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Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 1 - (A). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
Читать онлайн.Название Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 1 - (A)
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Автор произведения Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
Издательство Public Domain
Quand il s'est agi de reproduire ou de continuer des oeuvres des siècles passés, ce n'est pas d'en bas que nous sont venues les difficultés, et les exécutants ne nous ont jamais fait défaut; Mais c'est précisément parce que cette tendance est autre chose qu'une mode ou une réaction, qu'il est fort important d'apporter un choix scrupuleux, une critique impartiale et sévère, dans l'étude et l'emploi des matériaux qui peuvent contribuer à rendre à notre pays un art conforme à son génie. Si cette étude est incomplète, étroite, elle sera stérile et fera plus de mal que de bien; elle augmentera la confusion et l'anarchie dans lesquelles les arts sont tombées depuis tantôt cinquante ans, et qui nous conduiraient à la décadence; elle apportera un élément de désordre de plus; si, au contraire, cette étude est dirigée avec intelligence et soin; si l'enseignement officiel l'adopte franchement et arrête ainsi ses écarts, réunit sous sa main tant d'efforts partiels qui se sont perdus faute d'un centre, les résultats ne se feront pas attendre, et l'art de l'architecture reprendra le rang qui lui convient chez une nation éminemment créatrice. Des convictions isolées, si fortes qu'elles soient, ne peuvent faire une révolution dans les arts; si aujourd'hui nous cherchons à renouer ces fils brisés, à prendre dans un passé qui nous appartient en propre les éléments d'un art contemporain, ce n'est pas au profit des goûts de tel ou tel artiste ou d'une coterie; nous ne sommes au contraire que les instruments dociles des goûts et des idées de notre temps, et c'est aussi pour cela que nous avons foi dans nos études et que le découragement ne saurait nous atteindre; ce n'est pas nous qui faisons dévier les arts de notre époque, c'est notre époque qui nous entraîne.... Où? qui le sait! Faut-il au moins que nous remplissions de notre mieux la tâche qui nous est imposée par les tendances du temps où nous vivons. Ces efforts, il est vrai, ne peuvent être que limités, car la vie de l'homme n'est pas assez longue pour permettre à l'architecte d'embrasser un ensemble de travaux, soit intellectuels soit matériels; l'architecte n'est et ne peut être qu'une partie d'un tout; il commence ce que d'autres achèvent, ou termine ce que d'autres ont commencé; il ne saurait donc travailler dans l'isolement, car son oeuvre ne lui appartient pas en propre, comme le tableau au peintre, le poème au poète. L'architecte qui prétendrait seul imposer un art à toute une époque ferait un acte d'insigne folie. En étudiant l'architecture du moyen âge, en cherchant à répandre cette étude, nous devons dire que notre but n'est pas de faire rétrograder les artistes, de leur fournir les éléments d'un art oublié pour qu'ils les reprennent tels quels, et les appliquent sans raisons aux édifices du XIXe siècle; cette extravagance a pu nous être reprochée, mais elle n'a heureusement jamais été le résultat de nos recherches et de nos principes. On a pu faire des copies plus ou moins heureuses des édifices antérieurs au XVIe siècle, ces tentatives ne doivent être considérées que comme des essais destinés à retrouver les éléments d'un art perdu mais non comme le but auquel doit s'arrêter notre architecture moderne. Si nous regardons l'étude de l'architecture du moyen âge comme utile, et pouvant amener peu à peu une heureuse révolution dans l'art, ce n'est pas à coup sûr pour obtenir des oeuvres sans originalité, sans style, pour voir reproduire sans choix et comme une forme muette, des monuments remarquables surtout à cause du principe qui les a fait élever, mais c'est au contraire pour que ce principe soit connu, et qu'il puisse porter des fruits aujourd'hui comme il en a produit pendant les XIIe et XIIIe siècles. En supposant qu'un architecte de ces époques revienne aujourd'hui, avec ses formules et les principes auxquels il obéissait de son temps, et qu'il puisse être initié à nos idées modernes, si l'on mettait à sa disposition les perfectionnements apportés dans l'industrie, il ne bâtirait pas un édifice du temps de Philippe Auguste ou de saint Louis, parce qu'il fausserait ainsi la première loi de son art, qui est de se conformer aux besoins et aux moeurs du moment, d'être rationnel. Jamais peut-être des ressources plus nombreuses n'ont été offertes aux architectes; les exécutants sont nombreux, intelligents et habiles de la main; l'industrie est arrivée à un degré de perfectionnement qui n'avait pas été atteint. Ce qui manque à