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Le Bossu Volume 3. Féval Paul
Читать онлайн.Название Le Bossu Volume 3
Год выпуска 0
isbn
Автор произведения Féval Paul
Жанр Зарубежная классика
Издательство Public Domain
»Quand mon ami Henri cessa de lutter, je le crus mort. Je demandai à Dieu ardemment de mourir.
»Un des hommes à manteaux jeta une lourde bourse au milieu du cercle.
» – Finissez-en, et vous aurez le double! dit-il.
»Je ne reconnus point la voix de cet homme.
»Le chef des bohémiens répondit:
» – Il faut le temps et la distance… douze heures et douze milles… la mort ne peut être donnée ni au même lieu ni le même jour que l'hospitalité.
» – Momeries que tout cela! fit l'homme en haussant les épaules; – en besogne! ou laissez-nous faire!
»En même temps, il s'avança vers Henri gisant sur la terre. Le bohémien se mit au-devant de lui.
– Tant que douze heures ne seront pas écoulées, prononça-t-il résolûment, – tant que douze milles ne seront pas franchis, nous défendrons notre hôte, fût-ce contre le roi!
»Singulière foi! étrange honneur! Tous les gitanos se rangèrent autour d'Henri.
»J'entendis Flor qui murmurait à mon oreille:
» – Je vous sauverai tous deux, ou je mourrai!..
»… C'était vers le milieu de la nuit. On m'avait couchée sur un sac de toile plein de mousse desséchée, dans la tente du chef, qui dormait non loin de moi.
»Il avait auprès de lui son escopette d'un côté, son cimeterre de l'autre.
»Je voyais, à la lueur de la lampe allumée, ses yeux, dont les paupières demi ouvertes semblaient avoir des regards, même dans le sommeil.
»Aux pieds du chef, un gitano était blotti comme un chien et ronflait.
»J'ignorais où l'on avait mis mon ami Henri, et Dieu sait que je n'avais garde de fermer les yeux!
»J'étais sous la surveillance d'une vieille bohémienne, faisant près de moi l'office de geôlière. Elle s'était couchée en travers, la tête sur mon épaule, et, par surcroît de précaution, elle tenait en dormant ma main droite entre les siennes.
»Ce n'était pas tout. Au dehors, j'entendais le pas régulier de deux sentinelles.
»L'horloge à sable marquait une heure après minuit, lorsque j'entendis un bruit léger vers l'entrée de la tente.
»Je me tournai pour voir. Ce simple mouvement fit ouvrir les yeux de ma duègne noire. Elle s'éveilla à demi en grondant.
»Je ne vis rien, et le bruit cessa.
»Seulement, je n'entendis bientôt plus qu'un seul pas de sentinelle. – Au bout d'un quart d'heure, l'autre sentinelle cessa aussi de se promener.
»Un silence complet régnait autour de la tente.
»Je vis la toile osciller entre deux piquets, – puis se soulever lentement, – puis un visage espiègle et souriant apparaître.
»C'était Flor. – Elle me fit un petit signe de tête, – elle n'avait pas peur.
»Son corps souple et fluet passa après sa tête. – Quand elle se mit sur ses pieds, ses beaux yeux noirs triomphaient.
» – Le plus fort est fait! prononça-t-elle des lèvres seulement.
»Je n'avais pu retenir un léger mouvement de surprise, et ma duègne s'était encore éveillée.
»Flor resta deux ou trois minutes immobile, un doigt sur la bouche.
»La duègne était rendormie. – Je pensais:
» – Il faudrait être fée pour dégager mon épaule et ma main!
»J'avais bien raison. – Mais ma petite Flor était fée.
»Elle fit un pas bien doucement, puis deux. Elle ne venait point à moi, elle allait vers la natte où dormait le chef, entre son sabre et son escopette.
»Elle se plaça devant lui et le regarda un instant fixement. La respiration du chef devint plus tranquille. – Flor se pencha sur lui, au bout de quelques secondes, et appuya légèrement l'index et le pouce contre ses tempes. – Les paupières du chef se fermèrent.
»Elle me regarda, et ses yeux petillaient comme deux gerbes d'étincelles.
» – Et d'un! fit-elle.
»Le gitano ronflait toujours, la tête sur ses genoux.
»Elle lui posa la main sur le front, tandis que son regard impérieux le couvrait. – Peu à peu, les jambes du gitano s'allongèrent et sa tête renversée alla toucher le sol. – Vous eussiez dit un mort.
»J'ai vu cela, ma mère, je l'ai vu de mes yeux, et j'étais bien éveillée puisque je craignais pour la vie de mon ami Henri!
»Flor riait, le charmant petit démon!
» – Et de deux! dit-elle.
»Restait ma terrible duègne. – Flor prit avec elle plus de précautions.
»Elle s'approcha lentement, lentement, la couvrant du regard comme le serpent qui veut fasciner l'oiseau. Quand elle fut à portée, elle étendit une seule main qu'elle tint suspendue à la hauteur des yeux de l'Égyptienne. – Je sentais celle-ci tressaillir intérieurement.
»A ce moment, elle fit effort pour se dresser. Flor dit:
» – Je ne veux pas!
»La vieille poussa un grand soupir.
»La main de Flor descendit lentement du front à l'estomac et s'y arrêta. – Un de ses doigts faisait la pointe et semblait émettre je ne sais quel fluide mystérieux.
»Je sentais, moi-même, à travers le corps de la duègne l'influence étrange de ce fluide. – Mes paupières voulaient se fermer.
« – Reste éveillée! me commanda Flor avec un coup d'œil de reine.
»Les ombres qui voltigeaient déjà autour de mes yeux disparurent.
»Mais je croyais rêver.
»La main de Flor se releva, glissa une seconde fois au-dessus du front de la vieille bohémienne, et revint pointer entre ses deux yeux. Tout son corps s'affaissa. Je la sentis plus lourde.
»Flor était droite, grave, impérieuse. Sa main descendit encore pour se relever de nouveau. Au bout de deux ou trois minutes, elle se rapprocha et fit comme un mouvement de brusque aspersion au-dessus du crâne de la vieille.
»Ce crâne était de plomb.
» – Dors-tu, Mabel? demanda-t-elle tout bas.
» – Oui, je dors, répondit la vieille.
»Mon premier mouvement fut de croire à une comédie.
»Avant de regagner le campement, Flor avait pris de mes cheveux et de ceux d'Henri pour les mettre dans un petit médaillon qu'elle portait au cou.
»Elle ouvrit le médaillon et plaça les cheveux d'Henri dans la main inerte de la vieille.
» – Je veux savoir où il est, dit-elle encore.
»La vieille s'agita et gronda. – J'eus crainte de la voir s'éveiller. – Flor la poussa du pied rudement comme pour me prouver la profondeur de son sommeil.
»Puis elle répéta:
» – Entends-tu, Mabel! je veux savoir où il est!
» – J'entends, repartit la bohémienne; je le cherche… Quel est donc ce lieu?.. une grotte?.. un souterrain?.. Il n'y a personne autour de lui… il est couché… On l'a dépouillé de son manteau… et de son pourpoint… Ah! s'interrompit-elle frissonnant, – je vois ce que c'est, c'est une tombe!
»Tous mes pores rendirent une sueur glacée.
» – Il vit, cependant? interrogea Flor.
» – Il vit, répliqua