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et le mauvais goût de passages pareils, mais il est intéressant de constater que les faits historiques sont trop forts même pour M. Mahaffy.

      En dépit de ses propos narquois sur ce qu'a de provincial le sentiment national, de ses vagues panégyriques en faveur d'une culture cosmopolite, il est forcé de reconnaître que s'il est vrai que le patriotisme puisse être remplacé chez certains individus par une solidarité plus vaste, les sociétés humaines n'y renonceront que pour leur substituer des motifs plus bas.

      Et il ne peut s'empêcher d'exprimer son regret que les classes supérieures des états grecs fussent dépourvues d'esprit public au point «de gaspiller en un paresseux absentéisme, en une résidence plus négligente encore, le temps et les ressources qui lui avaient été donnés pour que leur pays en profitât» et qu'elles n'eussent aucune conscience de la possibilité pour elles de fonder un Empire hellénique fédéral.

      Lors même qu'il en vient à parler de l'art, il ne peut faire autrement que d'avouer que l'œuvre la plus noble de la sculpture datant de cette époque fut celle qui exprimait l'esprit de la première grande lutte nationale, l'expulsion des hordes gauloises qui inondèrent la Grèce en 278 avant J.C. et que c'est au sentiment patriotique éveillé par cette crise, que nous devons l'Apollon du Belvédère, l'Artémis du Vatican, le Gaulois mourant, et les plus beaux chefs-d'œuvre de l'École de Pergame.

      Quand il s'agit de littérature, M. Mahaffy se répand de nouveau en bruyantes lamentations sur ce qu'il regarde comme des tendances sociales superficielles de la Comédie Nouvelle. Il regrette la belle liberté d'Aristophane, avec son intense patriotisme, l'intérêt vital qu'il prend à la politique, ses larges tableaux, et le plaisir que lui donne une vigoureuse vie nationale.

      Il avoue la décadence de l'éloquence sous l'action desséchante du régime impérial et la stérilité de ces recherches pédantes de style, qui sont l'inévitable résultat de l'absence de sujets vitaux.

      A vrai dire, M. Mahaffy, dans la dernière page de son histoire, rétracte formellement la plupart de ses préjugés politiques.

      Il persiste à penser que Démosthène aurait dû être mis à mort pour sa résistance à l'invasion macédonienne, mais il admet que le gouvernement impérial de Rome, qui suivit le gouvernement impérial d'Alexandre, produisit des maux sans nombre, et tout d'abord la décadence intellectuelle, pour finir par la ruine financière.

      «Le contact de Rome, dit-il, engourdit la Grèce et l'Égypte, la Syrie et l'Asie-Mineure, et s'il existe de grands édifices qui attestent la grandeur de l'Empire, où sont les indices de vigueur intellectuelle et morale, si nous en exceptons cette citadelle de la nationalité, le petit pays de Palestine?»

      Cette palinodie a, sans contredit, pour but de donner à l'ouvrage une apparence plausible de sincérité, mais un tel repentir de la dernière heure vient trop tard et inflige à toute la partie historique qui le précède un air de sottise et non de loyauté.

      C'est avec soulagement qu'on passe aux quelques chapitres où M. Mahaffy traite expressément de la vie sociale et de la pensée des Grecs.

      Ici la lecture de M. Mahaffy est vraiment fort agréable.

      Sa description des Écoles d'Athènes et d'Alexandrie, par exemple, est extrêmement intéressante.

      Il en est de même de son appréciation des écoles de Zénon, d'Épicure et de Pyrrhon.

      Excellent aussi, à bien des points de vue, le tableau de la littérature et de l'art de cette période.

      Nous ne sommes pas d'accord avec M. Mahaffy dans son panégyrique du Laocoon, et nous sommes surpris de trouver un écrivain, qui après s'être indigné vivement de ce qu'il appelle l'indifférence des modernes à l'égard de la poésie alexandrine, vienne déclarer gravement qu' «il n'est pas d'étude plus fatigante, plus stérile que celle de l'Anthologie grecque».

      L'appréciation de la Comédie Nouvelle nous paraît également assez pédantesque.

