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Жерминаль. Книга для чтения на французском языке. Эмиль Золя
Читать онлайн.Название Жерминаль. Книга для чтения на французском языке
Год выпуска 2005
isbn 5-89815-503-1
Автор произведения Эмиль Золя
Жанр Литература 19 века
Серия Чтение в оригинале (Каро)
Издательство КАРО
C’était une salle assez vaste, tenant tout le rez-de-chaussée, peinte en vert pomme, d’une propreté flamande, avec ses dalles lavées à grande eau et semées de sable blanc. Outre le buffet de sapin verni, l’ameublement consistait en une table et des chaises du même bois. Collées sur les murs, des enluminures violentes, les portraits de l’Empereur et de l’Impératrice donnés par la Compagnie, des soldats et des saints, bariolés d’or, tranchaient crûment dans la nudité claire de la pièce; et il n’y avait d’autres ornements qu’une boîte de carton rose sur le buffet, et que le coucou à cadran peinturluré, dont le gros tic-tac semblait remplir le vide du plafond. Près de la porte de l’escalier, une autre porte conduisait à la cave. Malgré la propreté, une odeur d’oignon cuit, enfermée depuis la veille, empoisonnait l’air chaud, cet air alourdi, toujours chargé d’une âcreté de houille.
Devant le buffet ouvert, Catherine réfléchissait. Il ne restait qu’un bout de pain, du fromage blanc en suffisance, mais à peine une lichette de beurre; et il s’agissait de faire les tartines pour eux quatre. Enfin, elle se décida, coupa les tranches, en prit une qu’elle couvrit de fromage, en frotta une autre de beurre, puis les colla ensemble: c’était «le briquet», la double tartine emportée chaque matin à la fosse. Bientôt, les quatre briquets furent en rang sur la table, répartis avec une sévère justice, depuis le gros du père jusqu’au petit de Jeanlin.
Catherine, qui paraissait toute à son ménage, devait pourtant rêvasser aux histoires que Zacharie racontait sur le maître-porion et la Pierronne, car elle entrebâilla la porte d’entrée et jeta un coup d’oeil dehors. Le vent soufflait toujours, des clartés plus nombreuses couraient sur les façades basses du coron, d’où montait une vague trépidation de réveil. Déjà des portes se refermaient, des files noires d’ouvriers s’éloignaient dans la nuit. Etait-elle bête, de se refroidir, puisque le chargeur à l’accrochage dormait bien sûr, en attendant d’aller prendre son service, à six heures! Et elle restait, elle regardait la maison, de l’autre côté des jardins. La porte s’ouvrit, sa curiosité s’alluma. Mais ce ne pouvait être que la petite des Pierron, Lydie, qui partait pour la fosse.
Un bruit sifflant de vapeur la fit se tourner. Elle ferma, se hâta de courir: l’eau bouillait et se répandait, éteignant le feu. Il ne restait plus de café, elle dut se contenter de passer l’eau sur le marc de la veille; puis, elle sucra dans la cafetière, avec de la cassonade. Justement, son père et ses deux frères descendaient.
– Fichtre! déclara Zacharie, quand il eut mis le nez dans son bol, en voilà un qui ne nous cassera pas la tête!
Maheu haussa les épaules d’un air résigné.
– Bah! c’est chaud, c’est bon tout de même.
Jeanlin avait ramassé les miettes des tartines et trempait une soupe. Après avoir bu, Catherine acheva de vider la cafetière dans les gourdes de fer-blanc. Tous quatre, debout, mal éclairés par la chandelle fumeuse, avalaient en hâte.
– Y sommes-nous à la fin!! dit le père. On croirait qu’on a des rentes!
Mais une voix vint de l’escalier, dont ils avaient laissé la porte ouverte. C’était la Maheude qui criait:
– Prenez tout le pain, j’ai un peu de vermicelle pour les enfants!
– Oui, oui! répondit Catherine.
Elle avait recouvert le feu, en calant, sur un coin de la grille, un restant de soupe, que le grand-père trouverait chaude, lorsqu’il rentrerait à six heures. Chacun prit sa paire de sabots sous le buffet, se passa la ficelle de sa gourde à l’épaule, et fourra son briquet dans son dos, entre la chemise et la veste. Et ils sortirent, les hommes devant, la fille derrière, soufflant la chandelle, donnant un tour de clef. La maison redevint noire.
