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réveilla des souvenirs affreux et viscéraux et la ramena au moment terrible où, quand elle avait cinq ans, sa mère l'avait battue jusqu'à ce qu'elle perde connaissance. Les blessures de cette raclée avaient guéri, ainsi que beaucoup d'autres, mais les blessures au cœur de Ceres n'avaient jamais arrêté de saigner et, maintenant qu'elle savait sans le moindre doute que sa mère ne l'aimait pas et ne l'avait jamais aimée, elle sentait son cœur se fendre pour de bon.

      Avant qu'elle puisse réagir, la mère de Ceres s'avança et la gifla si violemment au visage que son oreille se mit à siffler.

      Tout d'abord, Ceres fut abasourdie par cette attaque soudaine et fut sur le point de céder mais, à ce moment-là, quelque chose se brisa en elle. Elle n'allait pas se permettre de battre en retraite comme elle l'avait toujours fait.

      Ceres rendit sa gifle à sa mère. Elle la frappa si fort sur la joue que sa mère tomba par terre, le souffle coupé, horrifiée.

      Toute rouge, sa mère se releva, saisit Ceres par l'épaule et les cheveux et lui envoya un coup de genou à l'estomac. Quand Ceres se courba en avant, ployée par la douleur, sa mère lui envoya un coup de genou au visage et la fit tomber par terre.

      L'esclavagiste était resté regarder le spectacle, les yeux écarquillés. Visiblement ravi par cette bagarre, il gloussait.

      Ceres toussait et haletait encore à cause de l'assaut. Elle se releva en trébuchant puis, avec un hurlement, elle se jeta vers sa mère et la précipita par terre.

      Il faut en finir était l'unique pensée dont Ceres était capable. Toutes ces années sans amour, de traitement dédaigneux, nourrissaient sa rage. De ses points fermés, Ceres frappa le visage de sa mère à de nombreuses reprises. Des larmes de furie lui coulaient sur les joues et des sanglots incontrôlables s'échappaient de ses lèvres.

      Finalement, sa mère ne bougea plus.

      Les épaules de Ceres tremblaient à chaque cri et elle avait l'estomac noué. Aveuglée par les larmes, elle leva les yeux vers l'esclavagiste et le regarda avec une haine encore plus intense.

      “Tu feras bien l'affaire”, dit Lord Blaku avec un sourire rusé. Il ramassa le sac d'or par terre et l'attacha à sa ceinture en cuir.

      Soudain, avant qu'elle puisse réagir, il lui mit les mains dessus. Il la saisit, grimpa dans le chariot et la jeta à l'arrière d'un seul geste rapide, comme si elle n'était qu'un sac de pommes de terre. Sa corpulence massive et sa force était telles qu'elle ne pouvait lui résister. Lui retenant le poing d'un bras et prenant une chaîne de l'autre, il dit : “Je ne suis pas idiot au point d'imaginer que tu resterais ici jusqu'à demain matin.”

      Elle jeta un coup d’œil à la maison où elle avait habité dix-huit ans et les larmes lui vinrent aux yeux quand elle pensa à ses frères et à son père. Cependant, il faudrait qu'elle prenne une décision si elle voulait sauver sa peau, et cela avant d'être enchaînée aux pieds.

      Donc, en un seul mouvement rapide, elle fit appel à toute sa force, arracha son bras à l'emprise de l'esclavagiste, souleva une jambe et le frappa au visage aussi fort que possible. Il tomba en arrière, hors du chariot, et s'effondra à terre.

      Ceres bondit du chariot et courut aussi vite qu'elle le pouvait sur le chemin de terre, loin de la femme qu'elle s'était jurée de ne plus jamais appeler 'mère', loin de tout ce qu'elle avait jamais connu et aimé.

      CHAPITRE QUATRE

      Entouré par la famille royale, Thanos essayait laborieusement de garder une expression faciale plaisante pendant qu'il tenait sa coupe de vin en or, mais en vain. Il détestait être ici. Il détestait ces gens, sa famille, et il détestait assister aux cérémonies royales, surtout celles qui venaient après les Tueries. Il savait comment vivait le peuple, dans quelle pauvreté, et il ressentait l'absurdité et l'injustice de toute cette pompe et de tout ce dédain. Il aurait tout donné pour être loin d'ici.

