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beaucoup agrandi les domaines; que si on leur enlevait leur charte, ils seraient forcés de s'en aller ailleurs, ou de retourner dans leur pays natal; que les autres établissemens seraient également abandonnés, et que tout le pays tomberait ainsi entre les mains des Français ou des Hollandais. Il terminait par demander qu'on les laissât jouir de leurs anciennes libertés, et qu'on ne mît point d'entraves à l'émigration vers le Nouveau-Monde.

      L'Angleterre n'osa pas mettre à exécution un projet devenu odieux dès sa naissance; et la commission des plantations s'éteignit sans rien faire, tant il est vrai de dire que l'opinion publique avait déjà de force dans ce royaume, fruit inappréciable de la liberté.

      Les colonies anglaises, respectées ainsi dans leurs droits, se formaient insensiblement aux habitudes du gouvernement représentatif, tandis que l'arrivée continuelle des partisans vaincus dans les luttes civiles de la mère-patrie, augmentait leur population et leurs richesses. Les puritains persécutés cherchaient un asile dans la Nouvelle-Angleterre; les catholiques dans le Maryland; les royalistes dans la Virginie.

Le Maryland fut concédé par Charles I à lord Baltimore, baron irlandais, et fondé en 1632 par 200 gentilshommes catholiques. Huit ans après ils demandèrent et obtinrent un gouvernement libre. Cette province est la première qui ait eu l'honneur de proclamer dans le Nouveau-Monde, le grand principe de la tolérance universelle, et de reconnaître la sainteté et les droits imprescriptibles de la conscience 7. Elle se peupla rapidement. Jouissant de la tranquillité pendant que les autres provinces étaient déchirées par des persécutions religieuses, l'émigration s'y portait en foule, sûre d'y trouver le repos et la paix.

Note 7:(retour) Chalmer's annals.

      Telle fut l'origine des deux premières colonies anglaises, la Virginie et la Nouvelle-Angleterre, autour desquelles les autres sont venues ensuite se grouper. En lisant l'histoire des premières on voit celle des dernières; elles ont eu toutes, plus ou moins, les mêmes obstacles à vaincre et les mêmes avantages à utiliser. Elles présentent aussi toutes la même physionomie et le même caractère politique ou social. Peuplées du reste par des habitans d'une même nation, elles ont été commencées à peu de distance les unes des autres comme l'indique le tableau suivant:

      La Virginie, 1608.

      La Nouvelle-York, fondée par les Hollandais en 1614, sous le nom de Nouvelle-Belgique, devient anglaise en 1664.

      Plymouth, 1620, réuni au Massachusetts en 1692.

      Le Massachusetts 1628.

      Le New-Hampshire, 1623.

      Le New-Jersey, fondé par les Hollandais, en 1624, devient anglais en 1664.

      Le Delaware, fondé par les Hollandais en 1627, devient anglais en 1664. Quelques Suédois s'y étaient établis en 1638; mais ils furent subjugués par les Hollandais, et la plupart quittèrent le pays.

      Le Maine en 1630; réuni au Massachusetts en 1677.

      Le Maryland en 1633.

      Le Connecticut en 1635, établi par des colons du Massachusetts.

      Le New-Haven en 1637, réuni au Connecticut en 1662.

      Providence en 1635.

      Le Rhode-Island en 1638, réunis en 1644.

      La Caroline du Nord en 1650; colonie distincte en 1729.

      La Caroline du Sud en 1670. Cette date, relativement aux deux Carolines, a rapport ici à l'établissement des Anglais; car longtemps auparavant, sous l'amiral de Coligny, les Huguenots français y avaient fondé une colonie florissante, qui finit par l'affreuse catastrophe vengée par le chevalier de Gourgues.

      La Pennsylvanie en 1682.

      La Géorgie fondée plus tard en 1733.

