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David Copperfield – Tome I. Чарльз Диккенс
Читать онлайн.Название David Copperfield – Tome I
Год выпуска 0
isbn
Автор произведения Чарльз Диккенс
Жанр Зарубежная классика
Издательство Public Domain
Il me fallut quelques moments de réflexion pour comprendre ce que signifiait la métaphore employée par M. Peggotty pour figurer les nouvelles respectives qu'il se chargeait de faire circuler à la ronde. Je le remerciai de nouveau, et je lui demandai, non sans rougir, ce qu'était devenue la petite Émilie, depuis le temps où nous ramassions des cailloux et des coquillages sur la plage.
«Mais elle devient une femme, voilà ce qu'elle devient, dit M. Peggotty. Demandez-lui.»
Il me montrait Ham qui faisait un signe de joyeuse affirmation tout en contemplant le sac de crevettes.
«Quelle jolie figure! dit M. Peggotty, et ses yeux rayonnaient de plaisir.
– Et si savante! dit Ham.
– Elle écrit si bien! dit M. Peggotty. C'est noir comme de l'encre, et si gros qu'on pourrait le voir de dix lieues à la ronde.»
Avec quel enthousiasme M. Peggotty parlait de sa petite favorite! Il est là devant moi; son visage s'épanouit avec une expression d'amour et de joyeux orgueil, que je ne saurais peindre; ses yeux honnêtes brillent et s'animent comme s'ils lançaient des étincelles. Sa large poitrine se soulève de plaisir; ses grandes mains se pressent l'une contre l'autre dans son émotion, et il gesticule d'un bras si vigoureux, qu'avec mes yeux de pygmée je crois voir un marteau de forge.
Ham était tout aussi ému que lui. Je crois qu'ils m'auraient parlé beaucoup plus longuement de la petite Émilie, s'ils n'avaient été intimidés par l'entrée inattendue de Steerforth, qui, me voyant causer dans un coin avec deux inconnus, cessa aussitôt de chanter et me dit: «Je ne savais pas que vous fussiez ici, Copperfield» (car ce n'était pas le parloir des visites), puis il passa son chemin.
Je ne sais si c'est que j'étais fier de montrer que j'avais un ami comme Steerforth, ou si je voulais lui expliquer comment il se faisait que j'avais un ami tel que M. Peggotty, mais je le rappelai et je lui dis modestement (grand Dieu! comme tous ces souvenirs sont encore présents à mon esprit): «Ne vous en allez pas, Steerforth, je vous en prie. Ce sont deux marins de Yarmouth, d'excellentes gens, des parents de mon ancienne bonne; ils sont venus de Gravesend pour me voir.
– Ah! ah! dit Steerforth en revenant sur ses pas. Je suis charmé de les voir. Comment allez-vous?»
Il y avait une aisance dans toutes ses manières, une grâce facile et naturelle qui semblait d'une séduction irrésistible.
Dans sa tournure, dans sa gaieté, dans sa voix si douce, dans sa noble figure, il y avait je ne sais quel attrait mystérieux auquel on cédait sans le vouloir. Je vis tout de suite qu'il les charmait l'un et l'autre, et qu'ils étaient tout disposés à lui ouvrir leurs coeurs.
«Quand vous enverrez la lettre à Peggotty, dis-je à ces braves gens, vous leur ferez savoir, je vous prie, que M. Steerforth est très-bon pour moi, et que je ne sais pas ce que je deviendrais ici sans lui.
– Quelle bêtise! dit Steerforth en riant. N'allez pas leur dire ça.
– Et si M. Steerforth vient jamais en Norfolk ou en Suffolk, monsieur Peggotty, continuai-je, vous pouvez être bien sûr que je l'amènerai à Yarmouth pour voir votre maison. Vous n'avez jamais vu une si drôle de maison, Steerforth: elle est faite d'un bateau!
– Faite d'un bateau! dit Steerforth. Eh bien, c'est la maison qui convient à un marin pur-sang.
– C'est bien vrai, monsieur; c'est bien vrai, dit Ham en riant. Vous avez raison. Monsieur Davy, ce jeune monsieur a raison. Un marin pur-sang! Ah, ah! C'est bien ça.»
M. Peggotty était tout aussi ravi que son neveu, mais sa modestie ne lui permettait pas de s'approprier aussi bruyamment un compliment tout personnel.
«Mais oui, monsieur, dit-il en saluant et en rentrant les bouts de sa cravate dans son gilet; je vous suis obligé, monsieur, je vous remercie. Je fais de mon mieux, dans ma profession, monsieur.
