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et s'en alla. « Où va-t-il ? » demanda Peter.

      « Oh, il est notre éclaireur » répondit Dom Gianelli. « Il part devant et vérifie que la route est sûre. C'est ce qu'il faisait quand il vous a trouvé hier. »

      Peter hocha la tête. « Ça tombe sous le sens. »

      « C'est un homme bien, Kudjo. Il aurait fait un excellent joueur de foot, je parie. Un receveur naturel, à en juger son apparence. »

      « Je peux me joindre à vous ? » demanda une voix féminine. « Je ne peux pas rater l'occasion de rencontrer un célibataire potable. »

      « Bien sûr. » Gina Gianelli sourit.

      La fille qui prit place à côté de Peter était petite et un peu trapue avec des cheveux bruns et de grands yeux de chiot. Mais son trait le plus caractéristique était sans doute son nez, tellement grand qu'il couvrait une bonne partie de son visage. « Je suis Marcia Konigsburg, vingt-quatre ans et pas mariée. Non pas que je vous considère comme un futur mari, mais autant le dire tout de suite. Je crée des vêtements pour des boutiques et je fais aussi des costumes pour le théâtre. Je suppose que c'est pour ça que Honon m'a demandé de venir. Peu importe où on atterrira, il faudra quelqu'un pour confectionner des vêtements. »

      Peter l'appréciait déjà. Elle était sympathique et avait un certain charme. « J'ai lu votre livre, vous savez. » poursuivit-elle.

      « Alors, c'est vous. »

      « Hé, vous êtes drôle aussi. Ouais, j'ai vraiment été impressionnée. J'étais en deuxième année de fac et je suppose qu'à peu près tout m'impressionnait. David Hume, Aleister Crowley et vous. Vous étiez mes préférés.

      « Nous formons un étrange trio. »

      « Si ça peut vous consoler, mes amis m'ont dit que je n'avais pas de goût. Voilà le genre de gens que je fréquente. Ils sont tous fous. »

      Peter eut soudain une étrange sensation dans la nuque, comme si on l'observait. Il se retourna et aperçut une fille qui l'observait depuis l'une des voitures. Elle était jeune, mince et blonde, arborant un air presque angélique. Lorsqu'il se tourna pour la regarder, elle détourna le regard, feignant de ne pas le voir. Il haussa les épaules et reporta son attention sur la conversation.

      Marcia n'avait même pas remarqué son inattention et était en train de raconter comment elle avait vécu la chute du système éducatif.

      « Et c'était exactement comme vous l'aviez dit. Les cours avaient de moins en moins de rapport avec la réalité car la réalité leur échappait. » Ses mots semblaient presque tout droit sortis du livre, elle devait l'avoir appris par cœur.

      Dom Gianelli fit signe à un homme grand, portant une chemise blanche et un pantalon noir. « Père Tagon », appela-t-il. « Joignez-vous donc à nous ! »

      L'homme en question s'exécuta. « Attendez d'avoir rencontré ce gars », dit Dom à Peter. « Il pourrait provoquer quelques discussions. »

      Le nouveau venu était un homme grand et mince, la trentaine, avec un nez d'aigle, des yeux bruns, un front haut et des cheveux bruns. « Salut », dit-il en se penchant vers Peter pour lui serrer la main. « Je suis Jason Tagon. »

      « Dom vous a appelé « Père » ? »

      « Il aurait aussi pu m'appeler « Docteur ». J'ai un doctorat en astronomie. Mais oui, je suis prêtre. Les titres n'ont plus grande importance de nos jours, alors je préfère qu'on m'appelle Jason. »

      Peter hocha la tête et rangea ce fait dans un coin de sa mémoire qui commençait à être surchargée avec tous ces nouveaux visages et noms. « Dom a mentionné des discussions ? »

      « Il y est allé un peu fort. Je ne peux pas contredire vos prédictions étant donné qu'elles se sont réalisées. C'est votre attitude qui me dérange. »

      « Concernant l’Église Catholique ? »

      Jason sourit. « Ce n'est qu'une petite partie. Vous avez dit – et je vais essayer de citer - 'l’Église Catholique en a fait davantage que n'importe quelle organisation de l'Histoire pour retarder le progrès humain' ».

