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Le Vicaire de Wakefield. Oliver Goldsmith
Читать онлайн.Название Le Vicaire de Wakefield
Год выпуска 0
isbn
Автор произведения Oliver Goldsmith
Жанр Зарубежная классика
Издательство Public Domain
– Vraiment, reprit ma femme, j’avais toujours cru que mon Charles aimait à voir autour de lui ses enfants propres et de bonne mine. – Soyez aussi propres qu’il vous plaira, interrompis-je, et je vous en aimerai d’autant mieux; mais tout ceci n’est pas de la propreté, c’est de la friperie. Ces plissés, ces déchiquetures, ces mouchetures ne serviront qu’à nous faire haïr des femmes de nos voisins. Non, mes enfants, continuai-je d’un ton plus grave; ces robes peuvent être refaites avec une coupe plus simple, car l’élégance est fort déplacée chez nous, qui avons à peine les moyens de nous mettre décemment. Je ne sais si ces volants et ces chiffons conviennent même chez les riches, lorsque je considère que, d’après un calcul modéré, les colifichets des vaniteux pourraient vêtir la nudité du monde des indigents.»
Cette remontrance eut l’effet qu’elle devait avoir; elles allèrent, avec un grand calme et à l’instant même, changer de costume; le lendemain, j’eus la satisfaction de voir mes filles, sur leur désir exprès, occupées à tailler dans leurs traînes des gilets du dimanche pour les deux petits Dick et Bill; et ce qui fut le plus satisfaisant, c’est que les robes semblaient avoir gagné à cette amputation.
CHAPITRE V
A UNE petite distance de la maison, mon prédécesseur avait fait un banc, ombragé par une baie d’aubépine et de chèvrefeuille. Là, lorsque le temps était beau et notre travail fini de bonne heure, nous avions l’habitude de nous asseoir ensemble pour jouir d’un vaste paysage dans le calme du soir. Là aussi nous prenions le thé, qui était devenu maintenant un régal assez rare; et, comme nous n’en avions que de temps en temps, il répandait une joie nouvelle, et les préparatifs ne s’en faisaient pas avec peu d’empressement et de cérémonies. Dans ces occasions, nos deux petits nous faisaient toujours la lecture, et ils étaient régulièrement servis après que nous avions fini. Quelquefois, pour mettre de la variété dans nos plaisirs, les filles chantaient en s’accompagnant sur la guitare; pendant qu’elles formaient ainsi un petit concert, ma femme et moi nous descendions, en nous promenant, le champ en pente, embelli de campanules et de centaurées, causant de nos enfants avec délices et jouissant de la brise qui transportait à la fois la santé et l’harmonie.
De cette façon, nous commencions à trouver que toutes les situations de la vie peuvent apporter leurs plaisirs propres. Chaque matin nous éveillait pour la reprise du même travail, mais le soir nous en dédommageait par une insoucieuse hilarité.
C’était au commencement de l’automne, un jour férié, – car je les observais comme des intervalles de relâche dans le travail; – j’avais amené ma famille à notre lieu ordinaire de récréation, et nos jeunes musiciennes commençaient leur concert habituel. Pendant que nous nous occupions ainsi, nous vîmes un cerf passer en bonds rapides à vingt pas environ de l’endroit où nous étions assis. Au pantèlement de ses flancs, il semblait pressé par les chasseurs. Nous n’avions guère eu le temps de songer à la détresse du pauvre animal, lorsque nous aperçûmes les chiens et les cavaliers arriver à toute vitesse à quelque distance derrière et prendre le même sentier qu’il avait pris. Je fus sur-le-champ d’avis de rentrer avec ma famille; mais la curiosité, ou la surprise, ou quelque motif plus caché, retinrent ma femme et mes filles à leurs places. Le chasseur qui courait en avant passa devant nous avec une grande rapidité, suivi de quatre ou cinq autres personnes qui semblaient emportées d’une hâte égale.