      Ces diverses colonies possédaient trois formes bien distinctes de gouvernement, qui, modifiées par les habitudes et par la nature de la société américaine, constituèrent ensuite les élémens du gouvernement fédéral établi par la révolution de 1776. C'étaient les gouvernemens à charte, les gouvernemens royaux ou provinciaux, et les gouvernemens de propriétaires. Les gouvernemens à charte étaient limités à la Nouvelle-Angleterre. Les peuples de cette province, où il y avait plusieurs colonies, jouissaient de tous les priviléges de sujets nés anglais, étaient investis de tous les pouvoirs gouvernemental, législatif, exécutif et judiciaire. Ils choisissaient les gouverneurs, élisaient les assemblées législatives et nommaient les magistrats. Une seule restriction était imposée à leur autorité législative, c'est que les lois qu'ils se faisaient ne pouvaient être contraires à celles de l'Angleterre. Plus tard, la métropole réclama le droit de révoquer les chartes; mais les colons maintinrent qu'elles étaient des pactes solennels et irrévocables, excepté pour causes légitimes. Dans quelques cas néanmoins, elles furent forcément supprimées, particulièrement vers la fin du règne de Charles II, où les corporations métropolitaines éprouvèrent le même sort. Les contestations auxquelles cette question donna lieu entre la mère-patrie et les colonies à charte, furent une des causes de la révolution.

      Le pouvoir législatif, qui était sans appel, résidait dans un corps nommé, «The General Court of the Colony of Massachusetts Bay,» et était composé d'un gouverneur, d'un député-gouverneur, de dix magistrats et de deux députés de chaque ville, tous élus annuellement par le peuple. Le gouverneur et les magistrats formaient une chambre, et les députés l'autre. Cette législature siégeait tous les ans.

      Le pouvoir exécutif était exercé par le gouverneur et un conseil, dont sept membres étaient nécessaires pour délibérer, et qui siégeait deux fois par semaine.

      Les gouvernemens royaux étaient ceux de la Virginie, de la Nouvelle-York, et, plus tard, des Carolines (1728), de la Géorgie, du New-Hampshire et du New-Jersey (1702). Dans ces colonies, le gouverneur et le conseil étaient nommés par la couronne; et les chambres d'assemblée élues par le peuple. Les gouverneurs recevaient leurs instructions du roi ou de ses ministres. Ils avaient voix négative dans les procédés des législatures. Les juges et autres officiers civils étaient aussi nommés par le roi, mais payés par les colonies. Les actes arbitraires des gouverneurs, et le droit de veto réclamé par la couronne sur les actes des assemblées, furent des causes incessantes de difficultés dans ces gouvernemens. Le Canada nous fournit le modèle de cette espèce de régime.

      Les gouvernemens de propriétaires, qui tenaient de la nature féodale, offraient quelque ressemblance avec les palatinats d'Allemagne. Les propriétaires de ces provinces étaient revêtus de certains pouvoirs royaux et législatifs; mais le tout subordonné à l'autorité suprême de l'empire. Le Maryland, la Pennsylvanie, et, dans les premiers temps, les deux Carolines et le Jersey, étaient soumis à cette forme de gouvernement, qui a existé dans les deux premières provinces ainsi que dans le Delaware jusqu'à la révolution. Ces colonies appartenaient à des propriétaires ou particuliers, à qui des territoires avaient été concédés par le souverain avec pouvoir d'y établir des gouvernemens civils et d'y faire des lois, sous certaines restrictions. Leur histoire est un long tissu de querelles occasionnées par la manière dont les propriétaires exerçaient leur droit de révoquer ou négativer les actes des assemblées législatives; car même dans ces colonies des corps représentatifs furent introduits, dont les membres étaient nommés mi-partie par les propriétaires et mi-partie par le peuple. En 1719, les habitans de la Caroline exaspérés contre leurs maîtres, s'emparèrent du gouvernement et élurent un gouverneur, un conseil et une assemblée, qui se réunirent pour publier une déclaration d'indépendance, dans laquelle ils exposèrent les motifs de leur renonciation à leur ancienne forme de gouvernement. Les anciennes lois de l'assemblée de la Virginie (1624) renferment une déclaration qui définit le pouvoir de l'assemblée de taxer et d'imposer des charges personnelles.

Dès l'origine (1643), les provinces de la Nouvelle-Angleterre formèrent entre elles une confédération offensive et défensive, chacune se réservant néanmoins son gouvernement et sa juridiction particulière. Les affaires générales de la confédération étaient réglées par un congrès composé de deux commissaires de chaque colonie. Cette législature se nommait «The

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