      « J'espère que vous ne l'avez pas pris de façon trop personnelle. Le fait est que l’Église Catholique existe plus longtemps que n'importe quelle organisation de l'Histoire. Toutes les organisations sont devenues répressives dans une certaine mesure. Elles dépassent un certain point de leur existence où leur fonction devient celle de l'auto-préservation plutôt que celle de garder son but d'origine. Je m'exprimais contre la bureaucratie, non contre les Catholiques en tant qu'individus. »

      « Je sais. Mais les Catholiques sont élevés en croyant que l’Église ne peut pas faire de mal. Mais ce n'était pas toute mon objection. En tant que porte-parole de Dieu, j'ai eu l'impression que vous l'avez omis de vos calculs. »

      « En tant qu'agnostique », répondit Peter, « je ne pouvais m'empêcher de croire que le surnaturel était superflu dans mes calculs. Je me suis surtout penché sur l'écologie sociale. Les lois ont été créées par Dieu – s'Il existe – il y a longtemps et je ne pouvais prévoir des changements dans ces lois une fois que tout avait commencé. Je me suis surtout préoccupé des êtres humains. »

      « Et vous avez ignoré la possibilité d'une intervention divine. »

      « Disons que je n'aurais pas été contre, mais je n'y comptais pas. »

      « Qu'en est-il de la tentative de colonisation interstellaire ? »

      « Si vous essayez de dire qu'il s'agit d'une intervention divine, je ne pourrai pas le contredire. Mais je vous mets au défi de prouver que ce n'était pas uniquement le travail de quelques hommes ingénieux. »

      « Touché », Jason sourit.

      Peter eut une nouvelle fois l'impression d'être observé. Il se retourna et vit la fille blonde le fixer à quelques pas de là. « C'est qui ? » demanda-t-il aux gens autour de lui.

      « C'est Risa Svenson » répondit Marcia. « On l'a recueillie à Monterey. C'est une fille plutôt étrange si vous voulez mon avis. »

      « Étrange ? Dans quelle mesure ? »

      « En gros, elle est juste timide » expliqua le prêtre. « Et puis, elle est jeune. Cela l'incite à se tenir à l'écart des autres. C'est quelqu'un de très gentil. »

      « J'aimerais aller lui parler un peu. Merci d'avoir partagé ce moment avec moi. Jason, j'aimerais poursuivre cette discussion plus tard. »

      Il se leva et s'avança vers la jeune fille qui faisait encore mine de ne pas le voir.

      « Excuse-moi, mais pourquoi tu me fixes ? »

      Elle leva les yeux vers lui, surprise. « Je ne... »

      « Si, tu me fixais. Ça ne me dérange pas vraiment, mais j'aimerais savoir pourquoi. »

      Elle ouvrit la bouche pour sortir une excuse, la referma, puis déclara. « Vous étiez tellement célèbre et je voulais juste vous regarder de plus près. C'est mal ? »

      « Non. En fait, je suis plutôt soulagé de voir que je ne ressemble pas au monstre hideux que tu imaginais. »

      A en juger son expression, Peter savait qu'il avait vu juste. « Je ne pensais pas que vous étiez un monstre », dit-elle.

      « Bien sûr que non. »

      « Mais j'ai entendu tellement de mauvaises choses sur vous. »

      « Tu as lu mon livre ? »

      « Non, j'étais trop petite. Mais j'ai vu une émission sur ça. Je n'ai pas aimé, c'était déprimant et pessimiste. »

      « C'était déprimant et pessimiste. Je ne l'aimais pas non plus. Mais que peut-on faire contre la vérité ? Si on la cache dans un coin, elle finira par ressurgir et te sauter au visage. »

      « C'est....Je

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