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il grandit et prêche une doctrine de miséricorde et de bonnes oeuvres. Puis il descend aux enfers, enchaîne le serpent infernal et remonte glorieux au ciel; sa fête annuelle est au mois d'août sous le signe de la Vierge. Quelle étonnante intuition des mystères du christianisme! et combien ne doit-elle pas sembler extraordinaire, si l'on pense que les livres sacrés de l'Inde ont été écrits plusieurs siècles avant l'ère chrétienne. A la révélation de Chrisna succède celle de Bouddha, qui réunit ensemble la religion la plus pure et la plus parfaite philosophie. Alors le bonheur du monde est consommé et les hommes n'ont plus à attendre que la dixième et dernière incarnation, lorsque Vichnou reviendra sous sa propre figure conduisant le cheval du dernier jugement, ce cheval terrible dont le pied de devant est toujours levé et qui brisera le monde lorsque ce pied s'abaissera.

      Nous devons reconnaître ici les nombres sacrés et les calculs prophétiques des mages. Les gymnosophistes et les initiés de Zoroastre ont puisé aux mêmes sources,... mais c'est le faux Zoroastre, le Zoroastre noir qui est resté le maître de la théologie de l'Inde: les derniers secrets de cette doctrine dégénérée, sont le panthéisme, et par suite le matérialisme absolu, sous les apparences d'une négation absolue de la matière. Mais qu'importe qu'on matérialise l'esprit ou qu'on spiritualise la matière, dès qu'on affirme l'égalité et même l'identité de ces deux termes? La conséquence de ce panthéisme est la destruction de toute morale: il n'y a plus ni crimes ni vertus dans un monde où tout est Dieu.

      On doit comprendre d'après ces dogmes l'abrutissement progressif des brahmes dans un quiétisme fanatique, mais ce n'est pas encore assez; et leur grand rituel magique, le livre de l'occultisme indien, l'Oupnek'hat, leur enseigne les moyens physiques et moraux de consommer l'oeuvre de leur hébétement et d'arriver par degrés à la folie furieuse que leurs sorciers appellent l'état divin. Ce livre de l'Oupnek'hat est l'ancêtre de tous les grimoires, et c'est le monument le plus curieux des antiquités de la goétie.

      Ce livre est divisé en cinquante sections: c'est une ombre mêlée d'éclairs. On y trouve des sentences sublimes et des oracles de mensonge. Tantôt on croirait lire l'évangile de saint Jean, lorsqu'on trouve, par exemple, dans les sections onzième et quarante-huitième:

      «L'ange du feu créateur est la parole de Dieu.

      »La parole de Dieu a produit la terre et les végétaux qui en sortent et la chaleur qui les mûrit.

      »La parole du Créateur est elle-même le Créateur, et elle en est le fils unique.»

      Tantôt ce sont des rêveries dignes des hérésiarques les plus extravagants:

      «La matière n'étant qu'une apparence trompeuse, le soleil, les astres, les éléments eux-mêmes sont des génies, les animaux sont des démons et l'homme un pur esprit trompé par les apparences des corps.»

      Mais nous sommes suffisamment édifiés sur le dogme, venons au rituel magique des enchanteurs indiens.

      «Pour devenir Dieu il faut retenir son haleine.

      »C'est-à-dire l'attirer aussi longtemps qu'on le pourra et s'en gonfler pleinement.

      »En second lieu, la garder aussi longtemps qu'on le pourra et prononcer quarante fois en cet état le nom divin AUM.

      »Troisièmement, expirer aussi longuement que possible en envoyant mentalement son souffle à travers les cieux se rattacher à l'éther universel.

      »Dans cet exercice, il faut se rendre comme aveugle et sourd, et immobile comme un morceau de bois.

      »Il faut se poser sur les coudes et sur les genoux, le visage tourné vers le nord.

      »Avec un doigt on ferme une aile du nez, par l'autre on attire l'air, puis on la ferme avec un doigt en pensant que Dieu est le créateur, qu'il est dans tous les animaux, dans la fourmi comme dans l'éléphant: on doit rester enfoncé dans ces pensées.

