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est mort hier matin. C'est une perte aussi grande que soudaine. Sa santé était chancelante, mais ne donnait pas lieu de craindre une attaque aussi fatale. Il est tombé, et n'a plus parlé depuis, je crois. Je vois que Perry attribue sa mort à Drury-Lane, opinion très-encourageante, et d'une grande consolation pour le nouveau comité. Je n'ai pas de doute que ***, qui est d'un tempérament apoplectique, ne se fasse saigner de suite, et comme j'ai moi-même, depuis mon mariage, perdu en grande partie ma pâleur, et, horresco referens (car je hais jusqu'à un modeste embonpoint) cette heureuse maigreur à laquelle j'étais parvenu lorsque je fis votre connaissance, cet arrêt du Morning-Chronicle ne me laisse pas sans inquiétude. Tout le monde doit regretter Whitbread. C'était assurément un homme supérieur, et un excellent homme.

      »Paris est pris pour la seconde fois. Je présume qu'à l'avenir cela lui arrivera tous les ans. J'ai, ainsi que tout le monde, perdu un parent dans les derniers combats. C'est le pauvre Frédéric Howard, le meilleur de sa race. Je n'avais, depuis quelques années, que fort peu de relations avec sa famille; mais je n'ai jamais vu ou entendu dire que du bien de lui. Le frère d'Hobhouse a été tué; – bref la mort n'a pas épargné une seule famille.

      »Tout espoir d'une république est évanoui, et nous continuerons de vivre sous le vieux système; mais je suis profondément las de la politique et du carnage, et le bonheur dont la Providence s'est plue à combler lord *** ne fait que prouver le peu de valeur que les dieux attachent à la prospérité, puisqu'ils ont permis à un… tel que lui, et à ce vieil ivrogne de Blucher, de battre des hommes qui valent mieux qu'eux. Wellington, cependant, mérite une exception: celui-là est un homme et le Scipion de notre Annibal; ce qui n'empêche pas qu'il doit rendre grâce aux glaces de la Russie, qui ont détruit la véritable élite de l'armée française pour le faire vaincre à Waterloo.

      »Bon Dieu, Moore, comme vous blasphémez «le Parnasse et Moïse!» en vérité, vous me faites honte. Ne ferez-vous rien pour l'art dramatique? – Nous vous demandons en grâce un opéra. La méprise de Kinnaird a été en partie la mienne. Je voulais à toute force que vous fussiez du comité et lui aussi; mais nous sommes bien aises maintenant que vous ayez été plus sage que nous, car je commence à soupçonner que c'est une fâcheuse affaire.

      »Quand vous verra-t-on en Angleterre? Sir Ralph Noël (ci-devant Milbank, et il ne paraît pas disposé à ensevelir de sitôt le nom de Noël avec lui) s'étant aperçu qu'un homme ne pouvait pas habiter deux maisons, m'a donné sa terre, située dans le nord, pour en faire ma résidence, et c'est là que lady B. menace d'accoucher en novembre. Sir R. et madame ma belle-mère établiront leurs quartiers à Kirby, qui appartenait jadis à lord Wentworth. Peut-être viendrez-vous avec Mrs. Moore nous rendre une visite cet automne. Dans ce cas, vous et moi (sans nos femmes), prendrons notre vol vers Édimbourg, pour aller embrasser Jeffrey. Ce n'est pas à beaucoup plus de cent milles de chez nous. Mais nous causerons de ceci, et d'autres affaires importantes, à notre première entrevue, qui aura lieu, je l'espère, sitôt votre retour. Nous ne quittons Londres qu'au mois d'août.

      »Tout à vous.»

      LETTRE CCXXIV

A M. SOTHEBY

      15 septembre 1815, Piccadilly Terrace.

      CHER MONSIEUR,

      «Ivan est accepté, et sera mis à l'étude aussitôt l'arrivée de Kean.

      »Les acteurs sont pleins de confiance dans le succès de la pièce. Je ne sache pas qu'il soit nécessaire d'y faire des changemens pour la représentation; mais, dans le cas où il en faudrait, cela se réduirait à peu de chose, et vous en seriez averti à tems. Je vous conseillerais de n'assister qu'aux dernières répétitions, les directeurs, du moins, m'ont chargé de vous donner cet avis. Vous pouvez les voir, c'est-à-dire Dibdin et Rae, quand bon vous semblera, et en attendant je ferai tout ce que vous jugerez convenable de suggérer.

