elle lui place sur la tête une couronne du papier5). Mais, vraiment, à présent il a l'air d'un roi. Oui, voilà celui qui s'est emparé du trône de Henri; voilà celui qui s'était fait adopter par lui pour son héritier. – Mais comment se fait-il donc que le grand Plantagenet soit couronné sitôt, au mépris de son serment solennel? Je croyais, moi, que tu ne devais être roi qu'après que notre roi Henri aurait serré la main à la mort; et vous voulez ceindre votre tête de la gloire de Henri, et ravir à son front le diadème dès à présent, pendant sa vie, et contre votre serment sacré! Oh! c'est aussi un crime trop impardonnable! Allons, faites tomber cette couronne, et avec elle sa tête, et qu'il suffise d'un clin d'oeil pour le mettre à mort.
CLIFFORD. – Cet office me regarde, en mémoire de mon père.
MARGUERITE. – Non, arrête encore: écoutons-le pérorer.
YORK. – Louve de France, mais pire que les loups de France; toi dont la langue est plus envenimée que la dent de la vipère, qu'il sied mal à ton sexe de triompher, comme une amazone effrontée, des malheurs de ceux qu'enchaîne la fortune! Si ton visage n'était pas immobile comme un masque, et accoutumé à l'impudence par l'habitude des mauvaises actions, j'essayerais de te faire rougir, reine présomptueuse: te dire seulement d'où tu viens, de qui tu sors, c'en serait assez pour te couvrir de honte, s'il te restait quelque sentiment de honte. Ton père, qui se pare des titres de roi de Naples, des Deux-Siciles et de Jérusalem, n'a pas le revenu d'un métayer anglais. Est-ce donc ce monarque indigent qui t'a appris à insulter? Cela est bien inutile et ne te convient pas, reine insolente! à moins qu'il ne te faille vérifier le proverbe, qu'un mendiant sur un cheval le pousse jusqu'à ce qu'il crève. C'est la beauté qui souvent fait l'orgueil des femmes. Mais Dieu sait que ta part en est petite. C'est la vertu qui les fait le plus admirer. Le contraire t'a rendue un objet d'étonnement. C'est par la décence et la douceur qu'elles deviennent comme divines; et c'est par l'absence de ces qualités que tu es abominable. Tu es l'opposé de tout bien, comme les antipodes le sont du lieu que nous habitons, comme le sud l'est du septentrion. Oh! coeur de tigresse, caché sous la forme d'une femme! Comment, après avoir teint ce linge du sang vital d'un enfant pour en essuyer les larmes de son père, peux-tu porter encore la figure d'une femme? Les femmes sont douces, sensibles, pitoyables et d'un coeur facile à fléchir; et toi, tu es féroce, implacable, dure comme la roche, inflexible et sans remords. Tu m'excitais à la fureur; eh bien! tu as ce que tu désirais. Tu voulais me voir pleurer; eh bien! tu as ce que tu voulais; car la fureur des vents amasse d'interminables ondées, et, dès qu'elle se ralentit, commence la pluie. Ces pleurs sont les obsèques de mon cher Rutland; et chaque larme crie vengeance sur sa mort… contre toi, barbare Clifford… et toi, perfide Française.
NORTHUMBERLAND. – Je m'en veux; mais ses douleurs m'émeuvent au point que j'ai de la peine à retenir mes larmes.
YORK. – Des cannibales affamés eussent craint de toucher à un visage comme celui de mon fils, et n'eussent pas voulu le souiller de sang; mais vous êtes plus inhumains, plus inexorables; oh! dix fois plus que les tigres de l'Hyrcanie. Vois, reine impitoyable; vois les larmes d'un malheureux père: ce linge que tu as trempé dans le sang de mon cher enfant, vois, j'en lave le sang avec mes larmes; tiens, reprends-le, et va te vanter de ce que tu as fait. (Il lui rend le mouchoir.) Si tu racontes, comme elle est, cette histoire, sur mon âme, ceux qui l'entendront lui donneront des larmes: oui, mes ennemis même verseront des larmes abondantes, et diront: Hélas! ce fut un lamentable événement. – Allons, reprends ta couronne, et ma malédiction avec elle; et puisses-tu, quand tu en auras besoin, trouver la consolation que je reçois de ta cruelle main! Barbare Clifford! ôte-moi du monde! Que mon âme s'envole aux cieux, et que mon sang retombe sur vos têtes!
NORTHUMBERLAND. – Il aurait massacré toute ma famille, que je ne pourrais pas, dût-il m'en coûter la vie, m'empêcher de pleurer avec lui, en voyant combien la douleur domine profondément son âme.
MARGUERITE. – Quoi! tu en viens aux larmes, milord Northumberland? – Songe seulement aux maux qu'il nous a faits à tous, et cette pensée séchera bientôt tes tendres pleurs.
CLIFFORD. – Voilà pour accomplir mon serment, voilà pour la mort de mon père.
MARGUERITE, lui portant aussi un coup d'épée. – Et voilà pour venger le droit de notre bon roi.
YORK. – Ouvre-moi les portes de ta miséricorde, Dieu de clémence! Mon âme s'envole par ces blessures pour aller vers toi.
MARGUERITE. – Abattez sa tête, et placez-la sur les portes d'York: de cette manière York dominera sa ville d'York.
FIN DU PREMIER ACTE.
ACTE DEUXIÈME
SCÈNE I
ÉDOUARD. – J'ignore comment notre auguste père aura pu échapper, et même s'il aura pu échapper ou non à la poursuite de Clifford et de Northumberland. S'il avait été pris, nous en aurions appris la nouvelle; s'il avait été tué, le bruit nous en serait aussi parvenu; mais s'il avait échappé, il me semble aussi que nous aurions dû recevoir le consolant avis de son heureuse fuite. Comment se trouve mon frère? pourquoi est-il si triste?
RICHARD. – Je n'aurai point de joie que je ne sache ce qu'est devenu notre très-valeureux père. Je l'ai vu dans la bataille renversant tout sur son passage; j'ai observé comme il cherchait à écarter Clifford, et à l'attirer seul. Il m'a paru se conduire au plus fort de la mêlée, comme un lion au milieu d'un troupeau de boeufs, ou un ours entouré de chiens qui, lorsque quelques-uns d'entre eux atteints de sa griffe ont poussé des cris de douleur, se tiennent éloignés, aboyant contre lui. Tel était notre père au milieu de ses ennemis: ainsi les ennemis fuyaient mon redoutable père. C'est, à mon avis, gagner assez de gloire que d'être ses fils. – Vois comme l'aurore ouvre ses portes d'or et prend congé du soleil radieux. Comme elle ressemble au printemps de la jeunesse! au jeune homme qui s'avance gaiement vers celle qu'il aime!
ÉDOUARD. – Mes yeux sont-ils éblouis, ou vois-je en effet trois soleils?
RICHARD. – Ce sont trois soleils brillants, trois soleils bien entiers: non pas un soleil coupé par les nuages, car, distincts l'un de l'autre, ils brillent dans un ciel clair et blanchâtre.
5
Ces détails, dont le fond est rapporté par Hollinshed, d'après quelques chroniques, et en particulier celle de