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Жерминаль. Книга для чтения на французском языке. Эмиль Золя
Читать онлайн.Название Жерминаль. Книга для чтения на французском языке
Год выпуска 2005
isbn 5-89815-503-1
Автор произведения Эмиль Золя
Жанр Литература 19 века
Серия Чтение в оригинале (Каро)
Издательство КАРО
– Quand le vieux rentrera, dit méchamment Zacharie, il sera content de trouver le lit défait… Tu sais, je lui raconterai que c’est toi.
Le vieux, c’était le grand-père, Bonnemort, qui, travaillant la nuit, se couchait au jour; de sorte que le lit ne refroidissait pas, il y avait toujours dedans quelqu’un à ronfler.
Sans répondre, Catherine s’était mise à tirer la couverture et à la border. Mais, depuis un instant, des bruits s’entendaient derrière le mur, dans la maison voisine. Ces constructions de briques, installées économiquement par la Compagnie, étaient si minces, que les moindres souffles les traversaient. On vivait coude à coude, d’un bout à l’autre; et rien de la vie intime n’y restait caché, même aux gamins. Un pas lourd avait ébranlé un escalier, puis il y eut comme une chute molle, suivie d’un soupir d’aise.
– Bon! dit Catherine, Levaque descend, et voilà Bouteloup qui va retrouver la Levaque.
Jeanlin ricana, les yeux d’Alzire eux-mêmes brillèrent. Chaque matin, ils s’égayaient ainsi du ménage à trois des voisins, un haveur qui logeait un ouvrier de la coupe à terre, ce qui donnait à la femme deux hommes, l’un de nuit, l’autre de jour.
– Philomène tousse, reprit Catherine après avoir tendu l’oreille.
Elle parlait de l’aînée des Levaque, une grande fille de dix-neuf ans, la maîtresse de Zacharie, dont elle avait deux enfants déjà, si délicate de poitrine d’ailleurs, qu’elle était cribleuse à la fosse, n’ayant jamais pu travailler au fond.
– Ah, ouiche! Philomène! répondit Zacharie, elle s’en moque, elle dort!.. C’est cochon de dormir jusqu’à six heures!
Il passait sa culotte, lorsqu’il ouvrit une fenêtre, préoccupé d’une idée brusque. Au-dehors, dans les ténèbres, le coron s’éveillait, des lumières pointaient une à une, entre les lames des persiennes. Et ce fut encore une dispute: il se penchait pour guetter s’il ne verrait pas sortir de chez les Pierron, en face, le maître-porion du Voreux, qu’on accusait de coucher avec la Pierronne; tandis que sa soeur lui criait que le mari avait, depuis la veille, pris son service de jour à l’accrochage, et que bien sûr Dansaert n’avait pu coucher, cette nuit-là. L’air entrait par bouffées glaciales, tous deux s’emportaient, en soutenant chacun l’exactitude de ses renseignements, lorsque des cris et des larmes éclatèrent. C’était, dans son berceau, Estelle que le froid contrariait.
Du coup, Maheu se réveilla. Qu’avait-il donc dans les os? voilà qu’il se rendormait comme un propre à rien. Et il jurait si fort, que les enfants, à côté, ne soufflaient plus. Zacharie et Jeanlin achevèrent de se laver, avec une lenteur déjà lasse. Alzire, les yeux grands ouverts, regardait toujours. Les deux mioches, Lénore et Henri, aux bras l’un de l’autre, n’avaient pas remué, respirant du même petit souffle, malgré le vacarme.
– Catherine, donne-moi la chandelle! cria Maheu.
Elle finissait de boutonner sa veste, elle porta la chandelle dans le cabinet, laissant ses frères chercher leurs vêtements, au peu de clarté qui venait de la porte. Son père sautait du lit. Mais elle ne s’arrêta point, elle descendit en gros bas de laine, à tâtons, et alluma dans la salle une autre chandelle, pour préparer le café. Tous les sabots de la famille étaient sous le buffet.
– Te tairas-tu, vermine! reprit Maheu, exaspéré des cris d’Estelle, qui continuaient.
Il était petit comme le vieux Bonnemort, et il lui ressemblait en gras, la tête forte, la face plate et livide, sous les cheveux jaunes, coupés très courts. L’enfant hurlait davantage, effrayée par ces grands bras noueux qui se balançaient au-dessus d’elle.
