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Tableau du climat et du sol des États-Unis d'Amérique. Constantin-François Volney
Читать онлайн.Название Tableau du climat et du sol des États-Unis d'Amérique
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isbn
Автор произведения Constantin-François Volney
Жанр Книги о Путешествиях
Издательство Public Domain
Par conséquent tout le nord de l’Amérique, jusqu’à Long-Island, est une contrée granitique.
Quelques lignes auparavant, M. Mackenzie avait dit que des rochers de la nature de la pierre à chaux, disposés par couches minces, et presque horizontales, d’une pâte assez molle, se voyaient sur la rive Est du lac Dauphin, sur les bords des lacs du Castor, du Cédre, du lac Winipik et du lac Supérieur, ainsi que dans les lits des rivières qui traversent la longue ligne de toutes ces eaux. Il ajoute: «Ce qui est aussi bien remarquable, c’est que dans la partie la plus étroite du lac Winipik, large de deux milles au plus, la rive ouest est bordée de cette même qualité de rochers calcaires; escarpés de 30 pieds d’élévation; tandis que sur la rive opposée, celle d’est, des rochers encore plus hauts, sont du granit mentionné ci-dessus.»
De l’ensemble de ses descriptions que j’abrége, il résulte que la région des mêmes pierres calcaires que nous verrons régner dans tout l’ouest des Alleghanys, s’étend, par une ligne nord-ouest, au delà du lac Michigan, jusqu’aux sources du Mississipi; et de là à celles de la rivière Saskatchiwayne, rejoignant ainsi la grande chaîne des monts Stony ou Chipawas, qui elle-même est un prolongement de la Cordillère des Andes; et il faut remarquer, dit encore M. Mackenzie, «que c’est dans la ligne de contact de ces immenses chaînes de granit et de pierres à chaux, que sont placés tous les grands lacs de l’Amérique du nord.» Fait physique, vraiment digne de l’attention des naturalistes géologues.
Revenant au sud du fleuve Saint-Laurent, le granit tapisse le comté de Steuben jusqu’aux sources de la rivière Mohawk41, dont il accompagne le cours, sans que je puisse assurer qu’il la traverse, excepté à sa petite chute au-dessus de Schenectady. On ne le voit point à sa grande chute appelée Cohoës, dont le lit est de pierre serpentine de la même espèce que j’ai trouvée à Monticello42 en Virginie, espèce très-répandue dans tout le chaînon dit Sud-Ouest; mais il reparaît dès au-dessous d’Albany, sur la rive orientale de l’Hudson, qui coule constamment entre deux côtes raboteuses et couvertes de maigres taillis de chênes et de sapins: à 20 milles au-dessous de Poughkeepsie commencent des sillons transverses, rocailleux et stériles qui m’ont retracé la Corse et le Vivarais; ils brisent la route pendant 25 milles, et de toutes parts ils montrent des blocs de granit grisâtres, disposés par bancs inclinés à l’horizon de 45 à 50 degrés, et couverts de mousses, de sapins et autres arbres verts rabougris. Le fleuve coule au milieu de bancs semblables, jusqu’à West-point, où il a forcé la barrière des rocs que lui opposait le dernier de ces sillons transverses, au pied duquel finissent les High-lands (Terres-hautes), et commencent les Terres-basses ou maritimes.
Dans ce dernier pays, qui règne en plaine jusqu’à New-York, la rive gauche du fleuve ne cesse de montrer des bancs de granit rougeâtre ou grisâtre sortant de terre, de manière à faire penser qu’ils y pénètrent fort avant.
Des recherches minéralogiques, entreprises par une société de médecins de New-York43, constatent que le granit traverse le territoire de cette ville, le fleuve Hudson, la rivière de Harlem, et qu’il s’étend dans tout le premier rang des collines de New-Jersey. La direction de ces bancs, surtout depuis la frontière de Connecticut, est du nord-est au sud-ouest, c’est-à-dire parallèlement à la côte; leur inclinaison est presque verticale à l’horizon, et leur chaîne est jugée se prolonger jusque dans le Vermont. Le docteur Mitchill, voyageur pour cette société, observe, dans le compte qu’il lui a rendu de ces faits (en 1797), que depuis la mer jusqu’à West-point, c’est-à-dire dans les terres basses et d’alluvion maritime, le granit est mêlé de quartz, feld-spath, schorl, mica et grenat, tantôt par grumeaux, tantôt par feuillets; que la région granitique finit brusquement sur la rive de l’Hudson, à l’île Pollepell, en face d’un gros roc de Fish-kill, (20 milles au-dessous de Poughkeepsee), et qu’à la distance de 40 rod (200 mètres) plus loin commence une région schisteuse, qui sort de terre sur la rive du fleuve, comme si elle y servait de lit au granit: il conjecture que ce schiste s’étend jusqu’à Albany, et qu’il sert d’appui à la chute de Cohoës; ce qui ne peut s’admettre qu’autant qu’il appellerait schiste la serpentine dont on m’a remis l’échantillon, et qui elle-même est le lit immédiat de la chute. Ce schiste, ajoute M. Mitchill, sert aussi de lit à des bancs calcaires épars dans le pays: il cite un bloc de ce genre à un mille de Claverac, et à 4 milles du fleuve Hudson et du village du même nom, lequel présente une masse proéminente de 800 acres de surface, remplie de coquillages, sans analogues dans la mer voisine distante de 140 milles, c’est-à-dire de plus de 46 lieues.
M. Mitchill cite d’autres bancs calcaires près de New-York, à l’endroit où les eaux se partagent et versent, les unes dans l’Hudson, et les autres dans le Sound, ou bras de mer en face de Long-Island; il pense qu’à une époque inconnue de l’histoire l’Océan a séjourné sur ce terrain, et son opinion s’étaie de tous les faits qu’il cite sur les montagnes de Catskill.
Il a trouvé ces montagnes de Catskill composées du même grès que Blue-ridge dont il les juge être un prolongement; ce fait fixe de ce côté la limite réciproque des granits et des grès qui composent, comme nous l’allons voir, une seconde région très-étendue. Ces grès à Catskill sont portés sur un lit d’ardoise friable qui, au feu, rend une forte odeur de bitume, et qui présente ses bancs tantôt bouleversés en désordre, et tantôt inclinés à l’horizon, depuis 50 jusqu’à 80 degrés. M. Mitchill crut d’abord ce terrain primitif, parce que les granits et les grès ne contenaient pas de fossiles; mais bientôt plusieurs indications contraires, telles que, 1º l’aspect des rocs formés de gravier, de cailloux, de quartz rouge et blanc, de jaspe roux et de grès, tous évidemment roulés et triturés par les eaux; 2º les couches horizontales et très-régulières de ces rocs; 3º les coquilles fossiles, inconnues dans ces mers (excepté le clam et le scolop), et trouvées sur leurs cimes dans un terrain d’argile et de cailloux; tous ces faits l’ont déterminé à voir, dans cette disposition de terrain, trois grandes époques de formation: la 1re époque, celle qui plaça les sables; la 2e, celle des eaux qui les roulèrent et les triturèrent;
40
Voyages d’Alexandre Mackenzie dans l’intérieur de l’Amérique du nord, traduits par Gastera, 3 vol. in-8º.
41
Il paraît que le lit de la Mohawk sépare la contrée granitique de la contrée des grès.
42
Habitation de M. Jefferson en Virginie, sur le chaînon appelé
43
Voyez Medical repository, tome 1er, nº 3, imprimé à New-York, 1797.