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Quentin Durward. Вальтер Скотт
Читать онлайн.Название Quentin Durward
Год выпуска 0
isbn
Автор произведения Вальтер Скотт
Издательство Public Domain
Il fit la même question à une troupe de vignerons qu'il rencontra ensuite, et ceux-ci, pour toute réponse, lui demandèrent s'il voulait parler de maître Pierre le maître d'école, ou de maître Pierre le charpentier ou de maître Pierre le bedeau, ou de cinq à six autres maîtres Pierre. Les renseignemens qu'il obtint sur tous ces maîtres Pierre ne convenant nullement à celui qu'il cherchait, les paysans l'accusèrent d'être un impertinent qui ne voulait que se moquer d'eux; et ils montraient même quelques dispositions à passer à des voies de fait contre lui pour le payer de ses railleries; mais le plus âgé, qui paraissait avoir quelque influence sur les autres, les engagea à ne se permettre aucun acte de violence.
– Est-ce que vous ne voyez pas à son accent et à son bonnet de fou, que c'est un de ces charlatans étrangers que les uns appellent magiciens ou sorciers, et les autres jongleurs? Et qui sait les tours qu'ils ont à nous jouer? On m'en a cité un qui avait payé un liard à un pauvre homme pour manger tout son saoul du raisin dans son vignoble, et il en a mangé plus de la charge d'une charrette, sans défaire tant seulement un bouton de sa jaquette. Ainsi, laissons-le passer tranquillement; allons-nous en, lui de son côté, et nous du nôtre. Et vous, l'ami, de crainte de pire, passez votre chemin, au nom de Dieu, de Notre-Dame de Marmoutiers et de saint Martin de Tours, et ne nous ennuyez plus de votre maître Pierre, qui, pour ce que nous en savons, peut bien n'être qu'un autre nom pour désigner le diable.
Le jeune Écossais, ne se trouvant pas le plus fort, jugea que ce qu'il avait de mieux à faire était de continuer sa marche sans rien répondre. Mais les paysans, qui s'étaient d'abord éloignés de lui avec une sorte d'horreur que leur inspiraient les talens qu'ils lui supposaient pour la sorcellerie et pour dévorer leurs raisins, reprirent courage quand ils se trouvèrent à une certaine distance; ils s'arrêtèrent, poussèrent de grands cris, le chargèrent de malédictions, et finirent par lancer contre lui une grêle de pierres, quoiqu'ils fussent trop loin pour pouvoir atteindre ou du moins blesser l'objet de leur courroux. Quentin, tout en continuant son chemin, commença à croire à son tour qu'il était sous l'influence d'un charme, ou que les paysans de la Touraine étaient les plus stupides, les plus brutaux et les plus inhospitaliers de toute la France. Ce qui lui arriva quelques instans après tendit à le confirmer dans cette opinion.
Une petite éminence s'élevait sur les rives de la magnifique et rapide rivière dont nous avons déjà parlé plus d'une fois; et précisément en face de son chemin, Durward aperçut deux ou trois grands châtaigniers si heureusement placés, qu'ils formaient un groupe remarquable. À quelques pas, trois ou quatre paysans immobiles levaient les yeux, et semblaient les fixer sur les branches de l'arbre le plus près d'eux. Les méditations de la jeunesse sont rarement assez profondes pour ne pas céder à la plus légère impulsion de la curiosité aussi aisément qu'un caillou, que la main laisse échapper par hasard, rompt la surface d'un étang limpide. Quentin doubla le pas, et arriva sur la colline, assez à temps pour voir l'horrible spectacle qui attirait les regards des paysans. C'était un homme pendu à une des branches de châtaignier, et qui expirait dans les dernières convulsions de l'agonie.
– Que ne coupez-vous la corde? s'écria Durward, dont la main était toujours aussi prête à secourir le malheur des autres qu'à venger son honneur quand il le croyait attaqué.
Un des paysans, pâle comme la cendre, tourna vers lui des yeux qui n'avaient d'autre expression que celle de la crainte, en lui montrant du doigt une marque taillée sur l'écorce de l'arbre, portant la même ressemblance grossière avec une fleur de lis, que certaines entailles talismaniques, bien connues de nos officiers du fisc, ont avec la flèche du roi[34]. Ne sachant pas ce que signifiait ce symbole, et s'en inquiétant peu, Quentin grimpa sur l'arbre avec l'agilité de l'once, tira de sa poche cet instrument compagnon inséparable du montagnard et du chasseur, son fidèle skene dhu[35]; et criant à ceux, qui étaient en bas de recevoir le corps dans leurs bras, il coupa la corde avant qu'une minute se fût passée depuis qu'il avait aperçu cette scène.
