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adjectifs sont invariables. C'est ce qui a lieu en lapon et en turc, aussi bien qu'en hongrois.

      L'auteur met en regard des exemples de déclinaisons hongroises, finnoises et laponnes.

      Je relis le plus consciencieusement du monde ces exemples, et il m'est impossible d'en tirer une autre conclusion que celle-ci: le génitif finnois fait an et le génitif hongrois é; le datif finnois fait le, et le datif hongrois nak; l'accusatif finnois est déterminé par un a, et l'accusatif hongrois par un t. Je demande s'il y a là la moindre similitude. Il est vrai que l'ablatif finnois calasta se rapproche du hongrois halastól; mais nous ferons observer que les Hongrois n'ont pas d'ablatif: ils rendent ce cas au moyen de plusieurs postpositions dont le choix est déterminé par les circonstances, suivant, par exemple, qu'il y a mouvement ou non15. L'auteur a choisi celle qui se rapproche le plus de la terminaison finnoise; mais malheureusement pour lui halastól ne veut pas dire «du poisson» comme l'ablatif finnois, ce mot signifie «avec le poisson». Il eût dû mettre haltól. Là encore nons constatons une erreur volontaire.

      Les exemples de Gyarmathi sont suivis de quelques remarques fort insignifiantes et qui peuvent s'appliquer à toutes les langues. Ainsi il dit que les Lapons et les Hongrois se servent volontiers de répétitions.

      Exemples:

      Mais comment l'auteur ne voit-il pas que cette observation n'a pas de sens, puisqu'il traduit ses exemples en latin au moyen de répétitions semblables?

      Nous passons aux comparatifs. Quatre lignes de texte pour faire observer qu'ils se forment de même dans les deux langues, et une page d'exemples.

      Voici une seconde similitude. Dans les deux langues les comparatifs prennent pour terminaison le b que nous avons déjà signalé à l'accusatif des mots lapons. Mais remarquez que le superlatif est tout différent, et que non seulement il est différent, mais qu'il prend en lapon une terminaison latine. Et cependant, encore une fois, personne ne fait dériver le latin du finnois, ou réciproquement.

      On s'attend à une longue discussion grammaticale sur les adjectifs, qui sont très remarquables en hongrois. En effet, de tout accusatif d'un nom les Hongrois peuvent faire un adjectif en changeant le t en s. Ex.: ház, «maison», accusatif házat; adjectif házas, «qui a une maison». De cet adjectif ils peuvent faire un adverbe, házason, «en homme qui a une maison, en homme marié». De cet adverbe ils peuvent faire un verbe, házasodni, «se marier». Gyarmathi devrait remarquer ces particularités, qui font du hongrois une langue tout à fait originale, et les montrer dans la langue finnoise: c'est ainsi qu'il prouverait l'affinité; mais cela lui est impossible.

      Sans dire un seul mot des adjectifs hongrois et finnois, qu'il eût dû de bonne foi examiner, il passe aux noms de nombre. Là encore quatre lignes de texte pour dire que ces noms se ressemblent, et deux pages d'exemples. Après les exemples de mots semblables qui ont été déjà transcrits, je ne me crois plus forcé d'en citer un seul. Il faut seulement avertir ceux qui consulteraient l'ouvrage de Gyarmathi qu'il a commis, là comme partout, ce que j'ai appelé innocemment des «erreurs volontaires». Pour avoir des ressemblances, il invente des noms de nombre qui n'existent pas en hongrois. Ainsi, au lieu de compter comme les hongrois: «vingt-deux, vingt-trois etc.», il fait dire: «deux dix un, deux dix deux, etc.». Cela peut être conforme aux règles finnoises, mais les Hongrois n'ont jamais compté de cette façon. Ces erreurs volontaires nuisent beaucoup à l'auteur, d'abord parce qu'il n'y aurait pas recours s'il plaidait une bonne cause, puis parce qu'on est autorisé à croire qu'il en commet également quand il cite les exemples finnois et lapons.

      Viennent ensuite les pronoms possessifs. Ici Gyarmathi signale une autre similitude. En lapon et en hongrois, il n'y a pas proprement de pronoms. On exprime le possessif au moyen de lettres placées à la fin du mot. Le m, par exemple, exprimera le possessif de la première personne.