      »D'abord on dit Aum douze fois; et pendant chaque aspiration il faut dire Aum quatre-vingts fois, puis autant de fois qu'il est possible...

      »Faites tout cela pendant trois mois, sans crainte, sans paresse, mangeant et dormant peu; au quatrième mois les dévas se font voir à vous; au cinquième vous aurez acquis toutes les qualités des dévatas; au sixième vous serez sauvé, vous serez devenu Dieu.»

      Il est évident qu'au sixième mois, le fanatique assez imbécile pour persévérer dans une semblable pratique sera mort ou fou.

      S'il résiste à cet exercice de soufflet mystique, l'Oupnek'hat, qui ne veut pas le laisser en si beau chemin, va le faire passer à d'autres exercices.

      «Avec le talon bouchez l'anus, puis tirez l'air de bas en haut du côté droit, faites-le tourner trois fois autour de la seconde région du corps; de là faites-le parvenir au nombril, qui est la troisième; puis à la quatrième, qui est le milieu du coeur; puis à la cinquième, qui est la gorge; puis à la sixième, qui est l'intérieur du nez, entre les deux sourcils; là retenez le vent: il est devenu le souffle de l'âme universelle.»

      Ceci nous semble être tout simplement une méthode de se magnétiser soi-même et de se donner par la même occasion quelque congestion cérébrale.

      «Alors, continue l'auteur de l'Oupnek'hat, pensez au grand Aum, qui est le nom du Créateur, qui est la voix universelle, la voix pure et indivisible qui remplit tout; cette voix est le Créateur même; elle se fait entendre au contemplateur de dix manières. Le premier son est comme la voix d'un petit moineau; le deuxième est le double du premier; le troisième est comme le son d'une cymbale; le quatrième comme le murmure d'un gros coquillage; le cinquième est comme le chant de la vînâ (espèce de lyre indienne); le sixième comme le son de l'instrument qu'on appelle tal; le septième ressemble au son d'une flûte de bacabou posée près de l'oreille; le huitième au son de l'instrument pakaoudj, frappé avec la main; le neuvième au son d'une petite trompette, et le dixième au son du nuage qui rugit et qui fait dda, dda, dda!...

      »À chacun de ces sons le contemplateur passe par différents états, jusqu'au dixième où il devient Dieu.

      »Au premier, les poils de tout son corps se dressent.

      »Au second, ses membres sont engourdis.

      »Au troisième, il ressent dans tous ses membres la fatigue qui suit les jouissances de l'amour.

      »Au quatrième, la tête lui tourne, il est comme ivre.

      »Au cinquième, l'eau de la vie reflue dans son cerveau.

      »Au sixième, cette eau descend en lui et il s'en nourrit.

      »Au septième, il devient maître de la vision, il voit au dedans des coeurs, il entend les voix les plus éloignées.

      »Au neuvième, il se sent assez subtil pour se transporter où il veut, et, comme les anges, tout voir sans être vu.

      »Au dixième, il devient la voix universelle et indivisible, il est le grand créateur, l'être éternel, exempt de tout, et, devenu le repos parfait, il distribue le repos au monde.»

      Il faut remarquer, dans cette page si curieuse, la description complète des phénomènes du somnambulisme lucide mêlée à une théorie complète de magnétisme solitaire. C'est l'art de se mettre en extase par la tension de la volonté et la fatigue du système nerveux.

      Nous recommandons aux magnétistes l'étude approfondie des mystères de l'Oupnek'hat.

      L'emploi gradué des narcotiques et l'usage d'une gamme de disques coloriés produit des effets analogues à ceux que décrit le sorcier indien, et M. Ragon en a donné la recette dans son Livre de la maçonnerie occulte, faisant suite à l'orthodoxie maçonnique, page 499.

      L'Oupnek'hat donne un moyen plus simple de perdre connaissance et d'arriver à l'extase: c'est de regarder des deux yeux le bout de son nez et de rester dans cette posture, ou plutôt dans cette grimace, jusqu'à la convulsion du nerf optique.

      Toutes

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