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Ma conversion; ou le libertin de qualité. Honoré-Gabriel de Riqueti Mirabeau
Читать онлайн.Название Ma conversion; ou le libertin de qualité
Год выпуска 0
isbn
Автор произведения Honoré-Gabriel de Riqueti Mirabeau
Жанр Эротика, Секс
Издательство Public Domain
J'ai aperçu des chuchotages de la présidente à sa femme de chambre, des allées, des venues: c'est que l'on a conté tout cela à madame; que madame a fait répéter tout cela à mon bandit, et que sur-le-champ elle lui a remis cinq cents louis. – Douze mille francs? – En or, vous dis-je, pour aller tout dégager et fournir le supplément…
Quand je sors, je retrouve mon fourbe dans mon carrosse, et nous portons le magot en triomphe chez moi. – Comment! tout cela n'était pas vrai? – Mais d'où diable viens-tu donc? C'est incroyable! tu ne te formes point; mais aiguise donc ton intelligence.
Le lendemain, à sept heures, en déshabillé leste, je cours chez la présidente; une joie douce brille dans ses yeux; j'ai son diamant au doigt… Je veux la faire parler (car vous noterez que, sous peine de la vie, mon laquais ne doit m'avoir rien avoué), elle me fait un mensonge avec toute l'adresse, toute la noblesse de la générosité; mais elle voit bien, à la vivacité de mes caresses, que la reconnaissance les enflamme et que je ne suis pas sa dupe. Un peu remis de mes transports, je parle de bienfaits; on m'impose silence, en me disant que si l'on avait été assez heureuse pour me rendre un service, j'en ôterais tout l'agrément.
Dieu! comme ma voix est touchante!
Comment, monstre! tant d'amour et de générosité ne te touche pas? Si fait pardieu! et pour lui montrer ma gratitude (un peu aussi pour m'en débarrasser), je la marie avec un homme de ma connaissance qui la rend la femme la plus heureuse de Paris. D'amants que nous étions, nous devenons amis, et je vole, non pas à de nouveaux lauriers, mais à de nouvelles bourses.
Dégoûté de l'amour parfait, de la jouissance méthodique de la dévote et de la présidente, je languissais tristement, quand mon bon ange me conduisit chez Madame Saint-Just (fameuse maquerelle pour les parties fines, rue Tiquetonne); je lui annonce que je suis vacant et surtout que le diable est dans ma bourse; elle me présente sa liste; parcourons-la:
1 Mme La Baronne de Conbâille… Foutre! voilà un beau nom. Qui est-ce que cette femme-là? – C'est une petite provinciale qui est venue à Paris dépenser cinquante ou soixante mille francs qu'elle amassait depuis dix ans. – En reste-t-il encore beaucoup? – Non. – Passons; pourquoi cette bougresse-là s'avise-t-elle de prendre un nom de cour?
2 Mme de Culsouple. – Combien donne-t-elle? – Vingt louis par séance. – Paie-t-elle d'avance? – Jamais, et puis ce n'est pas votre affaire: elle est trop large.
3 Mme de Fortendiable. – Tenez, voilà ce qu'il vous faut. C'est une américaine, riche comme Crésus; et si vous la contentez, il n'y a rien qu'elle ne fasse pour vous. – Eh bien! tu me présenteras. – Demain, si vous voulez. – Ici? – Dans son hôtel même. – Ce nom-là a quelque chose d'infernal qui me divertit. – Je rends la liste, quand, d'un air de mystère, la bonne Saint-Just m'adresse cette exhortation: "Mon cher ami, vous avez beaucoup vu de jeunesses: qu'y avez-vous gagné? la vérole. Pourquoi ne pas écouter les conseils de la sagesse? J'ai dans ma maison une vraie fortune, une vieille. – Le diable te foute! – Eh! que votre souhait s'accomplisse! Encore mieux vaut lui que rien; mais il ne s'agit pas de cela, je vous parle d'un trésor: fiez-vous à moi, et nous la plumerons. – Allons, je le veux bien: je m'en rapporte à ta prudence." En attendant, je me rends le lendemain, à sept heures du soir, chez mon américaine. Je trouve de la magnificence, un gros luxe, beaucoup d'or placé sans goût, des ballots de café, des essais de sucre, des factures, enfin un goût de mariné que je n'ai, sacredieu! que trop reconnu dans mainte occasion.
Ce qui me tourmentait était d'entendre, dans un cabinet voisin, une voix d'homme dont les gros éclats me mettaient en souci; enfin, la porte s'ouvre: qui serait-ce? ma déesse… Mais, foutre! quelle femme!