      Le but de la comédie sociale, chez Ménandre, non moins que chez Sheridan, est de refléter les mœurs de son temps et non point de les réformer, et la censure du Puritain, qu'elle soit sincère ou affectée, est toujours déplacée dans la critique littéraire, et prouve qu'on est dépourvu du sentiment de la différence essentielle entre l'art et la vie.

      Après tout, le Philistin seul aura l'idée de blâmer Jack Absolute de sa tromperie, Bob Acres de sa couardise, et Charles Surface de son extravagance, et c'est perdre à peu près son temps que donner carrière à son sens moral aux dépens de son appréciation artistique.

      De plus, quelque prix qu'on attache à la modernité de l'expression, et avec raison sans doute, il faut encore en user avec tact et jugement.

      On ne reprochera point à M. Mahaffy d'avoir dépeint Philopœmen comme le Garibaldi, Antigone Doson, comme le Victor-Emmanuel de leur siècle.

      Des comparaisons de cette sorte ont évidemment quelque valeur auprès du vulgaire facile à contenter.

      Mais ailleurs, une expression telle que: «le Préraphaélitisme Grec» est assez maladroite.

      On ne gagne pas grand'chose à introduire de force une allusion au John Inglesant de M. Shorthouse dans une analyse des Argonautiques d'Apollonius de Rhodes, et lorsqu'on nous apprend que le superbe Pavillon construit à Alexandrie par Ptolémée Philadelphe était une «sorte de Restaurant Holborn dans de vastes proportions» nous devons dire que la description détaillée qu'Athénée nous donne de cet édifice aurait pu être condensée dans une épigramme meilleure et plus intelligible.

      Malgré tout, le livre de M. Mahaffy aura peut-être pour résultat d'attirer l'attention sur une période fort importante et fort intéressante de l'histoire de l'Hellénisme.

      Nous ne pouvons que regretter qu'après avoir gâté son exposé de la politique grecque par une sotte partialité, l'historien ait affaibli encore la valeur de quelques-unes de ses remarques sur la littérature par un parti-pris tout aussi inexplicable.

      C'est tenir un langage lourdaud et âpre que de dire que «l'écolier retraité qui occupe des postes de sociétaire et des chaires de professeur dans les collèges anglais» ne sait peut-être rien sur la période en question, si ce n'est ce qu'il lit dans Théocrite, ou qu'on peut regarder en Angleterre comme un «professeur distingué de grec», l'homme qui ne connaît pas une seule date de l'histoire grecque entre la mort d'Alexandre et la bataille de Cynocéphales.

      L'assertion, d'après laquelle Lucien, Plutarque et les quatre Évangiles seraient exclus des études dans les écoles et les Universités anglaises par la pédanterie de «purs lettrés, à qui il plaît de se donner pour tels», est naturellement tout à fait inexacte.

      En fait, non seulement M. Mahaffy est dépourvu de l'esprit qui anime le véritable historien, mais il semble souvent manquer entièrement du tempérament du véritable lettré.

      Il est habile, et parfois même brillant par endroits, mais il manque de bon sens, de modération, de style et de charme.

      Il semble n'avoir point le sens de la proportion littéraire, et en général il gâte sa thèse en l'exagérant.

      Avec toute sa passion pour l'impérialisme, il y a chez M. Mahaffy un certain esprit, sinon de clocher, du moins de province, et nous ne saurions dire que ce dernier ouvrage doive ajouter à sa réputation, soit comme historien, soit comme critique, soit comme homme de goût.

       Fin de l'Odyssée de M. Morris 12

      Le second volume de M. Morris amène la grande épopée romantique grecque à son parfait achèvement, et bien qu'il ne puisse jamais y avoir une traduction définitive soit de l'Iliade, soit de l'Odyssée, parce que chaque siècle prendra certainement plaisir à rendre les deux poèmes à sa manière, et conformément à ses propres canons de goût, ce n'est pas trop dire que d'affirmer que la traduction de M. Morris sera toujours une œuvre vraiment classique parmi nos traductions classiques.

      Sans doute elle n'est pas dépourvue de taches.

      Dans

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<p>12</p>

Pall Mall Gazette. 24 novembre 1887.