      »Mrs Mardyn n'a pas encore paru, et l'on ne peut rien décider avant son premier début, c'est-à-dire, quant à sa capacité pour le rôle dont vous parlez, et qui, sans aucun doute, n'est pas dans Ivan, Ivan me paraissant pouvoir être très-bien joué sans elle. Mais nous en reparlerons plus tard.

      »Votre très-sincèrement dévoué.» BYRON.

      »P.S. Vous serez sans doute bien aise d'apprendre que la saison a commencé d'une manière brillante. – La salle est constamment pleine; les recettes excellentes, – les acteurs en très-bonne harmonie avec le comité, ainsi qu'entre eux. – Enfin, il y règne autant d'intelligence qu'il est possible d'en entretenir dans une administration aussi compliquée et aussi étendue que celle de Drury-Lane.

A M. SOTHEBY

      25 septembre 1815.

      CHER MONSIEUR,

      «Je crois qu'il vous sera utile de voir les acteurs et directeurs aussitôt que vous le pourrez, car il y a des points sur lesquels vous devez avoir besoin de conférer avec eux. L'observation que je vous ai rapportée vient du côté des acteurs; elle est générale et non particulière à cette circonstance. J'ai cru bien faire en vous la communiquant de suite; cela ne vous empêchera pas sans doute de voir quelques-unes des répétitions.

      »Je serais tenté de croire que Rae a jeté son dévolu sur le rôle de Naritzin. C'est un acteur plus en faveur que Bartley, et certainement il donnera plus de force au caractère. D'ailleurs, c'est un des directeurs, et il portera plus d'intérêt à la pièce, s'il peut y jouer doublement un rôle. Mrs. Bartley représentera Petrowna; quant à l'impératrice, je ne sais qu'en penser et qu'en dire. La vérité est que nous ne sommes pas très-bien pourvus d'actrices tragiques, mais choisissez ce que nous avons de mieux, et tirez-en le meilleur parti possible. Nous avons tous beaucoup d'espoir que la pièce réussira, et mettant à part toute autre considération, nous le désirons ardemment, cette tragédie étant la première qu'on aura représentée à Drury-Lane, depuis l'ancien comité.

»A propos, j'ai un procès à vous faire, et comme le grand M. Dennis, qui s'écria dans une semblable occasion: «De par Dieu, vous m'avez pris mon tonnerre,» je m'écrierai, moi: «Voici mon éclair!» dans la scène entre Petrowna et l'impératrice, où se trouve une pensée semblable à celle de Conrad dans le troisième chant du Corsaire, et exprimée presque de la même manière. Ce que j'en dis, cependant, n'est pas pour vous accuser, mais pour me justifier moi-même de tout soupçon de plagiat, mon poème ayant été publié six mois avant que vos tragédies n'eussent paru 8.

Note 8: (retour) Malgré cette précaution du poète, l'analogie qui existe entre ces deux passages fut citée quelques années après d'une manière triomphante, à l'appui d'une accusation de plagiat portée contre lui par quelques écrivailleurs; voici les vers de M. Sotheby.

      «Je me suis élancé avec transport de la pierre qui me sert de couche, pour saluer le tonnerre éclatant au-dessus de ma tête, et accueillir l'éclair dont la lueur jaillissante faisait étinceler mes fers.»(Note de Moore.)

      »Georges Lambe avait l'intention de vous écrire. Si vous ne voulez pas avoir maintenant de conférence avec les directeurs, indiquez-moi ce que vous désirez qu'on fasse, et j'aurai soin que cela soit exécuté.

      »Votre très-sincèrement dévoué.» BYRON.

      LETTRE CCXXV

A M. TAYLOR

      13 Piccadilly Terrace, 25 sept. 1815.

      CHER MONSIEUR,

«Je suis très-fâché que vous vous affectiez d'une circonstance 9 dont je ne me tourmente nullement. Il m'est fort indifférent, si cela amuse votre journaliste, ses correspondans et ses lecteurs, d'être le sujet de toutes les chansons qu'il peut insérer dans sa feuille, pourvu, toutefois, que, dans les produits de ses veilles, il ne soit question que de moi.

Note 9: (retour) M. Taylor ayant inséré dans le Soleil (dont il était alors principal propriétaire) un sonnet adressé à lord Byron, en retour du présent que le noble lord lui avait fait d'un exemplaire de ses œuvres

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