En dernier lieu, un jeune gentilhomme, d’apparence plus distinguée que les autres, s’avança, et, nous ayant regardés un instant, au lieu de poursuivre la chasse, il s’arrêta court, donna son cheval à un serviteur qui suivait, et s’approcha de nous avec un air d’insouciante supériorité. Il semblait n’avoir pas besoin d’être annoncé, et il allait saluer mes filles comme quelqu’un qui est certain d’être bien reçu; mais elles avaient appris de bonne heure à déconcerter d’un regard la présomption. Il nous fit alors savoir que son nom était Thornhill, et qu’il était possesseur du domaine qui s’étendait à quelque distance autour de nous. En conséquence, il se mit en devoir de saluer la partie féminine de la famille, et tel est le pouvoir de la fortune et des beaux habits qu’il n’éprouva pas un second refus. Comme son abord, quoique suffisant, était facile, nous devînmes bientôt plus familiers, et, apercevant des instruments de musique déposés près de nous, il demanda qu’on lui fît la faveur de chanter. Peu partisan de liaisons si disproportionnées, je fis signe de l’œil à mes filles pour les empêcher de consentir; mais un autre signe de leur mère détruisit l’effet du mien, si bien qu’elles nous donnèrent, d’un air joyeux, un morceau à la mode de Dryden. M. Thornhill parut ravi du choix et de l’exécution; puis il prit la guitare lui-même. Il ne jouait que très médiocrement; néanmoins, ma fille aînée lui rendit ses applaudissements avec usure et l’assura qu’il tirait des sons plus hauts que ne le faisait son maître même. A ce compliment il fit un salut, auquel elle répondit par une révérence. Il loua son goût; elle vanta son jugement. Un siècle n’aurait pas mieux noué leur connaissance. Cependant la vaniteuse mère, aussi heureuse, insistait de son côté pour que son seigneur entrât et goûtât un verre de sa groseille. Toute la famille semblait avoir à cœur de lui plaire: mes filles essayaient de l’intéresser sur les sujets qu’elles croyaient avoir le plus d’actualité, tandis que Moïse, au contraire, lui soumettait une ou deux questions à propos des anciens, qui lui valurent la satisfaction de se voir rire au nez; mes tout petits n’étaient pas moins empressés et s’attachaient avec amour à l’étranger. Tous mes efforts suffisaient à peine à empêcher leurs doigts sales de manier et de ternir les galons de ses habits et de lever les pattes de ses poches pour voir ce qu’il y avait dedans. A l’approche du soir, il prit congé; mais pas avant d’avoir demandé la permission de renouveler sa visite, ce que nous lui accordâmes avec la plus grande facilité, car il était notre seigneur.
Dès qu’il fut parti, ma femme tint conseil sur les événements du jour. Elle était d’avis que c’était un coup des plus heureux; car, à sa connaissance, des choses plus étranges que celle-là avaient réussi. Elle espérait encore voir le jour où nous pourrions dresser la tête au milieu des plus huppés et elle conclut en protestant qu’il lui était impossible de voir la raison pour laquelle les deux misses Wrinklers avaient épousé de grandes fortunes quand ses enfants, à elle, n’en auraient pas. Comme ce dernier argument était à mon adresse, je protestai également que j’étais, comme elle, incapable d’en voir la raison, non plus que celle pour laquelle M. Simkins avait gagné le lot de dix mille livres à la loterie quand nous étions restés avec un billet nul. «Je le déclare, Charles, s’écria ma femme, c’est de cette façon que vous nous glacez toujours, mes filles et moi, quand nous sommes gaies. Dites-moi, Sophie, ma chère, que pensez-vous de notre nouveau visiteur? Ne trouvez-vous pas qu’il semble avoir un bon naturel? – Infiniment bon, en vérité, maman, répliqua-t-elle. Je crois qu’il a beaucoup à dire sur tout et qu’il n’est jamais à court; et plus le sujet est mince, plus il a à dire. – Oui, s’écria Olivia, il est assez bien pour un homme; pourtant, quant à moi, je ne l’aime pas beaucoup; il est par trop impudent et familier; mais sur la guitare il est révoltant.» J’interprétai ces deux derniers discours par la méthode des contraires, et je trouvai ainsi que Sophia le méprisait dans son for intérieur autant que, secrètement, Olivia l’admirait. «Quelles que soient vos opinions sur son compte, mes enfants, m’écriai-je, pour confesser la vérité, il ne m’a pas prévenu en sa faveur. Les amitiés disproportionnées se terminent toujours par des dégoûts, et je crois qu’il paraissait, malgré toute sa facilité de manières, parfaitement sentir la distance qui est entre nous. Tenons-nous-en à des compagnons de notre rang. Il n’y a point de caractère plus méprisable que celui de l’homme coureur de fortune, et je ne