– Tiens! nous filons ensemble, dit un homme qui refermait la porte de la maison voisine.
C’était Levaque, avec son fils Bébert, un gamin de douze ans, grand ami de Jeanlin. Catherine, étonnée, étouffa un rire, à l’oreille de Zacharie: quoi donc? Bouteloup n’attendait même plus que le mari fût parti!
Maintenant, dans le coron, les lumières s’éteignaient. Une dernière porte claqua, tout dormait de nouveau, les femmes et les petits reprenaient leur somme, au fond des lits plus larges. Et, du village éteint au Voreux qui soufflait, c’était sous les rafales un lent défilé d’ombres, le départ des charbonniers pour le travail, roulant des épaules, embarrassés de leurs bras, qu’ils croisaient sur la poitrine; tandis que, derrière, le briquet faisait à chacun une bosse. Vêtus de toile mince, ils grelottaient de froid, sans se hâter davantage, débandés le long de la route, avec un piétinement de troupeau.
III
Étienne, descendu enfin du terri, venait d’entrer au Voreux; et les hommes auxquels il s’adressait, demandant s’il y avait du travail, hochaient la tête, lui disaient tous d’attendre le maître-porion.
Un porion, le père Richomme, un gros à figure de bon gendarme, barrée de moustaches grises, se dirigeait justement vers le bureau du receveur.
– On n’a pas besoin d’un ouvrier ici, pour n’importe quel travail? demanda de nouveau Étienne.
Richomme allait dire non; mais il se reprit et répondit comme les autres, en s’éloignant:
– Attendez monsieur Dansaert, le maître-porion.
Quatre lanternes étaient plantées là, et les réflecteurs, qui jetaient toute la lumière sur le puits, éclairaient vivement les rampes de fer, les leviers des signaux et des verrous, les madriers des guides, où glissaient les deux cages.
Un instant, Étienne resta immobile, assourdi, aveuglé. Il était glacé, des courants d’air entraient de partout. Alors, il fit quelques pas, attiré par la machine, dont il voyait maintenant luire les aciers et les cuivres. Elle se trouvait en arrière du puits, à vingt-cinq mètres, dans une salle plus haute, et assise si carrément sur son massif de briques, qu’elle marchait à toute vapeur, de toute sa force de quatre cents chevaux, sans que le mouvement de sa bielle énorme, émergeant et plongeant, avec une douceur huilée, donnât un frisson aux murs. Le machineur, debout à la barre de mise en train, écoutait les sonneries des signaux, ne quittait pas des yeux le tableau indicateur, où le puits était figuré, avec ses étages différents, par une rainure verticale, que parcouraient des plombs pendus à des ficelles, représentant les cages. Et, à chaque départ, quand la machine se remettait en branle, les bobines, les deux immenses roues de cinq mètres de rayon, aux moyeux desquels les deux câbles d’acier s’enroulaient et se déroulaient en sens contraire, tournaient d’une telle vitesse, qu’elles n’étaient plus qu’une poussière grise.
– Attention donc! crièrent trois moulineurs, qui traînaient une échelle gigantesque.
Étienne avait manqué d’être écrasé. Ses yeux s’habituaient, il regardait en l’air filer les câbles, plus de trente mètres de ruban d’acier, qui montaient d’une volée dans le beffroi, où ils passaient sur les molettes, pour descendre à pic dans le puits s’attacher aux cages d’extraction. Une charpente de fer, pareille à la haute charpente d’un clocher, portait les molettes.[4] C’était un glissement d’oiseau, sans un bruit, sans un heurt, la fuite rapide, le continuel va-et-vient d’un fil de poids énorme, qui pouvait enlever jusqu’à douze mille kilogrammes, avec une vitesse de dix mètres à la seconde.
– Attention donc, nom de Dieu! crièrent de nouveau les moulineurs, qui poussaient l’échelle de l’autre côté, pour visiter la molette de gauche.
Lentement, Étienne revint à la recette. Ce vol géant sur sa tête l’ahurissait. Et, grelottant dans les courants d’air, il regarda la manoeuvre des cages, les oreilles cassées par le roulement des berlines. Près du puits, le signal fonctionnait, un lourd marteau à levier, qu’une corde tirée du fond laissait tomber sur un billot. Un coup pour arrêter, deux pour descendre, trois pour monter: c’était
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