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      LE DESTRUCTEUR DE L’ AMAZONIE

      Alberto

      Vázquez-Figueroa

      Titre original: Le destructeur de l’ Amazonie

      Première édition: Octobre 2020

      © 2020 Editorial Kolima, Madrid

      www.editorialkolima.com

      Auteur: Alberto Vázquez-Figueroa

      Adresse éditoriale: Marta Prieto Asirón

      Couver phototype setting: Silvia Vázquez-Figueroa

      Traduction: Marie Claire Mathias

      Illustrations: @Dreamstime

      Phototype setting: Carolina Hernández Alarcón

      ISBN: 978-84-18263-53-8

      La reproduction totale ou partielle de cette œuvre, ou son incorporation, n’est pas autorisée à un système informatique, ni sa transmission en aucune façon ou par tout moyen, électronique, mécanique, par photocopie, par enregistrement ou d’autres méthodes, location ou toute autre forme de cession du travail sans l’autorisation écrite préalable des propriétaires de la propriété intellectuelle.

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      « Il est dommage que notre cavalerie n’ait pas été aussi efficace que l’Américaine qui a su exterminer les indigènes ».

      Jair Messías Bolsonaro. Président du Brésil

      CHAPÎTRE I

      Six hommes armés surgirent de la forêt.

      Ils portaient des uniformes qui n’appartenaient pas à la « Fondation Nationale de L’Indien », ni à aucun organisme national, et constituaimt plutôt un capricieux méli-mélo de pantalons, bottes et vestes de camouflage acquis dans n’importe quel marché de rue.

      Aussitôt ils menacèrent les indigènes, hommes, femmes, enfants les obligeant à se rassembler au centre du village dans la maison communale.

      Ils portaient des uniformes n’appartenant ni à la « Fondation Nationale de L’Indien » ni à aucune organisation connue, et qui constituaient plutôt un mélange hétéroclite de pantalons de camouflage, de bottes et de vestes achetés dans n’importe quel marché de rue.

      Ils exhibèrent ensuite une série de documents inintelligibles, selon lesquels un village construit par les « ahúcas » il y avait cinq générations, était au cœur d’un terrain qui appartenait maintenant à Don Marcelo de Castro y Costa. Ils apportaient donc un ordre d’expulsion signé par le président Jair Messías Bolsonaro lui-même, qui se considérait apparemment comme le nouveau messie.

      S’agissant selon eux d’un ordre d’application immédiate, les personnes considérées comme des « squatters » avaient une heure pour récupérer leurs biens et disparaître.

      En cas de résistance, ils seraient emmenés dans la réserve indigène de l’État d’Acre, à près de trois mille kilomètres de là.

      ***

      « Manaus n’est pas édifiée sur le fleuve Amazone, mais sur la rive gauche de son affluent, « el Negro », à une courte distance de l’union des deux. Il est surprenant d’observer comment les eaux noires entrent en collision avec celles boueuses de l’Amazone formant une ligne parfaite, délimitée au centimètre. En étendant la main sur la surface de ces eaux, on peut identifier quels doigts se trouvent dans l’Amazone et lesquels se trouvent dans le « Negro ». Puis, un peu plus loin, sans transition, sans savoir comment, les eaux propres et noires disparaissent, englouties par l’immensité du courant boueux de l’Amazone.

      « Jusqu’à il y a un peu plus d’un siècle, dire Manaus, c’était dire caoutchouc. Ce n’était qu’un hameau et n’aurait jamais été plus que cela si, en 1893, Charles Goodyear n’avait pas découvert que le caoutchouc, combiné au soufre, résistait aussi bien aux basses températures qu’aux plus élevées.

      « Le monde voulait du caoutchouc, de plus en plus de caoutchouc, et l’arbre qui le fournissait ne poussait que dans la jungle amazonienne.

      « Les commerçants, les aventuriers et les désespérés arrivèrent du bout du monde et se dispersèrent dans la jungle prêts à saigner les arbres, leur arrachant jusqu’à la dernière goutte de lait blanc et élastique. Et ils le firent avec une telle fougue que, peu de temps après, des rivières d’or coulaient à Manaus, ce qui en fit du jour au lendemain la ville la plus riche, la plus excentrique et la plus folle du monde.

      « Le caoutchouc créa des fortunes et des millionnaires extravagants qui firent bâtir sur la plus hautaine des collines de la jungle, le plus hautain des théâtres, décoré de feuilles d’or, splendide et absurde, aussi absurde que le fait de faire venir d’Angleterre –en quatre voyages, pierre par pierre– l’immense bâtisse des douanes qui domine toujours l’entrée de la ville.

      « Plus le siècle s’écoulait, plus la folie grandissait à Manaus, qui commençait même à aspirer à être la capitale de la nation.

      « À la périphérie de la ville, les jaguars rugissaient, mais en son centre du champagne français coulait d’une fontaine qu’un riche exploitant avait fait construire dans le jardin de sa mansion. Les plus célèbres compagnies d’opéra venaient y ravir les nouveaux riches, à quelque milliers de kilomètres de la mer, en pleine jungle.

      « Huit des dix composants d’une troupe moururent, victimes de fièvres et d’épidémies, mais cela n’empêcha pas que d’autres tentent l’aventure, car nulle part ailleurs on ne pouvait gagner autant d’argent en un mois qu’à Manaus en une seule nuit.

      « C’était le petit Paris de la jungle, qui osait être aussi célèbre que l’authentique, ne sachant pas qu’il y avait déjà quelques temps, en 1876, un Anglais établi en aval, Henry Vickham, avait réuni une grande quantité de graines afin de les exporter clandestinement du pays. Et ainsi du Brésil à Londres, de Londres à Java, elles donnèrent lieu à la création de plantations d’hévéas en Asie du Sud-Est qui surpassèrent immédiatement les performances des arbres sauvages de la forêt amazonienne.

      « Tout comme elle était née, Manaus mourut. De l’illusion perdue, il resta un théâtre, une cathédrale, un poste de douane, et tant de choses que des fous magnifiques avaient édifiées en pensant que la folie ne finirait jamais.

      « Restèrent également les centaines, les milliers de cadavres de ceux que le béribéri, les bêtes sauvages ou les mille maladies et dangers de la jungle avaient emportés ».

      Elle referma le livre, profondément déçue que la ville qu’ils laissaient derrière eux n’ait rien à voir avec ce qu’elle venait de lire, alors une vieille chanson lui vint à l’esprit:

      « Ta rue n’est plus ta rue, c’est n’importe quelle rue qui mène n’importe où »…

      Manaus n’était plus Manaus, sinon une ville quelconque sur le chemin vers n’importe où. Mais personne ne pouvait nier qu’elle conservait le mérite d’être au cœur même de l’Amazonie.

      Et la véritable Amazonie, celle qu’elle recherchait, avait commencé au moment où le navire avait quitté le cours du plus grand fleuve de la planète –celui qui transportait plus d’eau que tous les autres réunis– pour naviguer sur ses innombrables affluents qui zigzaguaient et s’enroulaient comme d’interminables anacondas et finissaient par mourir sur de petites plages.

      Et là, pour continuer d’avancer, il fallait se frayer un chemin à la machette. Et c’était là que le monde barbare du caoutchouc d’il y a plus d’un siècle semblait renaître,

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