– Laisse-la, tu sais bien qu’elle ne veut pas se taire, dit la Maheude, en s’allongeant au milieu du lit.
Elle aussi venait de s’éveiller, et elle se plaignait, c’était bête de ne jamais faire sa nuit complète. Ils ne pouvaient donc partir doucement? Enfouie dans la couverture, elle ne montrait que sa figure longue, aux grands traits, d’une beauté lourde, déjà déformée à trente-neuf ans par sa vie de misère et les sept enfants qu’elle avait eus. Les yeux au plafond, elle parla avec lenteur, pendant que son homme s’habillait. Ni l’un ni l’autre n’entendait plus la petite qui s’étranglait à crier.
– Hein? tu sais, je suis sans le sou, et nous voici à lundi seulement: encore six jours à attendre la quinzaine… Il n’y a pas moyen que ça dure.[3] A vous tous, vous apportez neuf francs. Comment veux-tu que j’arrive? Nous sommes dix à la maison.
– Oh! neuf francs! se récria Maheu. Moi et Zacharie, trois: ça fait six… Catherine et le père, deux: ça fait quatre; quatre et six, dix… Et Jeanlin, un, ça fait onze.
– Oui, onze, mais il y a les dimanches et les jours de chômage… Jamais plus de neuf, entends-tu?
Il ne répondit pas, occupé à chercher par terre sa ceinture de cuir. Puis, il dit en se relevant:
– Faut pas se plaindre, je suis tout de même solide. Il y en a plus d’un, à quarante-deux ans, qui passe au raccommodage.
– Possible, mon vieux, mais ça ne nous donne pas du pain… Qu’est-ce que je vais fiche, dis? Tu n’as rien, toi?
– J’ai deux sous.
– Garde-les pour boire une chope… Mon Dieu! qu’est-ce que je vais fiche? Six jours, ça n’en finit plus. Nous devons soixante francs à Maigrat, qui m’a mise à la porte avant-hier. Ca ne m’empêchera pas de retourner le voir. Mais, s’il s’entête à refuser…
Et la Maheude continua d’une voix morne, la tête immobile, fermant par instants les yeux sous la clarté triste de la chandelle. Elle disait le buffet vide, les petits demandant des tartines, le café même manquant, et l’eau qui donnait des coliques, et les longues journées passées à tromper la faim avec des feuilles de choux bouillies. Peu à peu, elle avait dû hausser le ton, car le hurlement d’Estelle couvrait ses paroles. Ces cris devenaient insoutenables. Maheu parut tout d’un coup les entendre, hors de lui, et il saisit la petite dans le berceau, il la jeta sur le lit de la mère, en balbutiant de fureur:
– Tiens! prends-la, je l’écraserais. Nom de Dieu d’enfant! ça ne manque de rien, ça tète, et ça se plaint plus haut que les autres!
Estelle s’était mise à téter, en effet. Disparue sous la couverture, calmée par la tiédeur du lit, elle n’avait plus qu’un petit bruit goulu des lèvres.
– Est-ce que les bourgeois de la Piolaine ne t’ont pas dit d’aller les voir? reprit le père au bout d’un silence.
La mère pinça la bouche, d’un air de doute découragé.
– Oui, ils m’ont rencontrée, ils portent des vêtements aux enfants pauvres… Enfin, je mènerai ce matin chez eux Lénore et Henri. S’ils me donnaient cent sous seulement.
Le silence recommença. Maheu était prêt. Il demeura un moment immobile, puis il conclut de sa voix sourde:
– Qu’est-ce que tu veux? c’est comme ça, arrange-toi pour la soupe… Ca n’avance à rien d’en causer, vaut mieux être là-bas au travail.
– Bien sur, répondit la Maheude. Souffle la chandelle, je n’ai pas besoin de voir la couleur de mes idées.
Il souffla la chandelle. Déjà, Zacharie et Jeanlin descendaient; il les suivit; et l’escalier de bois craquait sous leurs pieds lourds, chaussés de laine. Derrière eux, le cabinet et la chambre étaient retombés aux ténèbres. Les enfants dormaient, les paupières d’Alzire elle-même s’étaient closes. Mais la mère restait maintenant les yeux ouverts dans l’obscurité, tandis que, tirant sur sa mamelle pendante de femme épuisée, Estelle ronronnait comme un petit chat.
En bas, Catherine s’était d’abord occupée du feu, la cheminée de fonte, à grille centrale,
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