      Ajoutons seulement, ce que ne dit pas Gyarmathi, que ce caractère se retrouve dans beaucoup de langues asiatiques: il se retrouve en turc de même qu'en hongrois.

      Nous arrivons aux verbes, aux postpositions, aux adverbes. Ici l'embarras de l'auteur redouble. En effet, c'est surtout par la formation des adverbes, l'emploi des postpositions, et les mille transformations des verbes, que le hongrois a un caractère particulier. Gyarmathi, dans son premier ouvrage, démontre, en s'appuyant sur l'autorité des philologues versés dans les langues orientales, que le hongrois, sous ce rapport, se rapproche encore plus de ces langues.

      En hongrois les prépositions, comme les pronoms possessifs, se mettent, de même qu'en turc, à la fin du substantif.

      De telle façon qu'un nom, ainsi que le remarquait autrefois Gyarmathi, peut subir deux cent quarante-quatre variations. En lapon les postpositions ne se joignent qu'au pronom: elles restent séparées du substantif, lequel ne peut prendre les nombreuses formes des substantifs hongrois et turcs. C'est encore là une des originalités de la langue hongroise. En voici un exemple que me fournit le premier livre de Gyarmathi. Cette phrase: «prenez de ce qui est à vos seigneurs», se traduit en hongrois par deux mots: vegyetek uraitokéból Voici l'explication du dernier: úr veut dire «seigneur»; urak, «les seigneurs»; uratok, «votre seigneur»; uraitok, «vos seigneurs»; é indique le possessif et ból signifie «de». Les langues finnoises présentent-elles cette concision?

      Les verbes peuvent se transformer, en hongrois, au point d'exprimer les changements ou tournures que nous rendons dans nos langues par plusieurs mots. Ex.: látok, «je vois»; látlak, «je te vois»; láthatok, «je puis voir»; láthatlak, «je puis te voir»; láttatok, «je fais voir»; láttathatok, «je puis faire voir»; látdogaltathatok, «je puis souvent faire voir».

      Certes, voilà des particularités bien remarquables dans une langue. Je les indique à peine; mais Gyarmathi ne manque pas de les relever, de les énumérer toutes dans son premier ouvrage. Il va sans dire qu'il les passe entièrement sous silence dans son second. Au lieu de ses observations, qui s'appliquent au turc aussi bien qu'au hongrois, il aurait dû faire ressortir dans les langues finnoise et magyare les mêmes caractères, qui font que ces deux langues, semblables entre elles, diffèrent parfaitement des autres. Mais, nous l'avons dit, cela était impossible.

      Nous avons parcouru l'ouvrage de Gyarmathi. Après les verbes et les pages d'exemples, viennent, sous le nom de syntaxe, quinze observations qui ne peuvent nullement satisfaire le lecteur, car la syntaxe hongroise est d'une étonnante originalité et repousse toute comparaison; puis soixante pages de mots qui passent pour semblables. À la suite de ces mots Gyarmathi a placé quelques remarques sur les langues finnoises qui lui furent inspirées par de nouvelles lectures, après qu'il eut fini son livre. Il refait le travail que nous avons analysé, mais en comparant cette fois le hongrois et l'esthonien. Pour ce qui regarde cette seconde partie, nous ne croyons pas devoir faire autre chose que de rappeler ce qui a été dit plus haut. Pour démontrer grammaticalement que deux langues sont sœurs, il faut faire voir dans ces deux langues non pas quelques similitudes et quelques terminaisons semblables plus ou moins défigurées, mais les mêmes racines, les mêmes caractères, les mêmes originalités, le même génie.

      Nous nous bornons là. Mais, après avoir montré que les preuves de Gyarmathi sont nulles, nous pourrions signaler les mille différences qui séparent les deux langues et qui empêchent qu'elles ne puissent être sérieusement confondues.

      Peut-être me suis-je trop étendu sur le livre de Gyarmathi; mais deux raisons me forçaient à entrer dans quelques détails. L'auteur,

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<p>15</p>

Város veut dire «ville». Ce cas ablatif «de la ville» pourra être rendu de différentes manières: a' városba, a' városban, a' varosból, a' várostól, a' városkoz, etc.