– On ne peut rien demander de plus, monsieur Peggotty, dit Steerforth. Il savait déjà son nom.
– C'est ce que vous faites vous-même, j'en suis sûr, monsieur, dit M. Peggotty eu secouant la tête, et vous y réussissez, j'en suis certain, monsieur. Je vous remercie, monsieur, de m'avoir si bien accueilli. Je suis un peu rude, monsieur, mais je suis franc; je l'espère, du moins, vous comprenez. Ma maison n'est pas belle, monsieur, mais elle est toute à votre service, si jamais vous voulez venir la voir avec M. Davy. Mais je reste là comme un colimaçon, dit M. Peggotty, ce qui signifiait qu'il restait attaché là, sans pouvoir s'en aller. Il avait essayé, après chaque phrase, de se retirer, mais sans jamais en venir à bout. «Allons, je vous souhaite une bonne santé et bien du bonheur.»
Ham s'associa à ce voeu, et nous nous quittâmes le plus affectueusement du monde. J'avais un peu envie, ce soir-là, de parler à Steerforth de la jolie petite Émilie, mais la timidité me retint, j'avais trop peur qu'il ne se moquât de moi. Je réfléchis longuement, et non sans anxiété, à ce qu'avait dit M. Peggotty, qu'elle devenait une femme; mais je décidai en moi-même que c'était une bêtise.
Nous transportâmes nos crustacés dons notre dortoir avec un profond mystère, et nous fîmes un grand souper. Mais Traddles n'en sortit pas à son honneur. Il n'avait pas de chance: il ne pouvait pas même se tirer d'un souper comme un autre. Il fut malade toute la nuit, mais malade comme il n'est pas possible, grâce au crabe; et après avoir été forcé d'avaler des médecines noires et des pilules, à une dose suffisante pour tuer un cheval, du moins s'il faut en croire Demple (dont le père était docteur), il eut encore des coups de canne par-dessus le marché avec six chapitres grecs du Nouveau Testament à traduire, pour le punir de n'avoir voulu faire aucun aveu.
Le reste du semestre se confond dans mon esprit avec la routine journalière de notre triste vie: l'été a fini et l'automne est venu; il fait froid le matin, à l'heure où on se lève; quand on se couche, la nuit est plus froide encore; le soir, notre salle d'études est mal éclairée et mal chauffée, le matin c'est une vraie glacière; nous passons du boeuf bouilli au boeuf rôti, et du mouton rôti au mouton bouilli; nous mangeons du pain avec du beurre rance; puis c'est un horrible mélange de livres déchirés, d'ardoises fêlées, de cahiers salis par nos larmes, de coups de canne, de coups de règle, de cheveux coupés, de dimanches pluvieux et de puddings aigres: le tout enveloppé d'une épaisse atmosphère d'encre.
Je me rappelle cependant que la lointaine perspective des vacances, après être restée longtemps immobile, semble enfin se rapprocher de nous; que nous en vînmes bientôt à ne plus compter par mois, ni par semaines, mais bien par jours; que j'avais peur qu'on ne me rappelât pas chez ma mère, et que, lorsque j'appris de Steerforth que ma mère me réclamait, je fus saisi d'une vague terreur à l'idée que je me casserais peut-être la jambe avant le jour fixé pour mon départ. Je me rappelle que je sentais ce jour béni se rapprocher d'heure en heure. C'est la semaine prochaine, c'est cette semaine, c'est après-demain, c'est demain, c'est aujourd'hui, c'est ce soir; je monte dans la malle-poste de Yarmouth, je vais revoir ma mère.
Je fis bien des sommes à bâtons rompus dans la malle-poste, et bien des rêves incohérents où se retrouvaient toutes ces pensées et ces souvenirs. Mais quand je me réveillais de temps à autre, j'avais le bonheur de reconnaître, par la portière de la voiture, que le gazon que je voyais n'était pas celui de la récréation de Salem-House, et que le bruit que j'entendais n'était plus celui des coups que Creakle administrait à Traddles, mais celui du fouet dont le cocher touchait ses chevaux.
CHAPITRE VIII
Mes vacances, et en particulier certaine après-midi où je fus bien heureux
À la pointe du jour, en arrivant à l'auberge où s'arrêtait la malle poste (ce n'était pas celle dont je connaissais trop bien le garçon), on me mena dans une petite chambre très-propre sur laquelle était inscrit le nom de DAUPHIN. J'étais gelé en dépit de la tasse de thé chaud qu'on m'avait donnée,