Mais son humanité fut mal secondée par les spectateurs. Bien loin d'être d'aucun secours à Durward, ils parurent épouvantés de son audace, et prirent la fuite d'un commun accord, comme s'ils eussent craint que leur présence suffit pour les faire regarder comme complices de sa témérité.
Le corps n'étant soutenu par personne, tomba lourdement sur la terre, et Quentin, descendant précipitamment de l'arbre, eut le désagrément de voir que la dernière étincelle de la vie était déjà éteinte en lui. Il n'abandonna pourtant pas son projet charitable sans faire de nouveaux efforts. Il dénoua le nœud fatal qui serrait le cou du malheureux, déboutonna son pourpoint, lui jeta de l'eau sur le visage, et eut recours à tous les moyens pratiqués ordinairement pour ranimer les fonctions suspendues de la vie.
Tandis qu'il prenait ainsi des soins qui lui étaient inspirés par l'humanité, il entendit autour de lui des clameurs sauvages en une langue qu'il ne comprenait pas; et à peine avait-il eu le temps de remarquer qu'il était environné d'hommes et de femmes d'un air singulier et étranger, qu'il se sentit saisir rudement par les deux bras, et qu'on lui mit un couteau sur la gorge.
– Pâle esclave d'Eblis! s'écria un homme en mauvais français; volez-vous celui que vous avez assassiné? Mais nous vous tenons, et vous allez nous le payer.
Dès que ces paroles eurent été prononcées, les lames de couteau brillèrent de toutes parts autour de Quentin, et ces êtres, féroces et courroucés qui l'entouraient avaient l'air de loups prêts à se jeter sur leur proie.
Son courage et sa présence d'esprit le tirèrent pourtant d'affaire. – Que voulez-vous dire, mes maîtres? s'écria-t-il. Si ce corps est celui d'un de vos amis, je viens de couper par pure charité la corde qui le suspendait; et vous feriez mieux de chercher à le rappeler à la vie, que de maltraiter un étranger innocent qui n'a voulu que le sauver, s'il eût été possible.
Cependant les femmes s'étaient emparées du corps du défunt; elles continuaient les mêmes efforts qu'avait déjà faits Durward pour ranimer en lui le principe de la vie; mais n'obtenant pas plus de succès, elles renoncèrent à leurs tentatives infructueuses. La bande entière alors s'abandonna à toutes les démonstrations de chagrin usitées dans l'Orient, les femmes poussant des cris de douleur et s'arrachant leurs longs cheveux noirs, tandis que les hommes semblaient déchirer leurs vêtemens et se couvraient la tête de poussière. La cérémonie de leur deuil les occupa tellement, qu'ils ne firent plus attention à Durward, la vue de la corde coupée leur ayant fait reconnaître son innocence. Le plus sage parti qu'il eût à prendre était sans doute de laisser cette espèce de caste sauvage se livrer à ses lamentations; mais habitué au mépris de tous les dangers, il éprouvait dans toute sa force la curiosité de la jeunesse.
Les hommes et les femmes de cette troupe bizarre portaient des turbans ou des toques qui ressemblaient plutôt à celle de Quentin qu'aux chapeaux alors en usage en France. La plupart des hommes avaient la barbe noire et frisée, et tous avaient le teint presque aussi noir que des Africains. Un ou deux, qui semblaient être leurs chefs, avaient quelques petits ornemens en argent autour de leur cou ou à leurs oreilles, et des écharpes jaunes, ou d'un vert pâle; mais leurs jambes et leurs bras étaient nus, et toute la troupe semblait misérable et malpropre au dernier degré. Durward ne vit d'autres armes parmi eux que les longs couteaux dont ils l'avaient menacé quelques instans auparavant, et un petit sabre mauresque, c'est-à-dire à lame recourbée, porté par un jeune homme paraissant fort actif, qui surpassait tout le reste de la troupe dans l'expression extravagante de son chagrin, et qui, mettant souvent la main sur la poignée de son arme, semblait murmurer des menaces de vengeance. Ce groupe en désordre, qui se livrait ainsi à des lamentations, était si différent de tous les êtres que Quentin avait vus jusqu'alors, qu'il crut presque reconnaître une troupe de Sarrasins, de ces chiens de païens, éternels antagonistes des braves chevaliers et des monarques chrétiens, dans tous les romans qu'il avait lus ou dont il avait entendu parler; et il était sur le point de s'éloigner d'un voisinage si dangereux, quand
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Poignard Écossais. – (