Imaginez-vous un colosse de cinq pieds six pouces; des cheveux noirs et crépus ombragent un front court, deux larges sourcils donnent plus de dureté à des yeux ardents, sa bouche est vaste; une espèce de moustache s'élève contre un nez barbouillé de tabac d'Espagne; ses bras, ses pieds, tout cela est d'une forme hommasse, et c'est sa voix que je prenais pour celle du mari.
– Foutre! dit-elle à la Saint-Just, où as-tu pêché ce joli enfant? Il est tout jeune; mais qu'il est petit! N'importe, petit homme, belle queue… Pour faire connaissance, elle m'embrasse à m'étouffer. – Sacredieu! il est timide! Oh! c'est un garçon tout neuf. Nous le ferons… Mais est-ce que tu es muet? – Madame, lui dis-je, le respect… (j'étais abasourdi.) – Eh! tu te fous de moi avec ton respect… Adieu, Saint-Just. Ca, ça, je garde mon fouteur: nous soupons et couchons ensemble.
Nous restons seuls, ma belle se plonge sur un sopha; sans m'amuser à la bagatelle, je saute dessus; dans un tour de main, la voilà au pillage. Je trouve une gorge d'un rouge-brun, mais dure comme marbre, un corps superbe, une motte en dôme, et la plus belle perruque… Pendant la visite, ma belle soupirait comme un beugle; semblable à la cavale en furie, son cul battait l'appel et son con la chamade… Sacredieu! une sainte fureur me transporte; je la saisis d'un bras vigoureux, je la fixe un moment, je me précipite… O prodige!… Ma bougresse est étroite… En deux coups de reins, j'enfonce jusqu'aux couillons… Je la mords… Elle me déchire… Le sang coule… Tantôt dessus, tantôt dessous, le sopha crie, se brise, tombe… La bête est à bas; mais je reste en selle; je la presse à coups redoublés… Va, mon ami… va… foutre!… ah!… ah!… va fort… ah!… bougre!… ah!… que tu fais bien ça! Ah! Ah! Ah!… sacredieu! ne m'abandonne pas… ho, ho, ho, encore… encore!… v'là que ça vient… à moi, à moi… enfonce… enfonce!…
Sacrée bougresse! son jeanfoutre de cul, qui va comme la grêle, m'a fait déconner… Je cours après… mon vit brûle… Je la rattrape par le chignon (ce n'est pas celui du cou), je rentre en vainqueur. – Ah! dit-elle, je me meurs. – Foutue gueuse (je grince des dents!…) si tu ne me laisses pas décharger, je t'étrangle… Enfin, haletante, ses yeux s'amollissent; elle demande grâce. – Non, foutre!… point de quartier… Je pique des deux… ventre à terre… Mes couilles en fureur font feu; elle se pâme… Je m'en fous, et je ne la quitte que quand nous déchargeons tous deux le foutre et le sang ensemble…
Il est temps, je crois, de remettre sa culotte.
Un peu rendus à nous-mêmes, ma housarde me félicite en se congratulant; elle va faire bidet, et moi je relève le sopha du mieux que je puis. – Que fais-tu là? me dit-elle en rentrant. Mon ami, mes gens sont accoutumés à cela, et j'ai un valet de chambre tapissier qui fait la revue tous les matins. – Vous pensez bien que nous ne parlons pas sentiment. Est-ce qu'elle s'embarrasse de ces foutaises-là! Nous voyons sa maison, son magasin, qui est de l'or en barre; les trésors des trois parties du monde s'y rassemblent… Enfin, nous arrivons dans un cabinet; elle ouvre un coffre… Tiens, me dit-elle, prends ce portefeuille… (Je fais des façons…) Allons, foutre! quand on bande comme toi, on a le moyen d'acquitter ces bagatelles… Je le mets dans ma poche, non sans avoir remarqué qu'il contient pour cinq cents louis de bonnes lettres de change… Voilà ce qui s'appelle des douceurs.
Nous soupons: ma foi, j'en avais besoin. C'est elle qui me sert des morilles, des truffes au coulis de jambon, des champignons à la marseillaise; au dessert, les pastilles les plus échauffantes, sans oublier les liqueurs de Mme Anfou… De la table nous nous élançons au lit, et de la vie, je crois, on n'a vu pareille scène.
Rendez-vous pris au surlendemain, j'arrive… Madame est malade. Hélas! Et c'est tout simple; elle avait excessivement chaud quelque chose que j'aie dit, elle a voulu que j'ouvrisse la fenêtre au mois de janvier. Une fluxion de poitrine l'enterre en trois jours… O douleur!… Je vais lui dire un de profundis chez la Saint-Just.
Après avoir essuyé ses larmes et ses doléances (car elle me proteste que ma princesse était une de ses meilleures pratiques), je l'assure que, très touché de cet accident funeste, j'ai fait des réflexions, et qu'ayant toujours honoré la vieillesse, je viens lui