      Debout à côté de ses cousins Lucious, Aria et Varius, Thanos ne faisait pas le moindre effort pour participer à leur insignifiante conversation. Au lieu de cela, il regardait les invités de l'Empire qui allaient çà et là dans les jardins du palais et, vêtus de leur toge et de leur étole, souriaient hypocritement et déballaient des mondanités mensongères. Quelques-uns de ses cousins se lançaient de la nourriture les uns sur les autres en courant sur la pelouse impeccable et entre les tables couvertes de nourriture et de vin. D'autres rejouaient leurs scènes préférées des Tueries en riant et en se moquant de ceux qui avaient perdu la vie aujourd'hui.

      Des centaines de gens, se disait Thanos, et pas un seul d'honorable.

      “Le mois prochain, j'achèterai trois seigneurs de guerre”, dit Lucious, l'aîné, d'un ton tapageur en s'essuyant délicatement du front ses gouttes de sueur avec un mouchoir en soie. “Stefanus ne valait pas la moitié de ce que j'ai payé pour lui et, s'il n'était pas déjà mort, je l'aurais moi-même passé au fil de l'épée pour s'être battu comme une fille dans le premier round.”

      Aria et Varius rirent mais Thanos ne trouva pas son commentaire amusant. Qu'ils considèrent ou pas les Tueries comme un jeu, ils devaient le respect aux braves et aux morts.

      “Alors, as-tu vu Brennius ?” demanda Aria en écarquillant ses grands yeux bleus. “En fait, j'avais envisagé de l'acheter mais il m'a regardée d'un air prétentieux alors que je le regardais s'entraîner. Incroyable, non ?” ajouta-t-elle en levant les yeux au ciel et en faisant la tête.

      “Dire qu'il pue comme une mouffette !” ajouta Lucious.

      Tout le monde rit à nouveau, à l'exception de Thanos.

      “Aucun d'entre nous ne l'aurait choisi”, dit Varius. “Il a certes duré plus longtemps que prévu, mais il n'avait aucun style.”

      Thanos ne put se retenir une seconde de plus.

      “Brennius avait le meilleur style dans toute l'arène”, interrompit-il. “Ne parle pas de l'art du combat comme si tu t'y connaissais.”

      Les cousins se turent. Les yeux grands comme des soucoupes, Aria regarda par terre. Varius gonfla la poitrine et croisa les bras d'un air renfrogné. Il se rapprocha de Thanos comme pour le défier et la tension alourdit l'atmosphère.

      “Bon, on s'en moque de ces prétentieux seigneurs de guerre”, dit Aria en s'interposant pour calmer le jeu. Elle fit signe aux garçons de se rapprocher puis murmura : “J'ai entendu une rumeur excentrique. Mon petit doigt m'a dit que le roi veut que quelqu'un de sang royal participe aux Tueries.”

      Ils échangèrent tous un regard gêné et se turent.

      “Peut-être”, dit Lucious, “mais ça ne sera pas moi. Je ne veux pas risquer ma vie pour un jeu stupide.”

      Thanos se savait capable de vaincre la plupart des seigneurs de guerre, mais l'idée de tuer un autre être humain ne l'attirait pas.

      “Tu as peur de mourir, c'est tout”, dit Aria.

      “C'est faux !” répliqua Lucious. “Retire ça !”

      Thanos était à bout. Il s'éloigna.

      Thanos regarda sa lointaine cousine Stephania errer comme si elle cherchait quelqu'un, probablement lui. Quelques semaines auparavant, la Reine avait dit qu'il était prédestiné qu'il épouse Stephania mais Thanos était d'un autre avis. Stephania était aussi gâtée que ses autres cousins et il accepterait de renoncer à son nom, son héritage et même à son épée pour ne pas avoir à l'épouser. Elle était belle à regarder, c'était vrai (elle avait les cheveux dorés, la peau laiteuse et les lèvres rouge sang) mais s'il fallait qu'il l'entende une fois de plus se plaindre de l'injustice de la vie, il pensait qu'il lui faudrait se couper les oreilles.

      Il se précipita vers la périphérie du jardin, vers les rosiers, évitant de regarder les invités dans les yeux, mais, juste au moment où il tournait au coin, Stephania s'avança devant lui et ses yeux marron s'illuminèrent.

      “Bonsoir, Thanos”, dit-elle avec un sourire flamboyant qui aurait fait baver la plupart des garçons locaux, à l'exception de Thanos.

      “Bonsoir

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